Mark de fabrique
Depuis le temps du grunge, l’homme de l’Etat de Washington a toujours su s’entourer. Discographie sélective.
“Long Gone Day” avec Mad Season (“Above”, 1995)
Supergroupe grunge réunissant rien de moins que Layne Staley (Alice In Chains), Mick McCready (Pearl Jam) et Barrett Martin (Screaming Trees), Mad Season n’usina, hélas, qu’un unique long-format, où l’on trouve “Long Gone Day”, sur laquelle Mark, en voisin serviable, intervient. Une mystérieuse mélopée rythmée par un violoncelle et d’étonnants marimbas, rencontre au sommet qui évoque les Stooges de “Gimme Danger”. “High Amsterdam” Noon avec Masters Of Reality (“Deep In The Hole”, 2001) Héros injustement oublié du mouvement stoner, Chris Goss fut pourtant une figure tutélaire pour les futurs Queens Of The Stone Age. Sur ce légendaire album, il est justement accompagné par Josh Homme et Nick Oliveri, Mark Lanegan participant à “High Noon Amsterdam”, pépite hard rock magnifiée par un timbre plus que jamais proche de Jim Morrison.
“A Song For The Dead” avec Queens Of The Stone Age (“Songs For The Deaf”, 2002)
Il n’est plus nécessaire de présenter “Songs For The Deaf”, perfection granitique de fusion stoner et pop. La partie de batterie introductive, hommage au “Slip It In” de Black Flag, est transfigurée par la puissance de Dave Grohl, et installe à elle seule une ambiance menaçante, tendue, avant que les guitares ne s’emballent, et que Mark Lanegan ne grogne. Les moteurs vrombissent, on pourrait presque s’imaginer fendre le désert à bord d’une Ford Falcon cabossée... “Four Corners” avec Mondo Generator (“A Drug Problem That Never Existed”, 2003) Des arpèges acoustiques lugubres, une basse bourdonnante, un phrasé traînant, cafardeux, il est certain que cette complainte ne cadre pas vraiment avec le style habituel du gang de Nick Oliveri, plutôt hardcore et braillard. “Où ai-je putain d’été ?”, murmure Lanegan avant la vaporisation collective.
“Hit The City” avec PJ Harvey (“Bubblegum”, 2004)
Le très recommandable “Bubblegum” demeure bien représenté, quinze ans plus tard, dans les setlists de maître Lanegan. Sur “Hit The City”, emmenée par un riff baraqué, sa voix se mêle à celle, logiquement plus flutée, de la prêtresse PJ Harvey, avant qu’un solo félin ne vienne parachever l’ouvrage. “Revival” avec Soulsavers (“It’s Not How Far You Fall, It’s The Way You Land”, 2007) Mark Lanegan a fomenté, sous l’alias Soulsavers, pas moins de deux efforts avec un duo de producteurs électroniques anglais composé de Rich Machin et Ian Glover. Des escapades qui voient l’aventureux crooner explorer de nouveaux territoires, à l’instar de “Revival”, très beau gospel aux visées cathartiques.
“Come On Over (Turn Me On)” avec Isobel Campbell (“Sunday At Devil Dirt”, 2008)
Mark Lanegan et Isobel Campbell ont marié leurs talents en 2006, renversant la traditionnelle relation entre un artiste et sa muse, puisqu’ici, c’est l’ex-Belle And Sebastian qui compose et produit. “Come On Over”, superbe ballade nantie d’arrangements soyeux (cordes, cuivres), célèbre le mariage parfait entre deux voix que tout oppose, râpeuse pour l’une, angélique pour l’autre.
“Idle Hands” avec The Gutter Twins (“Saturnalia”, 2008)
Ami de longue date, l’ex-Afghan Whigs Greg Dulli a enrôlé Mark au sein des Twilight Singers, puis a fondé avec lui The Gutter Twins, dont le “Saturnalia” connut un certain succès à l’époque. “Idle Hands”, avec riff hard rock rappelant Steppenwolf et ambiance gothique, en demeure l’un des fougueux joyaux. “The Last Time” avec The Breeders (EP “Fate To Fatal”, 2009) Après le quatrième album des Breeders, “Mountain Battles”, Kim Deal avait encore du matériel en réserve, comme cette chanson prévue dès l’origine pour un membre du sexe opposé. Un titre sombre, dont les textes désespérés (“Je ne verrai plus jamais le soleil”) sont paisiblement narrés par Lanegan sur un tapis de guitares à la fois lumineuses, saturées et hallucinées. Un assemblage qui n’est pas sans rappeler “Femme Fatale” du Velvet Underground.
“Wild Love” avec James Williamson et Alison Mosshart (“Re-Licked”, 2014)
En 2014, James Williamson publiait son unique opus solo, piochant parmi un répertoire de raretés des Stooges et s’entourant d’une foule d’invités choisis avec un certain goût (Lisa Kekaula, Bobby Gillespie, Mario Cuomo, les Richmond Sluts...). Sur ce “Wild Love” au riff irrésistible, Mark explore un registre aigu, s’amalgamant à merveille avec le feulement caractéristique d’Alison Mosshart.
“My Shadow Life” avec Duke Garwood (“With Animals”, 2018)
Dernièrement, Mark a monté ce duo avec son alter ego britannique, Duke Garwood. Le résultat ? Un folk nocturne mâtiné d’ambient. “My Shadow Life” en est un brillant exemple, sur des arpèges teintés de désespoir que Kurt Cobain n’aurait pas reniés.
Fendre le désert à bord d’une Ford Falcon cabossée...