Rock & Folk

ROCK ’N’ROLL FLASH BACK

Ça ne s’invente pas

- PAR CHRISTIAN CASONI

FÉVRIER 1990 R&F 271

“Les années 90 commencent sous de curieux auspices : on encense les voleurs”, allusion détournée à Lenny Kravitz. Il se sert chez les autres comme tout le monde, chez Lennon et Prince spécialeme­nt. Comme ses deux modèles, “il écrit des paroles de merde”. D’un autre côté, c’est ce qui rend Lenny exemplaire. “De la copie au carré équivaut-elle à de l’originalit­écube ?” Le journalist­e serait tenté de répondre oui. Les Fine Young Cannibals sont “numberouan­e in the States”, un sacre qui laisse Andy Cox songeur : “L’essentiel des disques classés numéro 1 aux Etats-Unis sont de la merde. Peut-être avons-nous aussi enregistré une horreur.” Mad Mix est une nouvelle tentative de glamourise­r R&F, la bible du rock, en entrelarda­nt boucherie et haute-couture. François Hadji-Lazaro pose avec un mannequin, accoutré en guerrier highlander de la fashion week.

FÉVRIER 1970 R&F 037

Une expression revient en boucle : “light show”,

suivie du mot “mandala”, termes figurant, selon, avec et sans majuscules. Veut-on évoquer l’art cinétique ? S’agit-il d’un groupe et de son leader ? Après des performanc­es comme les 26 heures de concert ininterrom­pu au Grand Palais, ou l’aventure des “Jerks Electroniq­ues”, Pierre Henry continue de marier musique contempora­ine, pop et liturgie à l’Olympia, accompagné par Spooky Tooth, dans un spectacle qui se décline en plusieurs tableaux, de “Pleureuses Surréalist­es” à “Friselis De Tige”. Grandiloqu­ence toujours : “Tommy” au Théâtre des Champs-Elysées. Il ne s’agissait pas de casser bêtement une guitare, mais d’expériment­er “les travaux de Gustav Metzger sur l’autodestru­ction de l’art”. Townshend : “On détruisait TOUT, la guitare, la musique du groupe, la participat­ion mentale du public.”

FÉVRIER 2000 R&F 390

Avec l’album “Machina”, les Smashing Pumpkins courent après leur niaque perdue. Billy Corgan ne répond plus que par énigmes et paradoxes (“Je me défonce à Dieu, ça me donne une sacrée trique”). En ouverture de l’article : une photo vert émeraude et noir miroir, qui invite à déposer ses empreintes sur la page, un véritable outil de police judiciaire. Après Billy, Bobby, Gillespie, le Saint-Just de Primal Scream. “On va rentrer dans la gueule des gens pour qu’ils comprennen­t ce qu’on pense”, Serbie, Occident, jeunes, McDo... Le journalist­e, abasourdi : “Impossible de l’arrêter. L’enfoiré ne veut pas discuter musique.” Plus fort que les Mayas : Alan Vega. Le “prophète électro” annonce la fin du monde pour 2007. Six portraits, six fois la même bouille renfrognée, verres fumés, béret champignon.

FÉVRIER 1980 R&F 157

Quand le “gitan de Nashville” acquiesce, il dit “yi-eah”. Quand il objecte, il dit “naw”. JJ Cale habite une caravane à l’entrée de la ville. “A l’intérieur, tout est à portée de main. Même pas besoin de sortir de son lit.” Mais, là-bas, John n’est plus personne. “Retour de la bonne humeur” dans les clubs malgré les tondus. Voilà le ska, retoqué pour les parquets cirés par 2 Tone, label qui fait un hit par single. Madness se garde de tout folklore prolo, mais son public est farci de skinheads, et on dit que le groupe aurait un penchant pour le National Front. Si on condense l’interview de Ritchie Blackmore (Rainbow), celui qui prétendait marier le rock à la musique de la Renaissanc­e, on obtient la phrase suivante : “Je suis quelqu’un de sensible, je joue très bien de la guitare, je suis quelqu’un d’intense, je ne suis pas un type sympa.”

FÉVRIER 2010 R&F 510

Comment réussir quand on n’a pas un sou, pas le droit d’utiliser son nom, pas de chansons, un bassiste qui ne sait pas jouer, et qu’on est quatre “caractérie­ls” sans manager au fond “d’un studio spécialisé dans les démos pourries” ? Réponse : PiL. On racontait alors que la Muraille allait s’ouvrir. “Les groupes de

rock chinois ont désormais une identité, on est loin de l’époque où il n’y avait que des sous-Nirvana et des sous-Joy Division.” Contre la variété locale, mandopop et K-pop : l’undergroun­d pékinois, New Pants, Hedgehog, Brain Failure, le label Modern Sky (punk et electronic­a), le site Baidu qui incite au piratage, et les da kou, ces invendus occidentau­x qui poursuiven­t une carrière clandestin­e au pays des nuits câlines. Jacques Dutronc reprend la scène avec une prothèse de hanche : “Tous les vrais ont une prothèse”, Iggy, Johnny...

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France