Royal Blood
“Typhoons”
C’est notoire, les Anglais sont champions pour ériger en messies des groupes qui finiront par peupler le cimetière des espérances. Comment l’alliance d’une fade belle gueule, le chanteur-bassiste Mike Kerr, et d’un barbu à casquette, Ben Thatcher, a-telle pu passer outre-Manche pour le plus franc motif d’espoir depuis les Arctic Monkeys ? Primo, un pur gimmick : un duo basse-batterie mais où toutes sortes de pédales d’effet permettent de faire sonner la basse comme une bonne vieille guitare. Certains planchent encore sur le pourquoi. Deuzio : une pluie d’adoubements flatteurs. Tertio : leur premier album éponyme, défouraillé en à peine plus d’une demi-heure, sans bouleverser, sonnait comme une version moins biscornue (donc moins intéressante) mais impliquée, du stoner des QOTSA. On les croyait occupés à rebâtir la relation spéciale, les voilà qui font leur coming out mainstream, se replongeant dans la musique de leur adolescence. Led Zeppelin ? Nirvana ? Non, la French Touch, Daft Punk, et même Justice ! La première réaction est de rejet à l’écoute de ce rock de boîte martial et scintillant. Pourtant, même s’ils font passer les derniers pensums de Richard Ashcroft pour un sommet de réserve, force est de constater piteusement qu’on pourrait danser sur ce gros glam sexy. Les chansons qui marchent le mieux sont celles qui oeilladent le plus ouvertement l’auditeur : “Oblivion”, “Trouble’s Coming”, “Limbo”. “Typhoons” est un petit monument de rock tapineur. Horrible soupçon : et si la reconquête du Rock devait se frayer par un tel chemin ? Notre soupe contre la leur ? Qu’importe. Pour l’heure, Royal Blood offre de quoi se procurer son petit plaisir coupable. Il sera toujours temps de se renier plus tard. ✪✪1/2