Alejandro Escovedo

“The Crossing”

YEPROC Alejandro Escovedo revient de loin. Miraculé de l’hépatite C, l’ex-guitariste de The Nuns, Rank And File et True Believers a une sacrée histoire à raconter. Celle d’une famille mexicano-américaine qui lui a inculqué les valeurs qui font l’Amérique, contrairement à ce que semble avoir du mal à assimiler une bonne moitié du pays. Depuis ses débuts punk, cet excellent chroniqueur des Etats-Unis contemporains décrit ce qui l’entoure avec l’acuité d’un Kendrick Lamar, mais du côté rock’n’roll. L’oncle de Sheila E mériterait sans doute d’être aussi célébré que sa nièce, Bruce Springsteen ou Tom Petty. C’est le premier de ses disques enregistrés sur un autre continent, en Italie, avec Sacri Cuori — le groupe mené par Don Antonio ne lustre pas le répertoire, mais raconte mieux que quiconque cette histoire d’americana. “The Crossing”, bande-son brûlante du pays en 2018, narre les aventures de deux jeunes immigrés : Diego, arrivé du Mexique, et Salvo, d’Italie, qui débarquent aux Etats-Unis pour poursuivre leur rêve américain, à la recherche de leurs idoles punk rock, jusqu’à la désillusion. Alejandro Escovedo, lui, a croisé Joe Ely, Wayne Kramer de MC5 et James Williamson des Stooges, mais aussi Peter Perrett et John Perry des Only Ones (lesquels ne s’étaient pas retrouvés ensemble en studio depuis près de quarante ans). Ils surgissent tous au détour de ces 17 chansons variées, viscérales. Nulle d’entre elles n’est posée là au hasard. “The Crossing”, un album insondable, plein de trésors cachés : le meilleur d’Escovedo depuis “Gravity”, son premier solo sorti en 1992. Ceux qui entendent encore quelque chose sauront que le compliment n’est pas à prendre à la légère. VINCENT HANON