ROCK ’ N’ROLL FLASH BACK
Çane s’invente pas
OCTOBRE 1988
Michel Rocard était alors le punching-ball
du président et Huey Lewis, “l’un des gars les plus sympas du monde. – Si l’occasion se présente, je n’ai rien contre le fait d’être une ordure. – Tout le monde autour de vous est sympa ! – C’est une horreur. Je finis par croire que c’est la clé de notre succès, que la qualité de nos chansons n’y est pour rien !”. Afrika Bambaataa voulait internationaliser la “Zulu Nation” à coups de samples. “Tout le monde se sample mutuellement. Le sampling permet de faire connaître autant les sampleurs que les samplés.” Nos deux amis de Style Council réussiraient-ils à marier, avec un “classico-jazzy de bas étage”, aspirations prolétariennes et costumes sport d’excellente coupe ? Paul Weller : “Nous visons le marché des ouvriers ET des yuppies.” Mick Talbot : “Sans oublier les adolescents ET les grands-mères.”
OCTOBRE 1968
Maurice Couve de Murville régnait alors sur le gouvernement. Pourquoi Yves
Montand avait-il refusé de chanter dans les usines en mai ? “Vous êtes chanteur, vous pouvez bien nous en pousser une ! Pourquoi ne pas faire appel aux stripteaseuses ? Ils n’ont qu’à demander à Anquetil de venir faire cent kilomètres aussi !” En dressant le bilan de Jazz A Juan, Rock&Folk suivait tant bien que mal les lettres de l’alphabet. Mal : “O comme la 2e lettre de Bolling”, “Q comme les Drayton Singers”, “X comme Xénakis. Vous vous êtes trompé de journal si vous comptiez lire quelque chose à ce sujet.” Le Newport Folk Festival avait remonté sous la pluie ses ateliers, sa hootenanny, ses concerts free form, reconduit sa transhumance de bardes fraternels, et donnait aussi dans le R&B avec Taj Mahal et BB King. Le nouveau Rolling Stones s’intitulerait “Beggar’s Bouquet” (sic).
OCTOBRE 1998
Lionel Jospin était alors le chef des ministres. On se marquait par rapport à Marilyn Manson, le mâle alpha androgyne. Le mot “pop” reprenait du service, Aqua jouait les repoussoirs, PJ Harvey, “prêtresse de la PQP (pop qui pense)”, jouait le produit d’appel pour rockers. Polly Jean avait 30 ans et méditait, dans la chapelle Sainte-Catherine de Dorset, sur sa rupture avec Nick Cave. “Catherine est la patronne des vieilles filles.” Steven Jones ( Babybird), “l’oiseau noir de
l’indie pop”, figurait dans la bande-son des “Avengers”, mais regrettait que les charts fussent “infestés” de musiques de film,
“de remix techno, de versions house”, et que la britpop eût rendu l’âme pour de bon.
Michel Houellebecq vouait un culte à “Days Of The Future Passed”, le concept album des Moody Blues. Nino Ferrer s’exterminait au fusil de chasse, un 13 août dans le Lot.
OCTOBRE 1978
Raymond Barre était alors Premier ministre. L’échotier décrocha : “Keith Moon est mort. – Non ? – Hier, jeudi, d’une overdose.” Outre-Atlantique les festivals folk s’éteignaient dans la nostalgie de sixties. Outre-Manche, Reading faisait les stars. Le fantôme des Sex Pistols flottait sur le sacre posthume du punk. Patti Smith : “Mais où est donc Johnny Rotten ?” Jimmy Pursey : “Ils vous ont lâché au moment de la grande bagarre, dites pas le contraire !” On se prosterna devant le “roi prolo”, pas devant les Jam, “mal taillés pour le grand carnage”. Les Stranglers affirmaient l’absolu britannique
de la new wave, “quelque chose qui devait arriver à cause de l’état de ce pays et des gens qui le gouvernent”. Téléphone suscitait
des polémiques : “On oppose les musiciens et les villes. Il n’y a de rock à Bures-surYvette que si un groupe va y jouer.”
OCTOBRE 2008
François Fillon tenait alors Matignon. Réuni,
Trust se voyait comme la dernière cellule de la sédition avec NTM. D’ailleurs le groupe de Bernie avait recruté un DJ et NTM, des guitaristes. Keziah Jones se réjouissait que le monde s’entichât d’afrobeat nigérian, mais le hip hop était en train de laminer le verbe de Fela. Keziah balançait entre deux sentiments : “Lagos c’est le futur”, “l’âge d’or est derrière nous, mec”. Naguère, les Who avaient introduit The Clash dans les stades américains. En acceptant leur offre, le groupe “franchissait bien plus qu’une marche vers la reconnaissance internationale. La question ici posée touchait à son essence même.”
Paul Simonon : “J’avais presque l’impression de mimer le truc”. Liam avait épousé l’ex de Robbie Williams, Oasis débauchait maintenant son batteur. Liam : “C’était ce que Robbie Williams avait de meilleur.”