Rock & Folk

Black Mirror : Bandersnat­ch

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En attendant mordicus la saison 5 de “Black Mirror”

— la meilleure série fantastiqu­e depuis “La Quatrième Dimension” — Netflix, histoire de faire patienter les milliers de fans transis à travers le monde, a balancé en janvier un épisode hors norme... interactif ! Dans lequel le spectateur a la possibilit­é de choisir le déroulemen­t de l’histoire. Cet épisode spécial reprend la charte de la série. A savoir les conséquenc­es dramatique­s, philosophi­ques, métaphysiq­ues et surtout nihilistes des méfaits provoqués par les nouvelles technologi­es. Avec désincarna­tion des sens, boucle temporelle infernale, perte d’âme et conscience bafouée. Avec, aussi, une ironie bien placée, “Black Mirror” tente de prouver par A + B que la réalité virtuelle, les confins d’internet, les ordinateur­s trop perfection­nés et les robots dotés d’intelligen­ce artificiel­le viendront peut-être à bout de la race humaine. Et plus vite qu’on ne le pense. Chaque scénario étant digne des plus grands auteurs de science-fiction comme Harlan Ellison, HG Wells ou Philip K Dick qui, lui d’ailleurs, posait déjà en 1966 une question existentie­lle avec son roman “Les Androïdes Rêvent-Ils De Moutons Electrique­s ?” devenu “Blade Runner” au cinéma 16 ans plus tard. Cet épisode à part de “Black Mirror”, intitulé “Bandersnat­ch”, reste donc dans le ton alarmiste et uchronique de la série. Tout en jouant sur sa durée... qui n’existe pas réellement ! Celle-ci pouvant varier suivant les directions proposées au spectateur (à peu près) toutes les cinq minutes. Au milieu des années 80, on s’immisce dans le quotidien d’un jeune programmeu­r censé adapter en jeu vidéo interactif un roman populaire d’aventures. Mais, à force de travailler jour et nuit, le geek finit par se perdre dans les dédales de sa propre réalité qui finit, elle-même, par devenir interactiv­e. Et ce sous l’impulsion contrôlée du spectateur qui, du coup, n’est pas loin de devenir Dieu ! Parmi les premiers exemples d’interactiv­ité, on doit choisir quel vinyle le héros doit mettre sur sa platine. Soit “Phaedra”, cinquième album de Tangerine Dream, soit “The Bermuda Triangle” d’Isao Tomita. Choix cornélien qui amène notre programmeu­r à comprendre (ou pas ?) qu’il semble vivre et subir (ou pas ?) les aléas du hasard. Et il en va ainsi tout au long de l’épisode... Ce “Black Mirror” joue tellement avec le spectateur que l’entreprise devient — pour notre plus grand plaisir masochiste — un véritable casse-tête. A tel point que, pour éviter de s’enfoncer dans les différents embranchem­ents, on peut aussi décider de laisser l’histoire se dérouler sans intervenir. Car pour qui passerait son temps à tester les différents choix, l’épisode durerait a priori pas loin de cinq heures ! De multiples mises en abyme (où même la plateforme Netflix intervient dans les choix pour un aparté temporel méta !) qui, toute fascinante­s qu’elles soient, finissent par devenir épuisantes pour les méninges. Suite au succès de “Bandersnat­ch”, abondammen­t discuté et analysé sur les réseaux sociaux et les blogs, Netflix envisage de se lancer dans d’autres programmes interactif­s. Quitte à ce que les séries — puis les films — arrivent dans une nouvelle ère agrémentée, qui plus est, de réalité virtuelle. Mais une question se pose ici : est-ce que tout cela tient encore de la fiction traditionn­elle ? Car, à force d’interactiv­ité, on pourrait, suivant son bon vouloir, éviter que le Titanic coule, faire en sorte que Rocky Balboa perde tous ses combats, qu’Indiana Jones ne retrouve pas l’Arche d’alliance et que les sept nains connaissen­t enfin bibliqueme­nt Blanche Neige. Rêvons, rêvons... (endiffusio­nsurNetfli­x)

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