Mudhoney
“Digital Garbage” SUBPOP/PIAS
Mudhoney est un groupe joyeusement maudit. Plus garage, plus dingue que Nirvana, le groupe de Seattle, frangin de tranchée de la bande de Kurt Cobain depuis les débuts, n’a jamais connu le même succès. Ceci expliquant, peut-être, son incroyable longévité au pays du larsen cradingue. Nouvel et dixième album pour Mark Arm et ses potes, biberonnés aux Stooges, pour faire court. D’entrée, on sait que Mudhoney va faire du Mudhoney. Ici, on n’a jamais joué aux gros malins, on fonce et on voit après. “Nerve Attack”, qui ouvre, est ce serpent rigolard et vicelard déjà croisé à maintes reprises ces trente dernières années chez Arm, dont la voix est peut-être juste un peu plus mise en avant qu’à l’accoutumée. “Paranoid Core”, le single, accélère encore, alterne batterie fédératrice et guitares mordantes et enfonce un clou rouillé avec jubilation. Tout comme “Please Mr Gunman”, visiblement une chanson anticléricale, dans laquelle le groupe semble entrer, déjà bourré, dans un saloon pour déclencher une baston mémorable. “Kill Yourself Live” et sa longue intro de desperado, prêche dans un désert infesté de crotales. “Night And Fog” déambule avant de mordre. “Hey Neanderfuck” tourbillonne, la tête haute, loin des grottes d’antan. “Prosperity Gospel” a la colère saturée. “Messiah’s Lament” pleure sur une Amérique dévorée par sa propre bêtise, valse mélancolique habitée. “Next Mass Extinction” débute par un harmonica avant de sauter à pieds joints dans une boue pas franchement thérapeutique. Arm, comme souvent, répète façon mantra, quelques phrases presque menaçantes. “Oh Yeah”, ultime titre de ce disque incandescent, achève le travail sans rechigner. Et encore un album que Trump n’achètera pas... ✪✪✪ JEROME REIJASSE