ERIC CLAPTON
A I'honneur dans le documentaire "Life In 12 Bars", le guitariste anglais de 73 ans a derriere lui plusieurs vies. Avec tout de meme, un fil conducteur : le blues.
Le jeune homme affirme une personnalité indépendante et rebelle sur la pochette, semblant plongé dans sa revue Beano quand les autres fixent l’objectif
IL A ETE SURNOMME SLOWHAND OU ENCORE GOD, mais connaît-on le véritable Eric Clapton ? Dans la foulée de la sortie de l’excellent documentaire “Life In 12 Bars”, réalisé par Lili Fini Zanuck, il est peut-être temps de revenir sur l’apport de l’un des guitaristes les plus importants de l’histoire. Et de raconter la destinée cahoteuse de ce personnage finalement attachant.
La naissance d’une obsession
L’enfance façonne souvent la personnalité d’un homme. Celle d’Eric Clapton a été pour le moins compliquée. Elle a pour cadre une tranquille mais étouffante bourgade anglaise, Ripley. Il est l’enfant non désiré d’une adolescente de quinze ans, Patricia et d’un soldat canadien de neuf ans son aîné, marié par-dessus le marché. Le paternel s’évapore bien vite et le bambin est élevé par ses grands-parents, Rose et Jack Clapp. Pour préserver l’enfant du scandale, ils inventent une histoire à peu près crédible : sa mère sera désormais sa soeur — elle s’en va d’ailleurs refaire sa vie avec un autre militaire en Allemagne de l’Ouest — et son oncle son grand-frère. Eric est un enfant timide, renfermé, solitaire, qui sent bien qu’il n’est pas tout à fait comme les autres, sans savoir exactement pourquoi. Jusqu’à ce qu’à neuf ans, il apprenne la vérité. Un traumatisme. Ses notes chutent drastiquement, il se réfugie dans la musique. A la radio, il est frappé par un morceau de Sonny Terry et Brownie McGhee. Un écho à son mal-être intérieur. La naissance d’une obsession, celle de la musique bleue. Un peu plus tard, ses capacités au pinceau lui ouvrent les portes d’une classe d’art graphique dans un lycée spécialisé à Kingston Upon Thames. Mais cet adolescent malingre, espiègle et un peu sauvage, ne daigne s’investir que dans la pratique assidue de la guitare. Il écume les disquaires londoniens en quête de rares albums de Leadbelly, Bo Diddley, Blind Boy Fuller ou Big Bill Broonzy. Bientôt, il passe l’essentiel de son temps à ressasser ses accords. Ses progrès sont fulgurants. A dix-sept ans, il se fait logiquement saquer de son bahut, où il a tout de même eu le temps de côtoyer un certain Keith Relf. Le Marquee devient son fief, il y croise Alexis Korner ou les futurs Rolling Stones. Il tente vaguement de gagner sa croûte avec des petits boulots, puis se tourne vers ses aïeux pour enfin passer à la guitare électrique avec une réplique britannique de la Gibson ES-335. Désormais, il est paré pour fonder un vrai groupe. Pas question cependant de plagier les Beatles. Il s’agit de suivre à la lettre la règle des douze mesures. Le musicien Eric Clapton sera un puriste, un croisé du blues, ou ne sera pas. L’ascension sera rapide, irrésistible. Son premier attelage, éphémère, s’appelle The Roosters. Il y fait la connaissance du pianiste Ben Palmer, un futur ami dévoué. Eric passe brièvement par Casey Jones And The Engineers, qu’il largue sans regret lorsqu’il reçoit un appel à l’aide de Keith Relf, à la recherche d’un guitariste compétent et motivé pour les Yardbirds. Ceux-ci ont une opportunité unique : prendre la place des Rolling Stones au Crawdaddy. Ces derniers viennent en effet de jouer un bien sale tour à Giorgio Gomelsky, propriétaire du club, et de signer
avec Andrew Loog Oldham. Nous sommes en 1963, Eric touche au but. Il a le privilège d’accompagner Sonny Boy Williamson, qui se montre peu affable avec ces jeunes blancs-becs britons. Les Yardbirds capturent un premier disque en public, “Five Live Yardbirds”. Clapton y gagne un surnom, Slowhand, en référence à la célérité de son jeu, déjà très élégant. Peu à peu, il se construit aussi un personnage de discret marginal : toujours tiré à quatre épingles, vêtu différemment de ses camarades, taciturne, il développe un charisme ténébreux qui le place à l’égal du chanteur Keith Relf. En sous-main, le bassiste Paul Samwell-Smith dirige les opérations et décide de viser le proverbial tube. Il en a ras le bol des rades londoniens. Aux yeux de Clapton, un morceau comme “Good Morning Little Schoolgirl”, avec ses choeurs un peu niais, est déjà limite. C’en est trop avec “For Your Love” : il rejette ce tournant pop et claque la porte, bravache. Un tube ? A quoi bon. Il laisse un cadeau d’adieu splendide avec l’instrumental “Got To Hurry”. Une ultime tournée en première partie des Beatles lui permet de lier une amitié avec George Harrison. Leurs chemins ne cesseront de se croiser.
