Rock & Folk

Le cycle des robots

Discograph­ie en neuf albums et demi.

- PAR OLIVIER CACHIN

“Homework”

(1996)

Si les Daft étaient vraiment punk, tout aurait pu s’arrêter après cet album d’introducti­on, le “Never Mind The Bollocks” de la génération house filtrée, seize titres dont les méga hits “Da Funk” et “Around The World”, mais aussi l’étrange et acide “Rock’n Roll”. “Teachers”, un titre “qui résonne dans la tête de toute une génération, comme quoi on peut à la fois être fan de George Clinton et de DJ Hell” (Pedro Winter) et qui ressemble à une esquisse de “Giorgio By Moroder” sur leur ultime album, est un hommage aux artistes et producteur­s qu’ils admirent, parmi lesquels DJ Sneak, Dr Dre, Todd Edwards, Romanthony (qui chantera pour eux “One More Time”)… Mais pas Moroder. Avaient-ils déjà prévu de lui consacrer un morceau de neuf minutes dix-sept ans plus tard ? En tout cas, l’album est un indéniable classique, avec en pied de nez final l’instrument­al “Funk Ad”, 50 secondes à l’envers de… “Da Funk”. Scoop : les deux artistes masqués sont démasqués sur les photos de la pochette intérieure, mais à l’âge de cinq ans… Un disque au final beaucoup plus pointu et exigeant que ce que l’on pourrait croire en lisant les chroniques dithyrambi­ques de la grande presse à l’époque.

“Alive 1997”

(2001)

Q Club, Birmingham, Angleterre, 8 novembre 1997. Les Daft déconstrui­sent leur (maigre) catalogue le temps d’un mix sauvage de quaranteci­nq minutes trente identifiée­s en deux faces titrées “Part

1” et “Part 2”. Pas vraiment un greatest hit donc, plutôt un projet presque intimiste proposant un beat qui ne s’arrête jamais dans un concept small size clubbing. Pour amateurs avisés prêts à l’aventure abrasive. Sinon, on entend beaucoup la foule, qui a l’air d’apprécier la fessée rythmique administré­e par les deux Frenchies.

“Discovery”

(2001)

La preuve irréfutabl­e que “Homework” ne devait rien au hasard. Dès “One More Time”, on plonge dans une disco futuriste dont les beats répétitifs sont enrobés d’harmonies vocales sucrées et de mélodies addictives, avec une galerie de samples qui préfigure la guest list américaine de “Random Access Memories” : Sister Sledge, George Duke, Barry Manilow, The Tavares, Rose Royce et Edwin Birdsong. Cinq singles seront extraits de ce disque où l’on trouvera même un hommage (involontai­re ?) à Rondo Veneziano, “Veridis Quo”, du clavecin pour le dancefloor et du kitsch pour les danseurs.

“Irréversib­le”

(2002)

Le film le plus traumatisa­nt de Gaspar Noé et une musique oppressant­e signée Thomas où ses instrument­aux, dont les bien nommés “Rectum” et “Spinal Scratch”, sont encadrés par des extraits de l’Adagio de Mahler et de la Septième Symphonie de Beethoven, ainsi que de “Mon Manège A Moi” par Etienne Daho.

“Human After All”

(2005)

L’album de trop, mais en plein milieu de leur discograph­ie. Mal aimé par la critique, boudé par le public (n°1 des Billboard Dance Charts aux USA quand même), ce disque enregistré en six semaines a connu un regain de popularité avec l’album live sorti deux ans plus tard, qui redonnait aux morceaux une nouvelle vie. Comme un inventaire à la Prévert, on se souviendra du funk rock de “Release The Beast” de Breakwater samplé sur “Robot Rock”, des trois cent cinquante fois où le mot “it” est prononcé dans “Technologi­c” et du morceau qui donne son nom à l’album dont la vidéo, jamais finalisée, devint le point de départ du film “Electroma”.

“Alive 2007”

(2007)

Un second live, enregistré à Bercy cette fois, qui multiplie les blends de plusieurs titres (“Prime Time Of Your Life/ Brainwashe­r/ Rollin’ And Scratchin’/ Alive”) et les mix en direct afin d’éviter de faire comme ces DJ dont les sets se limitent à un mix préenregis­tré et une chorégraph­ie aux gestes de sémaphore. Manque le décor de la pyramide, qui valut au groupe après son passage à Coachella le titre de “meilleur show live de tous les temps.” Ceux qui ont vu Jimi, David, Mick et James en concert sont priés de se faire discrets.

“TRON - Legacy”

(2010)

Une BO pour Tonton Walt, du Disney électro et un orchestre symphoniqu­e de quatre-vingt-cinq musiciens en garniture. Un résultat évidemment très différent des production­s habituelle­s, et une démarche expliquée par l’orchestrat­eur du projet, Joseph Trapanese : “Ça peut sembler compliqué mais, au bout du compte, c’est assez simple. J’ai été enfermé dans une pièce avec des robots pendant deux ans, et on a énormément travaillé.”

“TRON - Legacy Reconfigur­ed”

(2011) On trouve ici quinze remixes des morceaux de la B.O. signés Moby, Paul Oakenfold, Boys Noize, Avicii… L’exmanager Pedro Winter écrivit une lettre ouverte au label, avec cette punchline : “Je suis triste de découvrir qu’apparemmen­t, le DA de chez Disney achète sa musique électroniq­ue dans les magasins des aéroports.”

“Random Access Memories”

(2013) Le baroud d’honneur, l’album de tous les featurings, de toutes les distinctio­ns, de tous les records. Paul Williams, Swan dans le film “Phantom Of The Paradise”, en chanteur sur “Touch”, c’est la grande classe. La fusion électro-organique fonctionne à plein tube, “Get Lucky” en étant l’épitomé, d’une entêtante beauté. De Panda Bear à Julian Casablanca­s via Chilly Gonzales, les invités sont parfois improbable­s, mais toujours pertinents. Et les musiciens de session ici employés sont les plus talentueux requins de l’industrie, de Nathan East à Omar Hakim. “Les Visiteurs En Amérique”, version US.

BONUS Mato “Homework Dub”

(2014)

Un final rigolo : Mato, musicien reggae spécialisé dans les reprises instrument­ales décalées, sort un album entier reprenant l’intégralit­é de “Homework”… en version dub, avec rythmique jamaïcaine pneumatiqu­e et chambre d’écho à tous les étages. Un régal. Validé par Thomas et Guy-Man ?

Paul Williams en chanteur sur “Touch”, c’est la grande classe

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