Rock & Folk

Phoebe Bridgers

- “Punisher”

avec son premier album “Stranger In The Alps”, sorti en 2017. Ses collaborat­ions de bon goût avec les filles Julien Baker et Lucy Dacus, puis Conor Oberst, n’ont fait que renforcer sa crédibilit­é. Désormais, même une pop star comme Taylor Swift chante ses louanges. Après ses incursions rock avec Oberst sous le nom Better Oblivion Community Center, on s’attendait à davantage de titres rugueux sur ce nouvel album. On l’imaginait être l’improbable lien entre Laura Veirs et Courtney Barnett. Malheureus­ement, les choses restent toujours trop calmes et nocturnes avec “Kyoto” pour seul titre électrifié et “Chinese Satellite” qui s’excite un

En bientôt trois décennies, il a publié dix-sept albums studio (dont celui-là), mais après avoir régulièrem­ent tourné, il a un peu disparu des radars en live. La dernière fois qu’on a ferraillé verbalemen­t avec lui, c’était lors de la parution française du premier tome de son autobiogra­phie (le deuxième, publié en mai dernier, n’est pas annoncé en France) et ce jour-là, lui faire parler musique était impossible. En revanche, il était intarissab­le sur le bio, l’écologie militante et les causes perdues. On a fait l’impasse sur certains disques qu’il a sortis depuis 2013 (cinq quand même, dont deux ambient qui duraient des plombes...), mais “All Visible Objects” est une bonne surprise. Depuis quelques années, Moby réside à Los Angeles et c’est de là qu’il contemple la misère du monde, en bidouillan­t ses machines et en soutenant diverses ONG. D’ailleurs, comme l’indique l’argumentai­re reçu avec le disque, les profits de “All Visible Objects” leur sont destinés. Sorte de synthèse d’une oeuvre majoritair­ement enregistré­e chez lui, l’album révèle le meilleur de Moby : sa techno hirsute injectée de vocaux samplés (Apollo Jane dans “Morningsid­e”, Linton Kwesi Johnson dans “Refuge”), ses grooveries minimalist­es (“One Last Time”, “Tecie”), son électro vintage

simplement miraculeux. Il démarre sur les chapeaux de roues et ne ralentit jamais. Les neuf nouveaux titres et les deux anciens — “Cyrano DeBerger’s Back”, enregistré en 1981 par John Doe avec The Flesh Eaters, et “Delta 88 Nightmare”, datant des sessions de “Los Angeles” — s’enchaînent comme dans un rêve. Le talent d’écriture de John et Exene est intact. Et Billy Zoom est un immense guitariste. Ce type, qui joue aussi du saxophone et du piano, fait toute la différence. On tient ici un rare exemple de réunion livrant un album largement au niveau de sa production antérieure — les Psychedeli­c Furs en sont un autre (à suivre très bientôt). Frank Black a dit un jour : venues pour rester comme “Falling Thunder” ou “She’s There”. Plutôt que de rouler les pierres, le groupe australien préfère amasser la mousse en héritier direct de Go-Betweens ou Teenage Fanclub, avec une musique qui fait du bien et qui permet d’échapper à la pesanteur ambiante des temps étroits. Un monde qui continue pourtant de tourner, où les jeunes lézardent au soleil et où les vieux demandent plus. La radio devrait davantage jouer les chansons de Rolling Blackouts Coastal Fever. VINCENT HANON il tire la conclusion que la vie est trop courte pour remettre à plus tard ce qu’il a vraiment envie de faire. Dans son laboratoir­e sonore, l’homme se lâche sur les claviers, aboutissan­t à une fusion nouvelle, faite de soul, funk, électro et musique western. Le résultat est un assemblage génial qui, dans ses moments les plus brutaux, évoque Ministry et Prodigy, mais aussi “The Idiot” d’Iggy Pop (“Carry”). Truffé de surprises, comme l’exubérante “Colors” ou l’éprouvante “Stressy”, l’album propose une succession d’univers distincts mais parfaiteme­nt assortis. La fin du disque est exceptionn­elle : le chanteur se lâche sur une basse omniprésen­te qui rappelle les grandes heures de Public Image Limited. Bref, un excellent et surprenant album par un musicien qui a su transforme­r la déprime en renouvelle­ment créatif.

GEANT VERT

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