A la plume et au crayon noir

Parmi tous les symboles qu’ont pu laisser derrière elles les années soixante et soixante-dix réunies, l’image de la militante Angela Davis est aussi forte que celles du Che Guevara ou du festival de Monterey Pop. Membre du Parti communiste américain et des Black Panthers, la jeune femme était aussi une des militantes les plus actives dans la lutte contre les inégalités raciales. Avec “Traquée, La Cavale d’Angela Davis” (Glénat), le scénariste Fabien Grolleau raconte comment cette universitaire brillante devient la femme la plus recherchée par le FBI lors de l’été 1970. Soupçonnée d’avoir fourni les armes ayant servi à une tentative d’évasion qui aboutira à la mort d’un juge pris en otage, Angela Davis choisit de se planquer au milieu de la foule new-yorkaise. Entrecoupée de flash-back chronologiques, cette traque bien mise en cases par le trait réaliste de Nicolas Pitz est un vibrant hommage rendu par les auteurs qui va bien au-delà de la coupe afro popularisée par la Dame.

Dans l’Amérique nouvelle qui a émergé après le 11 Septembre, les consciences et les activités ont évolué. Dans “L’Amérique En Procès” (Editions Ici-Bas), Tobocman réalise une biographie passionnante de l’avocat Leonard “Len” Weinglass, un des plus grands moutons noirs libéraux de l’ère Nixon. Parmi les grandes causes défendues par cet homme de loi, les Sept de Chicago (dont Abbie Hoffman et Jerry Rubin), Mumia Abu-Jamal ou John Sinclair, le manager et maître de cérémonie du MC5. Dessinant à la plume et au crayon noir, l’auteur privilégie la simplicité du style pour ne pas encombrer le propos. Ainsi, les décors sont la plupart du temps absents ou réduits à leur plus simple expression. Tobocman raconte différentes affaires plaidées par Weinglass. Accompagnées d’un commentaire clair et précis, ces histoires, comme celle de Judy Harris pourraient très bien inspirer un autre “Hurricane” à Bob Dylan.

Dans la série Le metal pour tous, Chloé O’ et Richard Di Martino (dessin) ont concocté “Les Métalleux - Tome 01” (Kennes), un album à travers lequel, à raison d’une page par gag, ils racontent dans un style gros nez les tribulations d’un groupe de quatre amis adeptes de ce style. Au fil des pages, les auteurs parcourent l’ensemble des points essentiels à connaître pour être fan de Rammstein, d’AC/DC et d’Aerosmith, ou différencier les différentes tribus : heavy, stoner, black, neo, glam, trash, death ou hard. Les auteurs compilent les gags façon Margerin dans cette bande dessinée tout public façon “Toto Va Au Hellfest”, et les aventures de ce drôlatique quatuor de métalleux devraient évoquer quelques souvenirs aux lecteurs tant les situations sont classiques.

1964, alors que la France se trémousse dans les dancings au son des yéyés, l’éditeur Eric Losfeld fait un sérieux doigt d’honneur à la BD franco-belge en amenant du sexe dans un univers jusqu’alors réservé aux plus jeunes. En quelques années, il popularise des auteurs comme Jean-Claude Forrest, Phillipe Druillet, Jean Rollin, Crepax, Cuvelier ou Guy Peellaert, qui apportent grâce à lui le brin d’érotisme qu’il manquait à la France pour être ancrée dans son époque. Honni par ses pairs, pointé du doigt par la morale, Losfeld meurt en 1979 sans avoir récolté les honneurs qu’il méritait pour ce travail de déniaisement du neuvième art. Afin de restituer toute la grandeur de cette saga, le dessinateur et chercheur Benoît Bonte a écrit le magistral “Sexties : Les Filles Du Terrain Vague” (PLG), qui narre avec brio et belles reproductions l’histoire des Barbarella, Jodelle, Miss Scarlett, Epoxy, Pravda, Valentina et autres Lolly-Strip.