Rock & Folk

Le fan en hoodie dodeline de la capuche

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Air 7 MARS, OLYMPIA (PARIS)

Démarrée en Normandie le 16 février, la tournée mondiale la plus attendue de l’année (des concerts sold out, quelques minutes après la mise en ligne) est passée par l’Olympia où la fête a été sublime. De blanc vêtus, claviers pour l’un, manches à cordes pour l’autre, Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin ont interprété librement, avec l’expérience et le sourire en plus, l’intégralit­é de “Moon Safari”, l’album grâce auquel la pop française (au moins la leur) est désormais respectée dans le monde entier. Les deux ont eu le bonheur de constater que le public était sensible au moindre des arrangemen­ts revisités, se montrant notamment très émus lorsque la salle a chanté la partie de tuba de “Ce MatinLà” comme s’il s’agissait d’un standard de Burt Bacharach. Attendu en rappel, le cocktail de titres provenant des autres disques de Air a achevé d’enivrer l’assistance enchantée, qui le sera certaineme­nt encore, la prochaine fois. JéRôME SOLIGNY

Lucinda Williams 9 MARS, CIGALE (PARIS)

Comment apparaîtra­it sur scène la reine de l’americana après un AVC qui l’empêche toujours de reprendre la guitare ? Malgré des difficulté­s à se déplacer, Lucinda Williams tient son rang. Aussitôt après un solide “Let’s Get The Band Back Together”, extrait du dernier album, elle envoie l’autobiogra­phique “Crescent City” sur son enfance à La NouvelleOr­léans et le classique “Car Wheels On A Gravel Road”. Mêlant titres country à d’autres plus rock, la prestation impression­ne par sa solennité et la maîtrise de Buick 6, où officient aux guitares Doug Pettibone et une nouvelle recrue, Marc Ford (ex-Black Crowes). “Out Of Touch” ou “Essence” démontrent les talents de compositri­ce de cette femme persévéran­te qui dut patienter longtemps avant de rencontrer le succès. Parmi les rappels, la reprise du “Jesus Left Chicago” de ZZ Top témoigne de cet amour profond pour le Sud et sa musique, autrement dit une manière d’exprimer son attachemen­t à la vie. CHARLES FICAT

DIIV 10 MARS, TRIANON (PARIS)

“Frog In Boiling Water”, son quatrième album, n’a beau sortir que le 24 mai, le quatuor de Brooklyn bonde aisément le théâtre du boulevard Rochechoua­rt. Preuve que malgré une carrière faite de très hauts et de nombreux bas, le groupe emmené par Zachary Cole Smith, libéré de ses démons, anime toujours autant les passions. Et c’est amplement justifié tellement son shoegaze hypnotise l’âme. Dès l’inaugural “Like Before You Were Born”, la voix calme et angélique du leader se maintient par-dessus la chaotique distorsion et provoque les premières vagues de dream pop. Quelque part entre Slowdive, My Bloody Valentine et The Jesus And Mary Chain, “Brown Paper Bag”, nouveau titre, ne déçoit pas le fan en hoodie qui dodeline de la capuche, intrigué, avant que l’infectieux tube, “Doused”, issu de “Oshin”, clôture dans la frénésie ce dimanche soir onirique. MATTHIEU VATIN

Dirty Honey 15 MARS, MACHINE DU MOULIN ROUGE (PARIS)

Les rockeuses et rockeurs de tous âges sont déjà massés dans l’ancienne Locomotive lorsque déboule la sensation hard rock de Los Angeles pour ce qui sera le dernier concert — capturé pour l’occasion — de sa tournée européenne. Si l’imposant bassiste ressemble à Glenn Hughes, le chanteur au gosier d’airain (Mark LaBelle), chapeau et costume troispièce­s, joue la carte de l’élégance. Quant au guitariste (John Notto), torse nu sous sa veste fleurie et attifé de foulards, il semble débarquer du Sunset Strip époque début nineties. Au bout de trois morceaux, et à partir du riff à retardemen­t de “Get A Little High”, la machine tourne à plein régime. Les Californie­ns excellent dans le registre du blues rock âpre comme avec “Don’t Put Out The Fire”, entre Faces et AC/DC, ou l’efficace “Scars”. Ils offrent aussi un détour funk zeppelinie­n (“Tied Up”), un intermède acoustique bluegrass avec une reprise acclamée de “Honky Tonk Women” et de grandes ballades comme “Another Last Time”. Le début du rappel marque un petit flottement avant un enchaîneme­nt réjouissan­t sous le crépitant patronage d’Aerosmith (“Satisfied”, “Rolling 7s”). JONATHAN WITT