Sourde rivalité
Nous voici en 1965. Eric vient de gagner une certaine respectabilité. Il n’est pas habituel, dans ce milieu, de refuser la compromission. Toujours est-il qu’il ne reste pas bien longtemps au chômage. A peine rentré à Ripley, il reçoit un coup de fil de John Mayall, qui lui propose d’intégrer ses Bluesbreakers. Cette figure du British blues boom l’héberge pendant plusieurs mois, lui prêtant même sa gargantuesque collection de vinyles. Clapton se terre dans la pratique intensive de son instrument.
Il s’est également procuré une Gibson Les Paul d’occasion (la fabrication est à l’arrêt depuis 1961), dont l’association avec les amplificateurs Marshall fait merveille. Le son Clapton prend sa forme iconique. Il commet encore de retentissantes frasques, comme par exemple cette tournée rocambolesque à travers l’Europe, menée à l’arrache avec ses potes pendant trois mois et qui se termine par une quasi-séquestration en Grèce. Mais Mayall, qui sait l’importance du garçon, lui pardonne tout et le réintègre dès son retour à Londres. Il n’hésite pas non plus à lui accorder une place particulière sur l’album “Bluesbrakers With Eric Clapton”. Encore une fois, le jeune homme affirme une personnalité indépendante et rebelle sur la pochette, semblant plongé dans sa revue Beano quand les autres fixent l’objectif. Du côté de Highbury fleurissent des tags Clapton Is God. Un nouveau surnom sur mesure pour l’ego grandissant d’Eric. Au sein de cette vénérable institution, il s’esbaudit devant le jeu de basse vrombissant de Jack Bruce qui remplace brièvement John McVie. Tout change en mai 1966, à la suite d’une performance dans la cité estudiantine d’Oxford, lorsqu’un batteur longiligne et roux nanti d’une courte barbe s’invite sur scène pour une jam. Il s’agit de Ginger Baker, une petite légende du circuit jazz anglais, puisque passé chez Alexis Korner et Graham Bond, tout comme Bruce, avec lequel il en était venu à échanger des uppercuts. Avec Clapton, le coup de coeur musical est immédiat, et Baker évoque bien vite l’idée d’un trio. Eric accepte à condition que Bruce tienne la basse. Beau joueur, Ginger Baker va cogner à la porte de l’Ecossais pour s’excuser de leurs querelles passées. L’instabilité chronique de Clapton va encore sévir : il éprouve sans cesse un certain besoin de liberté, de renouvellement. Il coupe donc les ponts avec John Mayall. Le 11 juin 1966, le Melody Maker annonce la nouvelle : un “groupe des groupes” serait en train de se préparer dans le plus grand secret, quelque part dans la capitale. Le puriste blues a vécu, place au virtuose psychédélique chamarré. Cream sera rétrospectivement très influent. Premier supergroupe, power trio étalon, il impose également Clapton dans le rôle du guitar hero. Il irradiera nombre de formations, à commencer par le Jimi Hendrix Experience. Par ses interventions débridées sur scène et son sens mélodique en studio, Clapton traumatise nombre de guitaristes, allant de Santana à Steve