Laetitia Shériff
la période la moins ressassée). Pourtant, à poser au pied du mont Rushmore, on risque d’apparaître petits, et “Memory Lane” ne parvient pas assez à sublimer sa fascination pour les sixties pour affirmer une identité singulière. JJJ rouler là-bas, vivre là-bas... Le phénomène est mis en évidence dans ce triple album. En 2014, Johnny entreprend une tournée sur sa terre promise, aventure immortalisée par une captation au Beacon Theatre de New York. A la tête d’un groupe resserré, où brillent toujours Yarol Poupaud (guitare), Greg Zlap (harmonica) et d’autres fidèles fines lames, il envoie “Je Suis Né Dans La Rue”, “Gabrielle”, “Tes Tendres Années” (séquence acoustique), “Voyage Au Pays Des Vivants”, “Fils De Personne”, “L’Envie”... Cet enregistrement rejoint les grands disques en public dans une discographie qui n’en manque certes pas. Le troisième volet,
“Son Rêve Américain”, bande-son de “À Nos Promesses”, documentaire réalisé par François Goetghebeur, lors d’une virée à moto Indian de NOLA à LA, en compagnie d’une poignée d’amis dont Pierre Billon, révèle un inédit, “Deux Sortes D’Hommes”. “Il y a deux sortes d’hommes au fond/ Ceux qui ont aimé et ceux qui aimeront”...
Du Hallyday pur sucre. JJJJ JEAN-WILLIAM THOURY
“Stillness”
Personnage hors normes de la scène indé, Laetitia Shériff n’a jamais cherché à oeuvrer dans la séduction. Influencée par ses illustres consoeurs, Patti Smith ou PJ Harvey, elle ne fait pas de concessions et, depuis ses débuts en 2003 à Rennes avec Olivier Mellano (guitariste de Dominique A), elle cultive sa particularité parfois rugueuse et une soif d’expériences qui l’a amenée à concevoir des musiques de films et de spectacles, et à évoluer en solo ou à accompagner divers artistes. Pour son quatrième album, elle intervient au chant, à la basse, à la guitare et a maintenu le trio en place depuis six ans, en compagnie du batteur d’Eiffel et d’un guitariste qui joue également du synthé. Enregistrés dans les conditions du live, les dix morceaux en anglais qu’elle a composés sont à l’image de sa voix, parfois douce, parfois mordante, mais toujours un peu brute et témoignant d’une exigence qui refuse toute facilité. Après un début faussement serein (“People Rise Up”), les choses sérieuses commencent avec “A Stirring World”, son mid-tempo obsédant, son ambiance crépusculaire, son chant décalé et sa tension contenue. L’évolution dans ces eaux troubles se révèle particulièrement pertinente, comme c’est le cas avec les lancinants “We Are You” et “Go To Big Sur”, où l’intervention judicieuse de cuivres vient enrichir le rôle des synthés. L’autre point fort du disque réside dans le contraste entre des tendances pop à la douceur assumée (la ballade dépouillée “Pamper Yourself”, la mélopée finale “Ashamed”) et un rock qui apprécie les guitares bruitistes (“Stupid March”) et les riffs acérés d’un défoulement punky (“Sign Of Shirking”). JJJ