Rock & Folk

MICHAEL MONROE

Animé par une inextingui­ble flamme, l’homme d’Hanoi Rocks poursuit une carrière exemplaire. La légende finlandais­e était récemment de passage à Paris.

- VINCENT HANON

“IT’S A LONG WAY TO THE TOP (IF YOU WANNA ROCK’N’ROLL)”, dixit AC/DC. Comme Bon Scott, Michael Monroe sait qu’il n’est pas difficile de toucher le fond. Contre vents et marées, le Finlandais injustemen­t sous-estimé poursuit l’aventure avec un enthousias­me sans faille. Talentueux chanteur et multiinstr­umentiste passant de l’harmonica au saxophone avec le même bonheur, la bête de scène qu’il est chante les joies de l’autodestru­ction, qu’il a côtoyée de près, et la poésie de la rue. Michael Monroe ne bouge pas. Traits taillés à la serpe, sanglé dans un cuir rouge, foulards et bracelets cliquetant­s, il se refait l’oeil au khôl avant son concert à Paris, et part dans tous les sens dès qu’on évoque son nouveau “One Man Gang”, enregistré près de sa ville d’Helsinki.

Pères fondateurs

Le guitariste Steve Conte, ex-new-New York Dolls, vit à New York, le bassiste, Sami Yaffa, à Majorque. Le guitariste, Rich Jones, est à Toronto et le batteur, Karl Rockfist, à Stockholm : “Un vrai défi que de réunir tout le groupe ! Dix ans qu’on est ensemble. On a composé dix-huit chansons. Les meilleures sont sur l’album, dans la veine des Damned, de Mott The Hoople ou Clash, pour former un tout qui sonne fort”, explique Michael Monroe devant un café. Que les présentatr­ices météo portent des Perfectos et les gamins des T-shirts de groupes qu’ils n’ont jamais entendus n’est pas un problème pour lui. “Le heavy metal, le thrash, le punk ou le grunge : toutes ces étiquettes sont inutiles. Hanoi Rocks défiait les genres, et couvrait un large spectre qui allait du punk au calypso.” Formé en 1979, le groupe est né d’une histoire d’amitié entre de fortes individual­ités. “Je connais Andy McCoy depuis que j’ai quatorze ou quinze ans. Sami Yaffa, Nasty Suicide et moi sommes comme des frères de sang. La rue nous a forgés : on a traîné pendant six mois avec les SDF de Stockholm : un réfugié d’Afghanista­n, un autre de Malte et Ali Baba, originaire d’Afrique, qui m’appelait Rod Stewart.” Hanoi Rocks renaît en 2000, uniquement avec le compositeu­r et guitariste gitan Andy McCoy et le chanteur. “Ma femme est morte en 2001. J’essayais de rester occupé. Andy était plus ouvert, il respectait mon écriture. On a fait trois bons disques.” Nasty Suicide, l’autre guitariste ? Il est devenu pharmacien. “Il y a le rock’n’roll, les excès et la direction opposée, celle qu’il a prise : je respecte ça.” Le relatif manque de succès du groupe, qui a joué dans les endroits les plus exotiques (“Bangkok, Israël, l’Inde”) s’explique aussi par la disparitio­n de Razzle à l’aube d’une tournée américaine. Décembre 1984 : tous les membres du groupe, à l’exception de Michael Monroe, font la bringue chez le chanteur de Mötley Crüe quand l’alcool vient à manquer. Rond comme une queue de pelle, Vince Neil part chercher des bières, embarque le batteur d’Hanoi Rocks dans sa voiture de sport et percute de plein fouet un autre véhicule.

Razzle meurt sur le coup, mettant ainsi un terme définitif au groupe. Aujourd’hui, les cinq Finlandais sont considérés comme des pères fondateurs : Hanoi Rocks a inspiré Guns N’Roses et tout le metal chevelu de Los Angeles. Michael Monroe a surtout un groupe dans le pif : “Poison, du rock’n’roll bidon. Ils pensaient que c’était juste une histoire de coupes de cheveux, de gonzesses et de soirées ; ils sont passés à côté de tout ce que nous représenti­ons. Tout le contraire de Guns N’Roses.” Chantée en duo avec Axl Rose à l’époque d’Hanoi Rocks, “Dead, Jail Or Rock’n’ Roll” est l’une des meilleures de Michael Monroe.

Hors de contrôle

Pote de Stiv Bators, Monroe s’est joliment approprié son “Million Miles Away” et a enregistré d’autres chansons avec lui. “Je m’occupais de ses chats pendant qu’il tournait aux States. De fan, je suis devenu son ami : nous habitions ensemble à Londres. En 1985, Johnny Thunders et sa femme sont venus emménager avec nous.” L’homme venu du froid participe alors aux sessions hors de contrôle de “Que Sera Sera” : “Tout un tas de voleurs, de junkies et d’idiots fumaient, gueulaient ou donnaient leur opinion. J’ai fini par les foutre dehors. Johnny savait ce qu’il voulait. C’était quelqu’un de vulnérable, sensible. Il m’a rappelé des choses importante­s dans le rock, comme de ne pas trahir ses principes.” Michael Monroe s’est lancé dans d’autres aventures en groupe : Jerusalem Slim avec Steve Stevens en 1992, Demolition 23 deux ans plus tard, avant de reprendre son parcours en solo. “One Man Gang” en est la neuvième étape. Un pionnier, un innovateur, pas un suiveur. Le genre en voie de disparitio­n.

Album “One Man Gang” (Silver Lining Music)

Newspapers in French

Newspapers from France