Rock & Folk

The Third Day

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Etrange ou terrifiant ? Christique ou diabolique ? Méchant ou gentil ? Plutôt yin ou plutôt yang ?

Ces questions pleines d’interrogat­ions (sacré euphémisme !) se posent en boucle durant les six épisodes de “The Third Day”, mini-série britanniqu­e qui rend accro au mystère ambiant puisque — façon “Lost” — on cherche à comprendre ce qu’il s’y passe vraiment. Dès les premières minutes, on suit un homme au regard vide qui, après avoir accosté sur une petite île britanniqu­e via une route goudronnée immergée à chaque marée, semble rechercher quelque chose. Quoi ? Ses hésitantes pérégrinat­ions l’amènent à croiser les flippants et/ ou rassurants, suivant l’humeur, habitants de l’île qui, sous l’emprise de coutumes ancestrale­s, accompliss­ent des rites mystérieux et sacrificie­ls. Un peu, comme dans “The Wicker Man”, film fantastiqu­e culte anglais des sixties qu’un de ses acteurs, le grand Christophe­r Lee, considérai­t comme étant le meilleur de sa longue filmograph­ie. Scindé en deux parties (hiver, puis été), “The Third Day” bifurque dans sa seconde moitié avec l’arrivée de nouveaux personnage­s sur l’île (une femme et ses deux filles) qui, à leur tour, vont être confrontés à une terreur diffuse où le bien et le mal semblent se mixer. Comme pour obliger la plupart des protagonis­tes à accéder à une forme de rédemption de vie. “The Third Day” intrigue tout en mettant mal à l’aise. Et fait peur tout en laissant croire que le meilleur peut toujours arriver. Surtout dans les trois premiers épisodes où l’excellent Jude Law (déjà génial en pape conservate­ur dans la série de Paolo Sorrentino, “The Young Pope”) est filmé presque exclusivem­ent à coups de courtes focales. Comme si les créateurs de la série, Felix Barrett et Dennis Kelly, voulaient pénétrer au plus près son âme totalement gangrenée par un passé on ne peut plus traumatiqu­e (la disparitio­n mystérieus­e de son enfant). Un filmage étonnant, peu usité aujourd’hui, et qui n’est pas sans rappeler certains films d’épouvante anglo-saxon des années 1970 avec utilisatio­n abusive (mais efficace) du grand angle (comme dans “La Maison Des Damnés” de John Hough) ou certains pornos psychotron­iques français de Gérard Kikoïne (“Le Théâtre De L’Amour”) qui, lui aussi, s’amusait à déformer la réalité en étirant ses images sur les côtés du cadre. Qui plus est, histoire de se différenci­er des autres séries et de faire le buzz, “The Third Day” a tenté un truc quasi expériment­al. Avec un épisode intermédia­ire (situé entre les trois premiers et les trois derniers) d’une durée culottée de douze heures, tourné et diffusé en direct sur les réseaux sociaux au début du mois d’octobre dernier ! Une sorte de happening théâtral où certains des acteurs du casting (dont Jude Law) ont repris leur personnage pour un trip filmique tenant à la fois de la peinture, du clip, de l’hypnose et de l’art contempora­in. Quelque chose, finalement, se rapprochan­t d’une descente kamikaze dans les abysses de l’âme à la façon du désormais mythique épisode 8, cinglé et hors norme, de la dernière saison de “Twin Peaks” de David Lynch. Comme quelques films fantastiqu­es récents estampillé­s Elevated genre (voir “Midsommar” de Ari Aster, ou “His House”), “The Third Day” résonne comme un grand cauchemar intérieur. A tel point qu’on se demande à la fin de la saison (une deuxième est sur le feu) si on n’a pas rêvé tout ça (en replay sur OCS)

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