Grateful Dead
“Ready Or Not”
RHINO/ WARNER
Aussi à l’aise en studio qu’un banc de dauphins échoués sur une plage de sable fin, Jerry Garcia et sa troupe décidèrent, à la fin des années 80, de se concentrer exclusivement sur la scène — les stades, en l’occurrence. Les chansons, pourtant, continuèrent d’affluer. D’évoluer au fil des concerts. “Ready Or Not” est une tentative de combler le vide discographique du Dead post-1989, année de la sortie de “Built To Last”, ultime album studio, via les versions live de neuf de ces compositions tardives. Réjouissante idée. Les deux signées par le claviériste Vince Welnick ne sont pas les plus mémorables, le timbre fade du bonhomme et son appétence pour les parties de cuivres jouées au synthé n’aidant pas à le rendre sympathique. Mais le reste méritait amplement cette exhumation. “Lazy River Road” est une merveille de country blues qui n’aurait pas déparé “American Beauty” (1970). “Corrina” et “Easy Answers”, échafaudés par le guitariste Bob Weir, déploient des grooves moelleux et dynamiques, le premier, étiré dans une jam dansante, dépassant les 15 minutes. “Eternity” bénéficie d’un texte du légendaire bluesman Willie Dixon et “Liberty” interroge les idéaux anarchistes du parolier Robert Hunter, disparu en septembre dernier. Les deux ballades, coécrites par ce dernier et Garcia, constituent les deux sommets. “So Many Roads”, dont la ferveur crépusculaire en fait un cousin de “Knockin’ On Heaven’s Door”, et “Days Between”, sombre rumination sur les choix d’une vie qui a filé plus vite que prévu, comme seul pouvait l’habiter un homme sentant la longue nuit approcher. Celleci recouvrit en effet Jerry Garcia le 9 août 1995, huit mois après cette grandiose version captée à Oakland. ✪✪✪