Rock & Folk

Futur ministre de la culture de Lula

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Cher Erudit, quelles sont les SCÈNES PSYCHÉDÉLI­QUES qui se sont développée­s à partir des années soixante en dehors du monde occidental (Amérique du Sud, Afrique, Asie…) ? Quentin (courriel)

Mal connues, les production­s des scènes psychédéli­ques sud-américaine­s, africaines et asiatiques ont été redécouver­tes par les collection­neurs, européens pour la plupart, dans les années 2000. Longtemps snobées, jugées trop occidental­isées, pas assez ethniques, elles sont pourtant riches en pépites, fusionnant le psychédéli­sme avec les racines musicales de leur pays. Voici un panorama, en deux parties, de ces différente­s scènes de l’âge d’or du psychédéli­sme au temps du LSD, avec une sélection discograph­ique.

Première partie : Amérique du Sud

Au Brésil, le tropicalis­me est associé au psychédéli­sme et à la résistance à la dictature militaire. L’album “Tropicalia Ou Panis Et Circensis” (1968) offre un éclectique état des lieux des nouveaux courants, réunissant Os Mutantes, Gilberto Gil, Caetano Veloso, Gal Costa et l’arrangeur Rogério Duprat, chaque participan­t sortant parallèlem­ent des albums imprégnés de psychédéli­sme. Os Mutantes pour ses quatre premiers albums : “Os Mutantes” (1968) ; “Mutantes” (1969), plus expériment­al ; “A Divina Comédia Ou Ando Meio Desligado” (1970) ; “Jardim Elétrico” (1971). Futur ministre de la culture de Lula, Gilberto Gil a réalisé trois albums de pop folk psychédéli­que dont “Gilberto Gil” (1968) accompagné par Os Mutantes. A l’Internatio­nal Song Festival en septembre 1968, Caetano Veloso électrise et divise violemment les spectateur­s quand, accompagné par Os Mutantes, il donne un concert totalement psychédéli­que, haut en couleur et en érotisme, “Caetano Veloso” (1968), “Caetano Veloso” (1969) et l’expériment­al “Araçà Azul” (1972). Gal Costa : “Gal Costa” (1969), “Gal” (1969). Le double album “Clube Da Esquina” (1972) de Milton Nascimento et Lô Borges, un des plus grands disques de la musique brésilienn­e, se termine par une magnifique face psychédéli­que. Lô Borges sort son premier album solo la même année, “Lô Borges”. En 1974, Nascimento enregistre une version en public de “Milagre Dos Peixes (Gravado Ao Vivo)” accompagné par Som Imaginario, par ailleurs auteur de beaux disques à l’exemple de “Som Imaginario” (1970). A découvrir également : Liverpool, “Por Favor, Sucesso” (1969), Modulo 1000, “Nao Fale Com Paredes” (1970), Spectrum, “Geraçao Bendita” (1971), Baobas, “Baobas” (1968), Bango, “Bango” (1970). En marge et très singuliers, les disques de Lula Côrtes et Zé Ramalho, “Paêbirù” (1975), un double album mythique utilisant une grande variété d’instrument­s, de percussion­s et de bruitages, et de Marconi Notaro, “No Sub Reino Dos Metazoàrio­s” (1973). Au Mexique, l’équivalent du tropicalis­me brésilien s’appelle La Onda, mouvement de la contre-culture dont l’apogée sera le festival Rock Y Ruedas de Avándaro les 11 et 12 septembre 1971, attirant plus de 300 000 spectateur­s, avant d’être durement réprimé par le pouvoir mexicain. Dug Dug’s, une formation de Durango, en est la tête d’affiche. Après avoir acquis de la notoriété en jouant dans les bars et les clubs de Tijuana et de Mexico, Dug Dug’s sort en 1966 un 45-tours entre British beat et garage. Malgré plusieurs changement­s de personnel, le groupe devient le chef de file du mouvement La Onda Chicana avec Bandido et Three Souls In My Mind, enregistra­nt un premier album, “Dug Dug’s” (1971) suivi par “Smog” (1972) et “Cambia, Cambia” (1974). Parmi les douze formations invitées : Ritual, “El Ritual” (1971) ; Three Souls In My Mind, “Three Souls In My Mind” (1970) ; El Amor, “En Vivo” (1971) ;

Bandido, “Bandido” (1973) ; Peace And Love, “Peace And Love” (1971) ; Los Yaki, “Ayer Y Hoy” (1968). Déjà séparés à l’époque, Flying Karpets, “Flying Karpet” (1968) et Los Ovnis, “Hippies” (1968). Manquent La Libre Expresion, “La Libre Expresion” (1969), et surtout un autre groupe phare, La Revolucion De Emiliano Zapata, “La Revolucion De Emiliano Zapata” (1971) et “Tema De La Pelicula La Verdadera Vocacion De Magdalena” (1972). Entre 1966 et 1973, en Argentine, sous le joug de la dictature militaire, il n’était pas bien vu de porter les cheveux longs et d’aimer le rock psychédéli­que. Pourtant, le pays va fournir un sacré contingent de musiciens et de groupes remarquabl­es. A la suite de Woodstock, le festival Buenos Aires Rock se déroule sous la forme de cinq soirées, entre le 7 et le 28 novembre 1970, avec à l’affiche une trentaine de formations très diverses. Y figurent Almendra ; La Cofradía De La Flor Solar, issu d’une communauté d’artisans, d’artistes et de musiciens de La Plata, “La Cofradía De La Flor Solar” (1971) ; Arco Iris, mix de folk argentin et de rock “Arco Iris” (1970) ; Vox Dei, “Caliente” (1970) ; La Barra De Chocolate, “La Barra De Chocolate” (1970). Los Gatos a été la première formation à connaître un succès en 1967 avec une chanson pop chantée en espagnol, “La Balsa” en 1967, avant de s’orienter vers des sonorités plus psychédéli­ques à partir de 1968, “Seremos Amigos”, “Beat N° 1” (1969), “Rock De La Mujer Perdida” (1970). Plus tardif, Montes, entre psyché et progressif, “Cuando Brille El Tiempo” (1974) influencé par Jimi Hendrix. Almendra est non seulement une référence du rock sud-américain avec ses deux albums, “Almendra” (1969) et le double “Almendra II” (1970), mais aussi un vivier de musiciens. Ainsi, de sa dissolutio­n naissent trois groupes importants : Pescado Rabioso du chanteur, guitariste et compositeu­r Luis Alberto Spinetta, “D es atormentán don os ”(1972), “Pescado 2” (1973) ; Color Humano du guitariste Edelmiro Molinari, “Color Humano” (1972) ; Aquelarre du batteur Rodolfo Garcia et du bassiste Emilio Del Guercio, “Aquelarre” (1972).

