Coco Reilly
“Coco Reilly”
GOLDEN WHEEL RECORD
Le prénom a un parfum, des cheveux noirs et un mystère. La musique aussi — et elle vient de loin. Car non, ceci n’est pas un premier disque de jeune fille. Coco Reilly a la trentaine et des chansons répétées, brinquebalées, ruminées de New York à Nashville en passant par Indianapolis, des chansons qu’elle aurait, dit-on, enregistrées trois fois. Il y en a neuf, toutes splendides, lentes, impérieuses et “atmosphériques”, ce mot qui veut tout et rien dire, mais dans son cas, beaucoup plus tout que rien. On se situe quelque part entre un wall of sound fracturé à la Richard Swift et les vapeurs twang d’un cabaret lynchien. Ça, c’est le style : les pluies tropicales de guitares et d’accords harrisoniens, les courants chauds de mellotrons, la batterie sourde, la voix qui se fond au sein de l’arrangement, sans jamais chercher à en prendre possession, comme s’il ne fallait surtout pas séparer la chanson de sa mise en scène. Mais il y a plus : une idée de la beauté, qui ne serait justement ni un style, ni un goût, ni de la déco, mais une sensation. Un vent triste, une valse lasse, un miroir fendu (“Mirror” et son carrousel final en crescendo, peut-être le sommet du disque si l’on devait n’en escalader qu’un) et ce feeling paradoxal, entre compression claustro et flottement astral, de baigner dans une musique amniotique, matricielle. Neuf chansons, c’est deux de plus que Richard Hawley n’en avait mis sur son premier minialbum, il y a exactement vingt ans. Mais le résultat est à peu près identique : une porte qui se fracasse d’un coup, et un talent majeur qui la franchit pour prendre possession de la scène et, espéronsle, ne plus la quitter. ✪✪✪✪✪