Rock & Folk

ARCHITECTS

Frappé par un deuil, le quintette britanniqu­e offre, quinze ans après ses débuts, un metalcore toujours aussi rageur et mélodique.

- Joseph Achoury Klejman

FORME EN 2004 A BRIGHTON par deux frères jumeaux, Dan et Tom Searle, respective­ment batteur et guitariste, originelle­ment sous le nom Counting The Days, Architects a su devenir, durant ses quinze années d’existence, l’un des noms les plus importants du metal moderne. Après un premier album sorti en 2006, “Nightmares”, qui lui permet de faire ses armes en première partie de groupes tels que Beecher ou Bring Me The Horizon, le combo commence à s’affirmer avec “Ruins”, deuxième album, qui lui ouvre la voie des Etats-Unis. La machine est lancée et Architects est signé sur Century Media, devenant le premier groupe anglais sur ce label depuis Napalm Death. Les albums suivent et les tournées s’enchaînent sur tous les continents, en compagnie de ceux qui deviendron­t eux aussi les espoirs d’un renouveau du metal (Parkway Drive, August Burns Red, Enter Shikari).

Tristesse incommensu­rable

En mai 2016, Architects sort “All Our Gods Have Abandoned Us”, disque puissant, mélodique, mais empreint d’une tristesse incommensu­rable. La raison de cette affliction est vite dévoilée : Tom Searle, guitariste fondateur du groupe et frère du batteur Dan, décède d’un cancer le 20 août, après trois années à se battre contre la maladie. Mais rien n’arrête Architects, et quoiqu’en deuil, les membres du groupe décident de continuer en hommage à leur camarade disparu. Josh Middleton a la lourde tâche de le remplacer, à l’origine en tant que musicien de tournée, puis officielle­ment en tant

que guitariste du groupe. “Holy Hell” sort le 9 novembre 2018. Sur l’album, du matériel composé par le défunt Tom Searle, ainsi que de nouvelles compositio­ns. On y découvre un son plus atmosphéri­que qu’à l’accoutumée, grandiloqu­ent presque. Alex Dean, chanteur du

groupe : “Nous avons écouté beaucoup de bandesorig­inales, surtout du Hans Zimmer, qui nous a énormément inspirés. Pour cet album, nous avions déjà les chansons de Tom, qui donnaient une sorte de direction, et auxquelles nous voulions faire honneur, mais nous avions aussi envie, comme à chaque album, de monter d’un cran, et de donner à Josh la liberté créative dont il a besoin. Cela fait quelque temps que l’on veut incorporer cet aspect symphoniqu­e au groupe, avec des cordes, par exemple. C’est la première fois que l’on a une section de cordes qui vient enregistre­r avec nous en studio. On a pu travailler avec l’orchestre, plutôt que de programmer les arrangemen­ts. C’était un processus plus organique. Et même si aujourd’hui on peut avoir un très bon son avec des programmat­ions, cela n’a rien à voir. Certains des instrument­s étaient vieux de plusieurs centaines d’années ! C’était impression­nant de voir ces chansons, que l’on avait écrites sur l’ordinateur,

se développer pour être jouées par de vrais instru

ments, venir à la vie.” Cependant, si ce dernier album d’Architects est très cinématogr­aphique, il ne faut pas espérer pour l’instant les entendre sur le grand écran. “Je ne vois pas bien quel genre de film pourrait avoir du Architects en bande-son.”

Communauté hardcore

Mais Architects n’est pas qu’un des fers de lance du metal actuel. C’est aussi un groupe engagé. Tous les membres sont végétarien­s et soutiennen­t l’associatio­n Sea Sheperd. “Nous voulons montrer aux gens qu’il existe une autre voie. Mais il faut que ce soit authentiqu­e. Parfois des groupes prétendent être végétarien­s parce que c’est à la mode. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a toujours eu de la politique en musique, depuis les années 60, avec John Lennon, puis la scène hardcore, qui parlait de véganisme, de réchauffem­ent climatique. C’est toujours drôle quand les gens nous disent : ‘ Oh, arrêtez avec la politique et la

musique’. A votre avis, qu’est-ce qui a commencé tout ça ? La musique a vraiment commencé avec le message. La musique peut provenir de la douleur, ou du stress, ou alors de voir quelque chose que l’on aime pas, contre lequel on se rebelle. Et puis, nous avons beaucoup de liens avec la communauté hardcore, et elle a toujours un message à faire passer, ça fait partie du genre. Si quelque chose nous touche, et que l’on a une plateforme pour exprimer nos préoccupat­ions, pourquoi ne pas le faire ? Je ne pense pas que nous soyons totalement tarés de vouloir faire en sorte que les gens aient plus de compassion. Pour autant, nous ne sommes pas un groupe vegan qui essaie de faire passer de force son message aux gens. On veut ouvrir la conversati­on.” Architects sera sur la scène de l’Olympia, à Paris, le 27 janvier 2019.

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