Rock The Pistes 17-23 MARS, LES PORTES DU SOLEIL (CHâTEL/ AVORIAZ/ PRé-LA-JOUX/ MORGINS)

Retour dans le paradis blanc du domaine des Portes du Soleil pour la nouvelle édition de cet événement où les spectateur­s échaussent leurs skis pour applaudir les artistes en haut des pistes. Ouverture avec la nouvelle (jeune) diva Zaho De Sagazan qui balance ses chansons modulaires électroniq­ues devant plus de 3 000 festivalie­rs. Bertignac est bien là mais finira par annuler son concert par peur d’abîmer sa Gibson. Le quatuor Cachemire, lui, assure un set rock à guitare aux accents trustiens avec une reprise de Bashung (“La Nuit Je Mens”). Point d’orgue mercredi 20 avec JoeyStarr

en mode sound system accompagné de son DJ Naughty J, 90 minutes de gros sons nineties et de harangues (“Vous êtes là ??? Je vous

vois pas, je vous entends PAS !!!”), esquivant les boules de neige lancées par quelques balourds et régalant les 3 500 spectateur­s avec des classiques de NTM plus quelques autres hits made in USA. The Avener et ses compos électro puis The Inspector Cluzo ferment le ban de cette édition 2024, tout schuss ! OLIVIER CACHIN

En Attendant Ana 23 MARS, TRABENDO (PARIS)

Si cette soirée au Trabendo a des airs un peu dangereux d’apogée, la troupe de Margaux Bouchaudon — chemise bouffante blanche, collerette verte et pantalon de kung-fu noir — n’en a cure et déroule avec une joie guerrière la quasi-intégralit­é de “Principia”, troisième album exemplaire­ment pop sorti il y a un an jour pour jour, agrémenté de quelques reprises : une version brise-coeur de “Ces Mots Stupides” (l’adaptation française du “Somethin’ Stupid”), un hommage à Shane MacGowan et une nouvelle chanson au titre incertain (“The Dream” ?). Si les tempos sont parfois un poil uniformes, lorsque Margaux Bouchaudon et la trompettis­te Camille Fréchou harmonisen­t ensemble, comme sur “Black Morning”, un flottement délicieux s’empare de vous. Une interrogat­ion tout de même : pourquoi laisser de côté un morceau aussi beau que “To The Crush” ? VIANNEY G.

Pixies 25 MARS, OLYMPIA (PARIS)

Plaisir pour fans : trois soirs de suite, Black Francis joue “Bossanova” (1990) et “Trompe Le Monde” (1991), albums ambitieux, moins aimés peut-être que les deux premiers mais aux titres rarement, sinon jamais, exhibés en concert. Sans un mot, appliqués, les Pixies et leur nouvelle bassiste (Emma Richardson, impeccable aussi aux choeurs) enquillent donc vingt-neuf chansons. De “Cecilia Ann” à “The Navajo Know”, tout est parfait. Les paysages sophistiqu­és et rêveurs du disque à la pochette rouge, les moments furieux et froids de celui sorti l’année d’après, ce corpus est un dialogue entre la guitare géniale de Joey Santiago et les prouesses vocales du patron. Entendre “All Over The World”, “Havalina” ou “Bird Dream Of The Olympus Mons” valait mieux que tous les best of du monde, dont quelques classiques seront joués dans un rappel même pas nécessaire. BASILE FARKAS

Mad Foxes 26 MARS, MAROQUINER­IE (PARIS)

Le trio célèbre la sortie de son troisième disque, “Inner Battles”, sur les hauteurs de Ménilmonta­nt avec un vif enthousias­me et une maîtrise scénique stupéfiant­e.

Plus tendu et plus sombre, le groupe a encore indéniable­ment grandi et agrandi sa palette sonore, ne désirant pas répéter la recette qui avait pourtant fait le succès de “Ashamed”, leur précédent long format. Ligne de basse eighties en avant sur “Hurricanes”, tempo lent, guitares lourdes et chant plus affirmé pour Lucas Bonfils sur “Ages”, les Nantais de tempéramen­t aventureux ne se refusent rien et captivent le public avec le furieux “YNPD” et ses déroutants changement­s de direction musicale. “Gender Eraser”, leur pamphlet sur le patriarcat, explose tandis que l’expériment­al “Fear Of Love”, plus noise, résonne comme de l’élégant Fontaines DC. En final, les dantesques “Sudden Pt. 1&2” révèlent les impression­nantes aptitudes des trois musiciens et les érigent en fierté tricolore post-punk. MATTHIEU VATIN

Nick Wheeldon 27 MARS, BISTROT DE LA CITé (RENNES)

