Rock & Folk

THE CRUMBLE FACTORY

Le quatuor toulousain révèle la recette de “Darling Lemonade”, un album délectable qui lui permet de s’affirmer comme l’une de nos meilleures formations pop.

- H.M.

CE GROUPE PROTEIFORM­E A POUR NOYAU ORIGINEL le couple formé par le leader Rem Austin, guitariste-auteurcomp­ositeur, et sa compagne Ann Lake. Après avoir travaillé au sein de Psycho Lemon avec les musiciens anglais de Nino Ferrer (Leggs), ils ont débuté en 2013 sous forme d’un duo à deux voix pour la conception des morceaux, puis ont réuni pour les besoins de la scène et d’un premier album le bassiste de Dionysos, le batteur de Tahiti 80, le guitariste de Drive Blind et un pianiste. Cette formule ne devait pas résister et a évolué avec l’arrivée d’un nouveau batteur et d’un nouveau bassiste en 2016, date d’un deuxième album qui n’a pas satisfait Rem Austin : “J’ai été déçu par les mixes et je voulais sortir des contrainte­s de ce travail analogique en studio pour acquérir une flexibilit­é temporelle.” Leur troisième essai a donc été conçu tout à fait différemme­nt, et c’est sans doute ce qui lui confère cette sensibilit­é et ce ton si particulie­rs.

Adeptes de la ligne claire

“On avait tout intérêt à le mitonner dans un cocon et on a donc opté pour notre lieu de vie, une vieille maison toulousain­e.

On l’a enregistré en deux ans dans une chambre d’enfant de 12m2, prise par prise, en limitant les micros à quatre.” Cette volonté de ne pas succomber à l’inflation sonore correspond à un choix musical : “Nous avions une vision simple de la batterie : en réduisant le nombre de micros, elle n’occupe pas trop de spectre sonore et laisse la place aux autres instrument­s. Nous ne voulions pas un gros son. Nous ne voulions pas être impression­nants car nous sommes des adeptes de la ligne claire.” C’est cette optique qui explique la légèreté et la délicatess­e des morceaux qui conservent toujours une part de douceur malgré des références revendiqué­es à l’indie pop et à des groupes comme Pavement, Teenage Fanclub ou Pixies : “On s’est aperçu que, même quand on voulait être plus nerveux, on ne sortait jamais de la douceur avec notre mélange sucré-salé.”

Réfléchir le moins possible

Cette caractéris­tique repose sur l’harmonie des deux voix et sur le charme mélodique des chansons, mais elle a le mérite de ne jamais sombrer dans une uniformisa­tion doucereuse grâce à une variété de climats et d’ambiances qui renvoie à la conception de l’ensemble : “On a testé beaucoup de morceaux et on a retenu ceux qui relevaient de l’évidence. On les a choisis séparément, sans se référer à une logique d’ensemble. On a pensé que le fait qu’ils aient été façonnés dans le même contexte, avec les mêmes instrument­s et peu d’artifices contribuer­ait à leur unité. Nous avons décidé de réfléchir le moins possible, y compris sur les prises qui ont été effectuées en un ou deux jets.” Le pari est réussi car l’album échappe à l’impression de patchwork, tout en intégrant à une pop sereine des montées de tension, des guitares offensives ou des souvenirs psychédéli­ques (“Le premier disque que j’ai acheté était un album de Syd Barret”). Et il affirme sa force face aux production­s alambiquée­s et tape-à-l’oeil en adoptant “le parti pris de la simplicité : c’était notre stratégie pour garder la fraîcheur et rester au niveau de la vibration.” ★

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