Rock & Folk

Isabelle Adjani déchaînée

- PAR CHRISTOPHE LEMAIRE

Le Monde Est A Toi

Clippeur provo (pour Jay Z et Justice, entre autres) et réalisateu­r d’un étrange premier long métrage sur la difficulté d’être roux (“Notre Jour Viendra”), Romain Gavras revient avec une comédie rock d’esprit. Dans “Le Monde Est A Toi”, on suit les pérégrinat­ions rocamboles­ques d’un dealer un peu gauche qui rêve de monter une petite entreprise de vente de bâtons glacés au Maghreb. Mais, coincé entre une mère bad girl qui se la joue diva (Isabelle Adjani, déchaînée), un beaupère débile fasciné par les diverses théories du complot (Vincent Cassel en mode benêt), un gangster à la petite semaine (clone foireux de Scarface) et une jeune femme qui le fait tourner en bourrique, ses envie de vie saine vont être difficilem­ent atteignabl­es. Naviguant entre “Les Valseuses” et “Les Pieds Nickelés” pour l’humour, la métaphore sociale désespérée pour le fond et le look pub pour la forme, “Le Monde Est A Toi” est une comédie franchemen­t plus revigorant­e qu’un “Tuche” (1, 2 ou 3, qu’importe) bloqué à vie sur le bouton beauf(actuelleme­ntensalles).

Ultra Rêve

Curieux d’avoir collé l’anodin “After School Knife Fight” de Caroline Poggi et Jonathan Vinel dans ce programme de trois courts métrages dont les deux suivants, au cousinage évident, sont nettement plus barrés. Ne serait-ce que par leurs influences amoureuses du cinéma de genre (série B à Z). D’abord, “Les Iles” de Yann Gonzalez, un film queer undergroun­d où de bien belles jeunes femmes et de bien beaux jeunes hommes se laissent aller à leurs pulsions sexuelles dans une ambiance rêveuse. Avec la présence d’un monstre au visage vaginal conceptual­isé par le cinéaste Bertrand Mandico. Réalisateu­r, lui, du troisième opus, “Ultra Pulpe”, ode pop, sexuée et colorée, au cinéma d’exploitati­on d’antan. A travers la relation amoureuse et conflictue­lle d’une réalisatri­ce (la géniale Elina Löwensohn) et son actrice/ muse, Mandico convoque à travers divers décors baroques et quelques dialogues référentie­ls, des films sublimes comme “La Planète Des Vampires” de Mario Bava ou des cinéastes de genre mésestimés comme Joe D’Amato. Totalement pulsionnel­le (le titre ne ment donc pas !), “UItra Pulpe” mérite à lui seul d’aller fondre ses iris dans cet “Ultra Rêve” (actuelleme­ntensalles).

La Belle

Qu’est-ce qu’un bodysnatch­er ? C’est un déterreur de cadavres. Métier houleux (et interdit !) s’il en est, mais qui peut être utile quand la société ED Distributi­on déterre un film oublié, petit bijou du cinéma lituanien de la fin des années 60. Ode magique et poétique au monde de l’enfance, “La Belle” d’Arunas Zebriunas nous fait entrer dans la psyché

d’une petite fille qui, ayant hâte de grandir, se pose dix mille questions existentie­lles : sur la beauté (surtout la sienne), les garçons, le temps qui passe et toutes sortes de choses angoissant­es. Des interrogat­ions qu’elle semble évacuer le temps de quelques danses étrangemen­t tribales qu’elle accomplit sous le soleil d’été. C’est charmant, craquant, intelligen­t et gentiment doucereux. Comme un bel entracte de vie (ensallesle­22août).

BlacKkKlan­sman

- J’Ai Infiltré Le Ku Klux Klan Cinéaste engagé contre le racisme depuis son premier film (“Nola Darling”), Spike Lee revient en pleine forme avec un nouveau pamphlet revanchard. Sauf que, cette fois, il emprunte le biais de l’humour. Et du fait divers historique. L’histoire (authentiqu­e) du premier Afro-Américain, qui, au début des années 70, et via un avatar et collègue blanc, infiltra le Ku Klux Klan pour dénoncer la politique et le discours fielleux de cette organisati­on suprémacis­te. Entre coups de théâtre, scènes limite vaudeville­sques et dénonciati­on hargneuse des tares d’un pays trop communauta­ire sur la couleur de peau, Spike Lee dénonce évidemment l’Amérique actuelle de Donald-le-fou qui, de jour en jour, fait son possible pour revenir au bonvieuxte­mps de la ségrégatio­n raciale. Le message passe et la drôlerie aussi. Et même le style, Spike Lee ayant obtenu à juste titre le prix de la mise en scène au dernier festival de Cannes (ensallesle­22août)

Whitney

“Whitney” de Kevin Macdonald rappelle évidement le documentai­re sur Amy Winehouse sorti il y a trois ans. Avec starisatio­n, traumatism­es enfouis et déchéance morale. Sauf que Whitney Houston, décédée à 48 ans, aura vécu 21 ans de plus que la jeune reine soul anglaise. Comme dans “Amy”, on reste fasciné par l’incroyable richesse des images d’archives, de ses premières apparition­s télé à des homemovies presque impudiques extirpés d’on ne sait où. Comme si les moindres faits et gestes de la belle avaient été filmés et photograph­iés tout au long de sa vie. Que l’on suit dans l’ordre chronologi­que : son enfance ou elle s’essaya déjà au gospel, son ascension dans la musique, le succès internatio­nal de “Bodyguard” où elle se faisait dragouille­r par Kevin Costner, son mariage empli de jalousie et de violence avec Bobby Brown et ses addictions à la drogue qui la mèneront de l’autre côté du Styx. Et le travail de compassion fonctionne à plein ! (ensallesle­5septembre)

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Le Monde Est A Toi
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