Grâce aux filles et à la musique
Enfin une BD sur les Beatles qui règle son compte à une légende urbaine apparue à la sortie d’ “Abbey Road”. Réalisé par le scénariste Paolo Baron et le dessinateur Ernesto Carbonetti, “Paul Est Mort — Quand Les Beatles Ont Perdu McCartney” (Fêlés) propose une explication plausible qui risque de déplaire aux tenants de la théorie du complot. La légende est tellement tenace qu’elle est devenue un sigle, PID, pour Paul Is Dead. Quand la rumeur est lancée en 1969, elle trouve son origine dans un accident de voiture supposément survenu en 1966 dans lequel le bassiste aurait trouvé la mort avant d’être remplacé par un sosie. Les auteurs font donc démarrer leur histoire en 1966.
Les Beatles sont en studio, et il semblerait que quelque chose de grave est arrivé.
John flippe, renâcle à discuter de cette mystérieuse situation avec Ringo et George et cherche surtout à comprendre ce qui s’est réellement passé...
La maison rouennaise Petit A Petit a réuni un commando de seize dessinatrices et dessinateurs pour réaliser “Nirvana En BD” sur un scénario de Gaëts et des textes biographiques rédigés par Sophie Blitman. L’histoire commence à Aberdeen, ville de naissance de Kurt Cobain, et évoque ensuite des éléments importants de la vie du chanteur : son ami imaginaire, ses antipathies professionnelles, sa relation compliquée avec la mère de Frances Bean ou sa passion pour les armes à feu. Faire intervenir un nombre élevé de graphistes peut s’avérer nuisible à la lecture quand le visage du personnage principal n’arrête pas de changer de style. Mais dans ce biopic, le problème ne se pose pas, les intervenants se sont appliqués à faire correspondre leur trait au sujet. De plus, les interludes techniques et contextuels proposés par Sophie Blitman à la fin de chaque épisode offrent des pauses plutôt bien vues.
Avec “Juice, Vol 3”, l’éditeur indépendant Çà Et Là finalise la trilogie que le dessinateur thaïlandais Art Jeeno a consacré à la jeunesse de son pays. Dans cette histoire, Mon et Tim, deux adolescents mal dans leur peau, cherchent le moyen de se sentir mieux grâce aux filles et à la musique. Malheureusement, le choix des Ramones comme vecteur d’intégration au sein d’un système éducatif plutôt rigide ne s’avère pas idéal. Dans cette histoire qu’il faut lire sur toute sa longueur, Art Jeeno s’est attaché à reconstituer cette impression liée aux souvenirs de l’adolescence où le temps s’étire à l’envi ; au point que chaque action décrite semble baigner dans un ennui sans nom. Pourtant, cette plongée dans l’ordinaire scolaire des ados thaïlandais est totalement prenante. Elle montre même la puissance d’une chanson comme “What A Wonderful World” (version Joey Ramone, bien sûr) pour mettre un peu de couleurs dans un monde trop terne.
Dans “Hip Hop Family Tree 4 — 1984-1985” (Papa Guédé),
Ed Piskor s’attaque à disséquer par le menu les évènements importants, connus ou confidentiels, qui ont émaillé un mouvement culturel sorti des rues du ghetto avant de conquérir le monde. Après trois premiers volumes qui recensaient l’histoire du rap et du hip-hop de 1970 à 1983, l’auteur, encyclopédie vivante sur le sujet, continue son long travail d’investigation en démêlant légendes et réalités d’une scène où les nouveaux talents apparaissent et disparaissent à une vitesse impressionnante. Le volume démarre avec Egyptian Lover, un DJ de Philadelphie qui s’apprête à sortir son premier album. En quelques pages, Piskor retrace le parcours de l’artiste en rappelant la difficulté de se faire un nom quand on est inconnu et sans moyen. Pour son dessin riche en détails, qui fait écho à des cases de texte bourrées d’informations, le lecteur se doit de lire cette BD mémorielle avec attention.