Selwyn Birchwood
“Living In A Burning House” ALLIGATOR RECORDS
Si la grandeur d’un disque de blues se mesure à l’épaisseur d’histoires qu’il est capable de charrier, cette “maison qui brûle” semble initialement manquer de fondations. Birchwood, grand échalas floridien aux chemises flashy, n’est pas un bluesman métaphysique, et la seule fois où il est ici question de crossroads, c’est très prosaïquement du carrefour d’une relation déraillante qu’il s’agit. Mais en fait de carrefour, c’est nous qui faisions fausse route. “Living In A Burning House” est un pur disque de juke joints et, à défaut de vertiges existentiels, Birchwood s’avère un conteur assez marrant, comme en témoignent “I Got Drunk, Laid And Stoned”, laconique histoire de revanche matrimoniale, ou “Mama Knows Best”, qui déroule sur un shuffle obèse une petite saynète domestique où la mère de Birchwood, interprétée avec beaucoup de verve par la chanteuse Diunna Greenleaf, juge avec méfiance la dernière fille que lui ramène son rejeton (“Fils, laisse-moi te dire/ Cette fille, elle est pas faite pour toi/ Elle cuisine pas, elle ne fait pas le repassage, et elle travaille pas !”). Venu au blues par Jimi Hendrix, Birchwood nous épargne les plans dormitifs à la Clapton, et son timbre rocailleux, proche de Gil Scott-Heron, lui autorise des incursions gospel ou soul (“Revelation”, “One More Time”). Utile piqûre de rappel : avant d’être une foutue maladie du coeur, le blues est surtout une musique jouisseuse.