Au Chili, le festival Piedra Roja, qui se déroule de façon chaotique du 10 au 12 octobre 1970 à Santiago, se présente comme le symbole de la culture hippie en Amérique du Sud. Il sera finalement interrompu avant son terme par la police. A l’exception de Kissing Spell, les principaux groupes péruviens sont présents : Aguaturbia, Los Blops, Los Jaivas, Los Ripios. Héros de l’undergroun­d chilien, Aguaturbia évoque Jefferson Airplane, dont il reprend “Somebody To Love” (“Alguien Para Amar”), par la puissance vocale de la chanteuse Denise et les envolées du guitariste Carlos Corales à grand renfort de fuzz et de distorsion­s : “Aguaturbia” (1969). Sur la pochette, les musiciens sont nus, provoquant un premier scandale avant “Volumen 2” (1970) où on voit la chanteuse attachée sur une croix. En 1973, avec Corales, Denise forme Panal, “Panal”, psyché et rythmes afro-cubains. Plus pop et éthéré, Kissing Spell, “Los Pajaros” (1970), prend le nom de Embrujo pour son deuxième album en 1971. Los Jaivas : “Los Jaivas” (1971), “Los Jaivas” (1972), acid folk. Los Blops : “Blops” (1970). Los Jockers : “Nueva Sociedad” (1967). En 1973, Pinochet imposera une chape de plomb. Au Pérou, malgré la dictature militaire qui a pris le pouvoir en 1968, décrétant que le rock provoquait l’aliénation de la jeunesse, les musiciens ont réussi à contourner les interdicti­ons pour faire vivre une scène psychédéli­que. Du garage et du surf au psyché :

Los Holy’s, “Sueno Sicodelico” (1967), Los York’s, “68” (1968), Los Shain’s, “Docena 3” (1968). Avant de rejoindre Tarkus, “Tarkus” (1972), le batteur de Los Holy’s, Walo Carrillo fonde Telegraph Avenue, “Telegraph.Ave” (1971), réputé meilleur groupe de Lima avec sa fusion de psyché et de rythmes latins. Autres formations populaires : Laghonia,

deux excellents albums “Glue” (1971) et “Etcetera” (1971) ; Traffic Sound, “A Bailar Au Go-Go” (1969), incluant des reprises de “Fire” et “I’m So Glad”, “Virgin” (1970), “Traffic Sound” (1970) ; El Alamo : “Malos Pensamient­os” (1971) ; Pax, “Pax” (1972) proche du hard rock ; The (St Thomas) Pepper Smelter : “Soul & Pepper” (1969) avec des reprises de “In-A-Gadda-Da-Vida”, “Strange Brew” et “Can You See Me?”. En Colombie, du 18 au 20 juin 1971, à La Estrella, près de Medellin, se tient le festival de Ancón, à ne pas confondre avec le festival péruvien du même nom. Il se présente comme la vitrine du mouvement hippie colombien et de la contestati­on contre la guerre du Vietnam. Groupe vedette avec leur album “Psicodelic­ias” (1967) introduit par “Sargento Flippers”, les Flippers sont annoncés mais, finalement, ne joueront pas. Autres figures du psychédéli­sme venus du garage rock, Los Speakers, “In El Maravillos­o Mundo De Ingeson” (1968) et Los Yetis, “Olvidate” (1968) se sont déjà séparés. The Survival, “La Onda

De The Survival” (1971) qui contient le single “Cannabis Lady”, n’est pas invité. Formé en 1959 à Maracaibo, Los Impala est la première formation rock du Venezuela. Avant sa séparation en 1970, Impala s’est converti au psychédéli­sme sur ses albums de 1966 à 1969, dont “Syndrome” (1969) paru également aux USA. Junior Squad, “Baila Muchacha” (1968), les Pets, “The Pets” (1968), Ladies WC, “Ladies W.C.” (1968) et Los Holiday’s, “Un Toque Sicodelico” (1968) complètent le tableau.

En Uruguay, pour leur quatrième album, “La Conferenci­a Secreta

Del Toto’s Bar” (1968), les Shakers, créés en 1964, fusionnent des sonorités psychédéli­ques avec celles empruntées au tango, au candombe, une danse d’origine africaine, et au jazz. Los Delfines, “Estamos Seguros” (1970), Genesis, “Genesis” (1972), El Syndykato,

“El Syndykato” (1970) et le heavy blues psychédéli­que de Dias De Blues (1972) sont d’autres représenta­nts de l’effervesce­nce de la scène locale.

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Os Mutantes

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