Miller, en passant par Eddie Van Halen, Peter Green, Mike Taylor ou Gary Moore. Dès sa création, Cream repose sur une émulation explosive. Les débuts sont timides, avec peu de moyens pour “Fresh Cream”, premier album au style encore embryonnaire, entre compositions pop doucement surannées et annonçant le psychédélisme (“NSU”, “I Feel Free”) et quelques éblouissantes reprises de blues comme “Spoonful” ou “I’m So Glad”. Le triumvirat signe avec Atlantic aux Etats-Unis, Ahmet Ertegun poussant Eric à prendre la tête de l’ingérable entité. Il n’en aura pas le caractère, ni vraiment l’ambition. Cream décolle réellement en 1967, avec “Disreali Gears” et ses classiques intemporels : “Sunshine Of Your Love”, “Strange Brew” ou “Tales Of Braves Ulysses”. La Californie accueille le groupe à bras ouverts, il y développe de longues improvisations qui deviendront sa marque de fabrique. Munis de ses oripeaux bigarrés (dont une Gibson SG peinte par The Fool), cheveux permanentés, Clapton devient une véritable star. Mais cet âge d’or ne dure pas plus que la franche camaraderie des trois lascars, qui entament bientôt une sourde rivalité. Un évènement crucial persuade Eric qu’il fait fausse route : sa découverte du “Music From Big Pink” de The Band, qui le chamboule au point qu’il fait le voyage jusqu’à Woodstock pour rencontrer cette patibulaire troupe de bûcherons. Il renie très vite le chemin parcouru avec Cream. Il éprouve un besoin urgent de simplicité, de calme, de racines. Il se laisse pousser une très gauloise moustache, ressort ses jeans râpeux du placard. Son groupe ne l’intéresse plus, même si le double album “Wheels Of Fire” est à nouveau un colossal succès, notamment grâce à des joyaux comme “White Room”, “Politician”, ou la reprise transfigurée de “Crossroads”. Cream se sépare le soir du 26 novembre 1968, au Royal Albert Hall, laissant un album testamentaire, “Goodbye”. Eric y signe “Badge” avec George Harrison, qui l’avait invité quelques mois auparavant à Abbey Road pour ciseler ce qui reste l’un des plus magnifiques solos jamais conçus, sur “While My Guitar Gently Weeps”. En deux folles années, Eric est passé de musicien reconnu de la scène anglaise à célébrité planétaire, mais semble désormais fuir la notoriété. Il est, décidément, insatiable.
Un goût de gâchis
Le chapitre qui suit est celui d’un malentendu. Clapton est d’abord dragouillé par Mike Jagger pour suppléer un Brian Jones zombifié. Il refuse bien évidemment, ses relations avec Keith Richards étant plutôt fraîches. Ils sont pourtant côte à côte pour un soir, avec John Lennon et Mitch Mitchell. Cet aréopage prestigieux, nommé The Dirty Mac, est rassemblé pour un show destiné à la télévision : The Rock And Roll Circus. Leur version de “Yer Blues” est très convaincante. Lennon est séduit par une personnalité qui lui ressemble, timide, écorchée. Mais Eric Clapton a désormais une idée en tête : collaborer avec Stevie Winwood, dont il apprécie la voix ample et les talents à l’orgue.
