Thomas Dutronc
“Frenchy : 7 New French Songs For Lovers”
BLUE NOTE
Il y a quelques mois, Rock&Folk avait célébré d’une manière mesurée l’album de reprises du patrimoine concocté par Thomas Dutronc avec l’aide de quatre fines lames jazzy et d’invités prestigieux. Mais il se trouve que ce disque ressort avec l’adjonction de sept inédits qui rehaussent singulièrement la valeur d’un ensemble sympathique mais un peu inégal, ce qui oblige à revenir sur cette entreprise à deux temps. Première remarque, ces ajouts, contrairement à ce qui les avait précédés, restent dans le strict domaine francophone : pas de versions anglicisées de standards français ni d’invités internationaux. Et c’est tant mieux au niveau de la cohérence de l’hommage, d’autant que les partenaires sollicités se révèlent tous être des atouts de choix pour seconder le guitariste émérite au chant et relever le niveau vocal en s’appuyant sur ses qualités de faire-valoir cool : son daron, Jacques Dutronc, on ne peut plus légitime pour parer “Le Petit Jardin” des feux de la nostalgie, Jane Birkin et sa voix toujours diaphane pour “Ces Petits Riens”, Françoise Hardy, absente si présente à travers deux de ses chansons, “Le Premier Bonheur Du Jour” où Clara Luciani se coule dans sa tessiture vocale, et “Partir Quand Même” où Etienne Daho fait une belle démonstration de séduction. Sans oublier les deux sommets de cette nouvelle version : Philippe Katherine qui parvient à redonner à “Il Y Avait Des Arbres” cette part de tendresse et de folie douce que lui avait insufflée Charles Trenet, et Eddy Mitchell qui excelle dans une version swing de “La Dernière Séance” où il déploie toutes ses potentialités de crooner en revisitant avec éclat cette oeuvre majeure de son répertoire. ✪✪✪
In You”, son “Imagine” à lui. La reprise de “Oh, Lonesome Me”, de Don Gibson, avec son harmonica, est tout bonnement féerique. Le tout est dépouillé à l’extrême, et sur les morceaux électriques, les solos sonnent comme s’ils étaient démantibulés. Enfin, il y a cette voix unique, incroyablement aiguë, fluette, quasi féminine, comme personne n’en avait entendue avant (ni depuis, sauf peut-être chez J Mascis, qui est un fanatique de Neil Young, mais qui a trop tendance à chanter comme s’il était saoul comme un Polonais). C’est avec ce coup d’éclat magistral que Young entame donc les seventies. Le succès est au rendez-vous, et il remettra le couvert deux ans plus tard, avec le frère jumeau de “After The Gold Rush” : “Harvest”, autre succès mondial. Après quoi apparaîtra sa part d’ombre via la trilogie “On The Beach”, “Tonight’s The Night” et “Zuma” (on aimerait bien que ces deux derniers ressortent également dans des versions remasterisées), avant de finir les années 1970 avec l’apocalyptique “Rust Never Sleeps”. On peut dire que cet homme est impossible à ranger dans une case. C’est ainsi qu’il est grand.