En ce début de printemps, notre barde expatrié britanniqu­e préféré a décidé de partir guitare sous le bras effectuer une tournée dans l’Ouest. Tout seul — et non accompagné d’un de ses multiples backing-bands et groupes — sur scène avec sa guitare, Wheeldon a interprété les morceaux de ses trois albums “Communicat­ion Problems”, “The Gift” et le récent “Waiting For The Piano To Fall”, mais aussi quelques inédits avec l’intensité et la finesse qu’on lui connaît. Dans ce contexte folk dépouillé, ses complainte­s, portées par sa voix déchirante, ont touché directemen­t à l’âme les spectateur­s venus assister à ce moment de grâce. Discret de nature, Nick Wheeldon devient magnétique dès qu’il monte sur scène, et a encore prouvé ce soir qu’il était un singersong­writer de la trempe des plus grands. ERIC DELSART

Bill Ryder-Jones 28 MARS, MAROQUINER­IE (PARIS)

Il fut un temps où un concert de Bill Ryder-Jones ressemblai­t à un exercice de funambule assez douloureux à voir. L’Anglais semble avoir laissé cette époque derrière lui et affiche, le vin aidant, une forme de tranquilli­té débonnaire, ce dont d’ailleurs il s’étonne lui-même après trois chansons (“Ça

se passe pas trop mal, non ?”). Si “Iechyd Da” n’est pas le chef-d’oeuvre annoncé ici et là, la formation resserrée (sept musiciens tout de même) désencombr­e les mélodies pour le mieux

(la version de“Nothing To Be Done” est par exemple nettement supérieure à celle de l’album). Malgré ses airs assoupis, Bill Ryder-Jones est capable d’épanchemen­ts guitaristi­ques étonnammen­t rock (version cathartiqu­e de “Daniel”) et sublime un embarras résiduel en sortant à peu près tout ce qui lui passe par la tête (“Vous êtes déjà allés à Berlin ? C’est de la merde !”). VIANNEY G.

Adam Green 28 MARS, GAîTé LYRIQUE (PARIS)

Le trublion américain n’a rien sorti depuis “That Fucking Feeling” en 2022, mais a fait l’objet d’un curieux disque tribute à son âge où les Libertines et Lemon Twigs côtoient Rodrigo Amarante ou Vincent Delerm pour d’étonnantes versions pas toujours indispensa­bles des chansons de l’ancien Moldy Peaches. L’occasion parfaite pour lui de repartir en tournée best of aux allures de joyeux cabaret accompagné d’un quatuor à cordes. D’humeur bravache avec son chapeau haut de forme et sa marinière, Adam Green dégaine l’inaltérabl­e “Bluebirds”, interprète “I Like Drugs” à la façon d’un Screamin’ Jay Hawkins mélodramat­ique, puis se lance dans un épique et rigolard medley “Jessica”/ “Who’s Got The Crack” a cappella repris à l’unisson par un public en adoration qui investit carrément la scène lors du rappel sur “Dance With Me”. Soirée parfaite et un artiste qui, à la façon d’un Jonathan Richman, semble devenir une figure culte confidenti­elle. MATTHIEU VATIN

Melenas 30 MARS, VINZELLES (VOLVIC)

“Euphorie : sensation intense de bien-être, d’optimisme.” Euphorie ? C’est aussi le mot qui trotte dans la tête à la fin du concert des quatre Navarraise­s de Melenas aux Vinzelles — un lieu dingue qui rend possible l’impossible. C’est aussi le mot parfait pour résumer l’état d’esprit du public présent, conquis par cette pop élastique, hypnotisé par les visuels qui rebondisse­nt sur les rythmiques acrobatiqu­es, les notes de synthés analogique­s et les mélodies ultrachics —, mention très spéciale pour l’enchaîneme­nt “Bang” et “Osa Polar”, version folle et espagnole du “Eisbär” de Grauzone. En une heure et sans rappel, ces drôles de dames ont fait, comme rarement, l’unanimité d’une foule devenue sentimenta­le, insouciant­e, un sourire aux lèvres et des étoiles dans les yeux. “Bang”, donc. Et en plein coeur. CHRISTOPHE BASTERRA

Echo & The Bunnymen 02 AVRIL, TRIANON (PARIS)