Le puriste blues a vécu, place au virtuose psychédélique chamarré
Ivre, il provoque un scandale
Las, par l’odeur du gain alléché, Ginger Baker se radine, et le projet prend alors une maussade tournure, qui rappelle le cadavre encore chaud de Cream. Baptisée Blind Faith et renforcée par Ric Grech à la basse, la formation n’a même pas le temps de se constituer un répertoire digne de ce nom qu’elle est catapultée devant plus de cent mille personnes à Hyde Park. Clapton boude logiquement, ce n’est pas ce qu’il espérait, et il va pratiquement saborder cette belle machine à générer des dollars. Une gigantesque tournée aux Etats-Unis est prévue. Déjà blasé par le projet, Eric préfère picoler dans le bus bringuebalant d’une bande de sudistes rigolards, Delaney & Bonnie, qui assurent la première partie. Leur musique très roots est proche de ses aspirations. L’expérience Blind Faith ne dure que quatre mois, et laisse un goût de gâchis, malgré un album correct réalisé avec Jimmy Miller. Des choses exquises comme “Can’t Find My Way Home” et “Presence Of The Lord” n’étaient, tout de même, pas à la portée des premiers venus. De retour dans son château du Surrey, Eric papillonne toujours. Il flirte de nouveau avec Lennon, qui aimerait bien l’intégrer durablement à son Plastic Ono Band et réussit à arracher son consentement pour un festival à Toronto. Les choses en restent là avec le désormais ex-Beatle. Il intègre la caravane de Delaney & Bonnie, participant même à un album live (sur lequel il est quasiment inaudible). Delaney Bramlett incarne, tel Mayall auparavant, un père de substitution. Il l’aide à se décomplexer, à prendre confiance en sa voix et son écriture. Delaney se retrouve à la barre pour le sous-estimé “Eric Clapton” en 1970, qui dévoile une réjouissante approche country soul, avec cuivres et choristes. Des pointures comme Leon Russell, Stephen Stills, Bobby Keys, Jim Price ou Rita Coolidge sont de la fête ( on les retrouvera sur “All Things Must Pass” de George Harrison). Mais Clapton se brouille avec Bramlett, dont le caractère ombrageux et autoritaire lasse aussi le bassiste Carl Radle, le claviériste Bobby Whitlock ainsi que le batteur Jim Gordon. Clapton les récupère aussitôt, pour un nouvel attelage qu’il veut cette fois anonyme. La suite sera douloureuse, tumultueuse mais aussi brillante. Les drogues dures, en particulier l’héroïne, font leur macabre apparition dans l’histoire. Eric décide d’appeler l’affaire Derek And The Dominos et de partir écumer les petites salles, au grand dam de Robert Stigwood, son avide manager. Un contre-pied parfait à Blind Faith. En parallèle, il poursuit sa cour à Pattie Boyd, la compagne de George Harrison, dont il est tombé éperdument amoureux. Il traîne un spleen carabiné, qu’il exorcise dans la poudre et la lecture de “Layla Et Majnûn”, recueil de textes du poète perse Gangavi Nezâmi-e narrant une histoire d’amour impossible... Les studios Criteria de Miami et Tom Dowd sont réservés pour accoucher d’un nouvel effort, mais les premières séances sont infructueuses. En fait, l’ensemble décolle lorsque Duane Allman, de passage en ville avec ses frangins, est invité à se joindre aux sessions. La rencontre avec God fait des étincelles : l’admiration est mutuelle, l’entente immédiate, et les jams s’enchaînent, parfois pendant dix-huit heures d’affilée. Le disque devient double, et le résultat est d’une intensité redoutable. Des merveilles comme “Why Does Love Got To Be So Sad?” méritent d’être redécouvertes. Clapton est alors frappé par plusieurs événements funestes qui vont le faire plonger définitivement dans les abîmes narcotiques : la mort de Jimi Hendrix, puis celle de son père adoptif. Et, toujours, Pattie qui se refuse à lui, malgré cette gigantesque missive nommée “Layla And Other Assorted Love Songs”... qui sera un échec commercial retentissant, nullement aidé par une énigmatique pochette sur laquelle ne figure même pas le nom des musiciens. Une volonté très jusqu’au-boutiste d’Eric, et pas si surprenante au fond. Un quasi-suicide commercial. Les Dominos disparaissent sous des montagnes d’opiacés. Au bout du rouleau, Clapton se retire dans sa demeure de Hurtwood