Avide de riffs et d’effets
Déléguer la réalisation de son enregistrement à une personnalité confirmée ou confier les arrangements à un musicien de renom : telles sont les options choisies par la moitié des huit sélectionnés du mois
Sous le nom de Burkingyouth officie un artiste solo venu de Normandie qui se réclame de Radiohead ou Coldplay. Son deuxième EP (cinq titres) en deux ans retient surtout l’attention pour des possibilités qui ne sont pas encore totalement abouties mais que l’on sent prometteuses : la voix qui peut évoluer dans différents registres (y compris le falsetto), les instrumentations assez esthétisantes, et surtout le sens des ambiances qui donne une dimension nébuleuse à ses compositions pop-rock (“Fire”, burkingyouth.com).
Entourée de quatre musiciens, Emma Sand (de Paris) explore depuis 2011 les voies d’un folk rock élégant et en anglais. Le second EP six titres de cette chanteuse-guitariste continue de mêler ballades acoustiques et guitares saturées en empruntant autant à l’americana qu’à ses influences revendiquées (Neil Young, Patti Smith, PJ Harvey). Sa voix décidée et les arrangements de Yan Péchin (qui a oeuvré notamment avec Alain Bashung ou Brigitte Fontaine) contribuent à développer des ambiances ténébreuses et incantatoires qui s’imposent subrepticement
(“Door To Door”, Artsolidie, facebook.com/EmmaSand).
Avec ce deuxième EP en quatre ans, My Favorites Horses (quatuor de Montpellier) amorce un virage : sous l’influence de son travail avec Christophe Van Huffel (ancien guitariste de Tanger et producteur des derniers albums de Christophe), il a délaissé l’anglais en optant pour des textes en français et s’est éloigné de ses fondements folk au profit d’une pop teintée d’électronique. Mais il n’a rien perdu de l’élégance qui caractérisait son premier essai et parvient à conjuguer son efficacité mélodique à des atmosphères ouatées (“Funkhauser”, La Centrifugeuse, myfavoritehorses.com, distribution Kuroneko).
A l’écoute du premier album de Bazar Bellamy, la filiation avec Noir Désir saute aux oreilles : on y retrouve la même exigence textuelle, le même goût pour un rock incandescent et, parfois, des parentés vocales. Ce quintette de Montauban, réuni depuis un an autour de l’ancien leader de Lagony, revendique cet héritage tout comme celui de Diabologum ou Eiffel (dont l’un des musiciens a d’ailleurs réalisé l’enregistrement). Et il sait donner corps à cette passion à travers quelques morceaux percutants (“Jusqu’Ici Tout Va Bien”, M & O Music, bazar-bellamy.com, distribution DOM).
(parmi les trente-sept reçus à la rédaction) qui ne se sont pas contentés d’en faire une stratégie de communication mais bel et bien de les mettre au service de leur démarche créatrice.
Une fille au chant, un garçon à la guitare : Bandit Bandit est un nouveau duo, né l’an dernier entre Montpellier et Lyon et qui n’est pas sans rappeler The Kills de par son look et son esthétique musicale. Son premier EP, également évoqué en page 18, repose sur la complémentarité d’une voix tout en retenue suggestive et d’une guitare avide de riffs et d’effets : au fil de cinq morceaux anglophones ou francophones, il évolue entre rock psyché et envolées évanescentes, et peut évoquer par intermittences Black Rebel Motorcycle Club ou Grand Blanc. (“Maux”, Vinyl Factory 1964, facebook.com/banditbanditband).
Depuis 2001, Manu Castillo (de Paris) officie sous le pseudo de Tio Manuel. Après un précédent essai acoustique enregistré en duo, cet ancien guitariste punk-rock (Wunderbach, Joe Hell, La Souris Déglinguée) s’est entouré de plusieurs complices sur ce septième album. A travers neuf compositions originales (en anglais et en espagnol) et une reprise de “Love In Vain” des Ruts, il cultive avec brio sa fibre blues rock et se permet quelques incartades rockabilly portées par sa voix burinée et sa guitare inspirée (“The 7th Road”, La Fugitive Studio Garage, tiomanuel.com, distribution Kebra Rcd’s).
Né à Venise mais installé du côté de Lille, Antoine Pesle est un adepte de machines et d’électronique depuis 2005. Après un premier essai en 2013, son travail de réalisateur et d’arrangeur avec Juliette Armanet l’oriente dans une nouvelle direction dont témoigne ce premier album mélancolique : il évolue désormais dans une pop délicate et nostalgique qui s’apparente à cette french touch défendue par Air et Phoenix. Les onze morceaux originaux déploient en douceur un charme addictif au gré d’une voix et de mélodies en apesanteur (“HiFi Romance”, Bête Noire, facebook.com/Antoine.Pesle).
Le projet Lion Says a été lancé en 2016 par Lionel Giardina, un auteurcompositeur d’origine rennaise qui s’est, depuis, installé à Lyon. Après un premier disque (repéré dans ces colonnes) où il officiait en solitaire à la guitare et au chant, il a monté un groupe pour donner des concerts. C’est avec cette formule plus musclée qu’il a conçu ce nouvel album. Il n’a pas abandonné ses bases folk et cultive toujours la douceur, mais les instrumentations et les influences, plus variées, emmènent ce répertoire en anglais vers un folk rock serein (“Other Side Effects”, Monstre Sonore, facebook.com/lionsaysmusic, distribution Pias).