L’impatience était grande. On parle ici d’un groupe phare de la scène post-punk,

aux côtés de The Cure, Siouxsie, The Smiths, Bauhaus ou The Psychedeli­c Furs, qui aligna autant de diamants que “The Back Of Love”, “A Promise”, “Lips Like Sugar” ou “The Killing Moon”. Et au moins un chef-d’oeuvre éternel, “Heaven Up Here”, en 1981. La voix plaintive de McCulloch, couplée à la guitare scintillan­te de Will Sergeant, seuls rescapés de l’aventure commencée en 1978, n’offrira ce soir qu’un très pâle inventaire de ce que ce groupe avait pourtant d’incomparab­le. Certes, les fans auront eu leur playlist de rêve — tout y était — mais à quel prix ! Une question se pose : McCulloch est-il encore des nôtres ? Présence fantomatiq­ue, voix sans relief, son inutilemen­t rock. Seul Sergeant suscite l’éloge : il tient la baraque — une ruine. ALEXANDRE BRETON

Yard Act 05 AVRIL, CABARET SAUVAGE (PARIS)

Sous un chapiteau à guichets fermés, le groupe confirme sa mue, délaissant le post-punk de “The Overload” pour un étonnant mélange d’indie, de disco et de hip-hop sur le récent “Where’s My Utopia ?”. La présence de deux choristes, cavalant d’un bout à l’autre de la scène quand elles ne sont pas derrière leurs micros, confirme l’envie des Loiners de faire de ce concert une véritable fête. En parfait entertaine­r, James Smith harangue les premiers rangs sur la bondissant­e et fort à propos “We Make Hits”. Une roue de la fortune est même amenée sur scène afin de déterminer l’unique titre du premier EP qui sera joué ce soir : il s’agira de “Dark Days”. Enfin, les amateurs du Yard Act

première formule ne sont pas oubliés quand l’émouvante “100% Endurance”, menée par la basse impeccable de Ryan Needham, est entamée au cours du rappel. DIMITRI NEAUX

Johnny Mafia 05 AVRIL, MAROQUINER­IE (PARIS)

La salle de Ménilmonta­nt, qui affiche complet ce soir, est déjà bien remplie lorsque Gurl se présente. Le juvénile trio de la bonne ville de Saint-Maur-desFossés, bassiste solaire et batteur en sweat à capuche Volcom, déploie un garage rock accrocheur (“Silly Dreams”) avec en prime une reprise débraillée de “Boys Don’t Cry”. Un peu plus tard, Johnny Mafia monte sur les planches alors que résonne la “Lambada” (!). Dès les premiers accords de “Sting”, la fosse se lance dans un gigantesqu­e pogo parsemé de joyeux slams, qui se poursuivra tout au long d’une euphorisan­te série de tubes (“Trevor Philippe”, “Sun 41”, “I’m Sentimenta­l”, “Black Shoes”), relecture à haute énergie de l’art des Pixies. Un triomphe pour nos canailles sénonaises, qui pose cette importante question : et si nous tenions là le groupe génération­nel de cette fourmillan­te scène tricolore ? JONATHAN WITT

And Also The Trees 06 AVRIL, TRABENDO (PARIS)

Sur le papier, difficile de concilier cette salle biscornue avec le lyrisme profond, intense et flamboyant des compositio­ns de ce groupe dont les quatre décennies d’activité n’ont guère entamé la créativité, au contraire ! Parole d’aficionado — ils étaient légion ce soir —, ce concert fera date : la cohésion du groupe, son degré d’intensité, la qualité du son. Le groupe des frères Jones y atteignit régulièrem­ent des sommets de beauté presque effrayante, quittant au bout de trois morceaux leur dernier (splendide) “Mother-Of-Pearl Moon” pour gratifier le public du meilleur des précédents, dont les intemporel­s “Virus Meadow”, “Shantell”, “A Room Lives In Lucy”, le rare “The Suffering Of The Stream” ou, en finale, une version sidérante de “Slow Pulse Boy”. Comme quoi, la beauté n’a pas une place — elle l’a toute. ALEXANDRE BRETON

Dye Crap/ Karkara 06 AVRIL, MéCANIQUE ONDULATOIR­E (PARIS)

Quel plaisir de retrouver les murs suintants de la fameuse cave parisienne ! Premiers de cordée, les quatre rouennais de Dye Crap font gigoter l’audience avec un skate punk roublard aux refrains fédérateur­s — on pense à Together Pangea — comme sur “Good Days Again”, “Stifler” ou l’hymne “Serj”, à la gloire du bassiste cagoulé (de rose, ce soir). Changement d’ambiance avec Karkara. Des écrans cathodique­s grésillant­s entourent le power trio toulousain qui agrémente la formule Thee Oh Sees de fragrances orientales. On reste marqué par l’obsédante mélodie d’“Anthropia” et la fureur d’“All Is Dust”, qui évoque Slift. Pour “Proxima Centaury” en rappel, le brillant guitariste Karim Rihani abandonne sa pédale wah-wah et empoigne carrément un didjeridoo, avant une frénétique “Camel Rider” en clôture. JONATHAN WITT

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