Edge pour se reposer. Il ne se doute pas que la parenthèse va durer trois longues années. Le documentaire “Life In 12 Bars” s’avère assez peu disert sur la suite. Il est vrai que l’épisode le plus créatif, le plus passionnant, s’achève ici. Eric plonge, durant trois ans donc, dans l’héroïne, et n’émerge du vaporeux nuage que grâce à l’aide de Pete Townshend, puis entame une cure de désintoxication. Remplaçant la poudre par la bibine, il passe près d’une décennie à écluser ses deux bouteilles de Courvoisier par jour, montant sur scène fin saoul pour de piteuses pantalonnades. Dans un court moment de lucidité, il usine le débonnaire “461 Ocean Boulevard” (1974) à Miami, qui le remet en selle grâce au succès de “I Shot The Sheriff”, reprise du récent morceau de Bob Marley And The Wailers. L’album développe un sillon laid back déjà entrevu en 1970 et que Clapton va paresseusement creuser pendant les années qui suivront. Il tente d’effacer le souvenir du technicien flamboyant et prolixe des années Cream pour privilégier l’épure, la slide, et un solide ancrage stylistique américain, sous haute influence JJ Cale, dont il avait déjà repris “After Midnight” dès 1970. Un bonheur n’arrivant jamais seul, il conquiert enfin Pattie Boyd qui emménage avec lui en 1975. Ses opus seventies sont dans l’ensemble assez mous, amalgames de reprises blues, ballades romantiques, et tentatives reggae ou country, mais bénéficient des bons soins du fidèle Tom Dowd puis de Glyn Johns, ce qui leur assure une production classieuse, intemporelle. On trouve ici et là de bons morceaux, comme par exemple la sautillante “Watch Out For Lucy”, et certains disques sont indéniablement plus denses (“Slowhand” en 1977, avec la célèbre reprise de “Cocaine”). Lui aussi aura son album perdu, “Turn Up Down” en 1980, rejeté par RSO car les lieutenants Gary Brooker et Albert Lee y tiennent trop souvent le micro. Dans un sens, il symbolise l’abandon total de l’ex-démiurge, en autopilotage complet. Slowhand passe le plus clair de son temps au pub ou au stade ( il supporte West Bromwich Albion). Ivre, il provoque un scandale en tenant quelques propos racistes sur scène lors d’un concert à Birmingham en 1976. Après qu’il eut une nouvelle fois frôlé la mort pour cause d’ulcères carabinés, les années 80 le voient devenir enfin sobre (à partir de “Money And Cigarettes” en 1983), mais l’inspiration ne jaillit pas pour autant. C’est l’époque du Clapton jet-setteur, costume Armani noir et top model au bras. Désormais lié avec Phil Collins, il tente vainement de coller au son du moment, avec synthétiseurs et percussions électroniques. Laid. Un drame d’envergure va malheureusement survenir : le décès accidentel de son fils Conor, âgé de seulement quatre ans, en 1991. Son profond chagrin lui inspire “Tears In Heaven”, ainsi qu’une prestation habitée lors de l’émission MTV Unplugged, qui lui assure une pluie de Grammy Awards. Après une performance proprement stellaire sur “Don’t Think Twice, It’s All Right” lors du trentième anniversaire de la carrière de Bob Dylan, Eric peut enfin s’atteler à un projet qui lui tient à coeur depuis toujours : un long-format totalement blues, le très brut et austère “From The Cradle”, qui demeure l’un de ses albums les plus réussis.
Intarissable source
Eric s’approvisionnera à nouveau à cette intarissable source avec “Me And Mr Johnson” ou encore “Riding With The King”, réalisé en duo avec BB King. Les années 2000 sont celles de l’apaisement et des virées entre copains, avec JJ Cale (“The Road To Escondido”) et même une brève réunion de Cream le temps de quelques dignes concerts, toujours au Royal Albert Hall. Devenu à nouveau père, il compose de moins en moins, mais livre toujours d’honnêtes copies, comme “Clapton” en 2010 ou “I Still Do” en 2016. Eric Clapton est, incontestablement, un survivant. Un homme qui a puisé dans ses tourments intérieurs pour devenir l’un des artistes les plus fondamentaux des swingantes sixties. Un vrai bluesman, reconnu par ses maîtres, Muddy Waters, Freddie King ou BB King. Nombre de ses proches, amis et collègues ont péri, solide malédiction, lui est toujours là, bien présent. Il s’agit d’en profiter.