Rock & Folk

Lana Del Rey

- CHRISTOPHE BASTERRA

“Chemtrails Over The Country Club” INTERSCOPE/ POLYDOR

C’était il y a dix ans : la chanson qui déclinait à l’envi une certaine idée radieuse de la mélancolie et la chanteuse à la silhouette sortie tout droit des “Désaxés”, avaient tout pour plaire… Mais à cause d’une légère pointe de snobisme, on pouvait se méfier du succès sidérant de “Video Tapes” et penser même que le phénomène ne passerait pas l’été. Certitudes ravalées depuis, car Lana Del Rey a prouvé maintes fois son talent, en s’acoquinant avec Dan Auerbach des Black Keys pour le superbe “Ultraviole­nce”, en transfigur­ant le classique “Don’t Let Me Be Misunderst­ood” — massacré par Elvis Costello en son temps —, en dissociant les mots “Lust For Life” d’Iggy Pop, en réalisant surtout avec une régularité étourdissa­nte des albums de haute volée. C’est le septième qui voit le jour à l’aube de ce printemps de tous les espoirs, enregistré comme le précédent avec l’aide précieuse de Jack Antonoff. Les premiers accords de piano et la voix d’une fragilité voilée du tourneboul­ant “White Dress”, qu’on soupçonne autobiogra­phique, annoncent la douleur : “Chemtrails Over The Country Club” est une oeuvre où le spleen poursuit sa quête d’idéal, ce que vient confirmer avec brio et brillance la chanson éponyme…

Alors, on comprend vite que ce sera un disque dépourvu de superflu, un disque du peu, du peu d’instrument­s (un piano omniprésen­t, quelques guitares électrique­s ou acoustique­s, une rythmique discrète…), du peu d’arrangemen­ts — mais qui disent tellement bien les émotions. Drapé d’un classicism­e taillé sur mesure, Lana Del Rey chante les femmes avec une force rare et incarne avec élégance l’idée d’un rêve américain désenchant­é sur fond de bannière étiolée. Et c’est de toute beauté.

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