The 13th Floor Elevators
“THE PSYCHEDELIC SOUNDS OF...” INTERNATIONAL ARTISTS 19 66
En 1965 à Austin, Roky Erickson chantait au sein de The Spades, groupe pour qui il venait d’écrire “You’re Gonna Miss Me”, hymne garage porté par une suite d’accords implacable et son chant hurlé. En le voyant sur scène, Tommy Hall, étudiant en philosophie adepte du LSD-25, perçut en lui le prophète capable de diffuser les préceptes mystiques de Timothy Leary. Il parvint à convaincre Erickson de monter un projet avec lui et, accompagnés de musiciens du groupe local The Lingsmen, ils formèrent les 13th Floor Elevators et réenregistrèrent “You’re Gonna Miss Me” qui devint un succès national. S’il reste le classique du groupe, ce tube n’est pas vraiment représentatif du style trippant des13th Floor Elevators qu’on retrouve plus sur “Tried To Hide” ou “Reverberation”, titres guidés par la guitare hypnotique emplie de reverb de Stacy Sutherland, les textes de Tommy Hall, le feulement de Roky Erickson et cette jarre électrique qui crée des oscillations étranges. L’instrument fut inventé par Hall pour générer des sonorités cosmiques à une époque où le synthétiseur n’existait pas et reste la signature sonore du groupe. Manifeste lysergique sorti en 1966, le premier album du groupe frappe dès sa pochette : au recto, l’illustration représente l’explosion kaléidoscopique que provoque l’acide sur la perception visuelle, et au verso, un texte prosélyte (où figure pour la première fois le terme psychédélique appliqué à une musique) vante les bienfaits du LSD sur la santé mentale (!). A l’origine, l’album avait été conçu comme le voyage d’un néophyte vers l’illumination : inexpérimenté sur “You Don’t Know (How Young You Are)” et “Thru The Rhythm”, il prend son premier acide (“Rollercoaster”), voit un incendie exploser dans sa tête (“Fire Engine”), remet toute son existence antérieure en question (“Reverberation”) et finit par vivre dans la félicité de cette renaissance sensorielle (“Kingdom Of Heaven”). Le label International Artists brouilla le message en modifiant l’ordre des chansons pour placer le single à succès “You’re Gonna Miss Me” en ouverture. Un méfait typique de ce label incompétent — qui s’avéra incapable de vendre correctement le disque et précipita le groupe vers son destin tragique fait d’insuccès, de folie, de prison et de mort brutale – mais qui n’altère en rien la puissance hallucinatoire de cet album. ERIC DELSART