Rock & Folk

SUZANNE VEGA

La New-Yorkaise sort un album live et évoque sa passion pour Lou Reed et son amitié avec Lenny Kaye. L’Américaine serait-elle plus rock que folk ?

- Stan Cuesta

LA DIVINE SUZANNE VEGA EST DE RETOUR avec un très bel album live consacré — et enregistré — à New York, la ville qui l’inspire et où elle vit depuis toujours. L’occasion de revenir avec elle sur une carrière commencée il y a trente-cinq ans.

Chanteur folk en colère

ROCK&FOLK : A vos débuts, on vous a souvent comparée aux chanteuses folk des années 1960... Ça vous contrariai­t ? Suzanne Vega : Non, j’étais différente de ces chanteuses et chanteurs du passé, et les gens comprenaie­nt que je combinais la musique folk avec une sorte de new wave. Mais je les adorais, et je les adore encore davantage aujourd’hui. Mes trois songwriter­s préférés sont Bob Dylan, Leonard Cohen et Lou Reed.

R&F : Lou Reed, c’est une surprise. Sur ce nouvel album, vous interpréte­z “Walk On The Wild Side”... Suzanne Vega : Je l’ai vu sur scène en 1979, très agressif, très rock’n’roll, très hostile. Il jetait des cigarettes allumées sur le public, faisait semblant de s’injecter de l’héroïne... Au début, je n’ai pas aimé. Je me suis dit : “Ce n’est pas de la musique, c’est du théâtre.” Mais la deuxième partie du show a été super et j’ai commencé à apprécier sa musique, ses mots, la simplicité avec laquelle il écrivait. Et quand j’ai acheté l’album “Berlin”, avec toutes ces chansons où il jouait de la guitare acoustique, j’ai pensé que, de façon étrange, c’était une sorte de chanteur folk en colère. En particulie­r “Caroline Says II”, une chanson terrible au sujet d’une femme qui a une relation violente, écrite très simplement, sur une mélodie magnifique. J’ai été impression­née, ça a complèteme­nt changé ma façon de penser. J’ai compris qu’on pouvait tout faire avec une guitare acoustique.

R&F : “Ludlow Street” est un hommage à votre frère, mais c’est aussi la rue où vivaient Lou Reed et John Cale avant le Velvet Undergroun­d : ils y ont enregistré leurs premières démos qu’on retrouve dans le coffret, à la guitare sèche, presque folk, comme vous dites... Suzanne Vega : Je ne savais pas. C’est génial, ça me donne envie de trouver ce coffret... Je dois rattraper mon retard sur l’histoire du Velvet Undergroun­d !

R&F : Sur le live, vous rejouez plusieurs de vos premières chansons, ça ne vous ennuie pas ?

Suzanne Vega : Non, j’aime toujours le premier album et je peux interpréte­r toutes ces chansons à la guitare acoustique, le seul instrument dont je joue. J’ai eu des moments plus expériment­aux où j’ai écrit des choses que je ne peux pas jouer seule. Pour une chanson rock comme “Blood Makes Noise”, je dois compter sur Gerry Leonard...

R&F : Qui a été très important dans votre carrière...

Suzanne Vega : Oui, on travaille ensemble depuis 2000. Pendant un moment, j’ai dû le partager avec David Bowie ! C’était bizarre, mais c’était passionnan­t. Je suis allée les voir plusieurs fois en tournée et j’ai beaucoup appris sur l’art de la mise en scène. C’est super de travailler avec Gerry. Il s’occupe de la musique, des musiciens, me pousse quand il faut, me calme quand j’en ai besoin... C’est un bon ami, en plus d’être un bon directeur musical.

L’élément perturbate­ur

R&F : Et Lenny Kaye, qui a coproduit vos deux premiers albums ?

Suzanne Vega : Je l’ai aimé tout de suite. Et je l’aime toujours. C’est un peu mon ange gardien. Je le vois toujours à New York. Il est fantastiqu­e, j’ai beaucoup d’affection pour lui.

R&F : Quel a été son apport ? Suzanne Vega : L’inattendu. Il a fait venir des musiciens intéressan­ts, très différents de ceux qu’avait choisis Steve Addabbo, le coproducte­ur, qui était plus technique, qui s’assurait que tout était propre. Lenny était plus intéressé par l’âme des disques. Il était un peu l’élément perturbate­ur. Les deux faisaient la paire.

R&F : Vos projets ?

Suzanne Vega : J’espère sortir un nouvel album dans deux ans. Je ne sais pas à quoi il ressembler­a... Mais je vais vous confier un secret : j’ai participé l’été dernier à un hommage à Lou Reed au cours duquel je me suis retrouvée sur scène avec Lenny Kaye, Gerry Leonard, Tony Shanahan — le bassiste de Patti Smith — et Dennis Diken, le batteur des Smithereen­s. C’était incroyable, on a fait quatre chansons de Lou et ça sonnait tellement bien, que Gerry et moi aimerions enregistre­r un album de chansons plus rock’n’roll avec ce groupe.

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