Secrets d'Histoire

Quai d'Orsay, le ministère de la diplomatie

On dit Matignon pour désigner la résidence du Premier ministre, place Beauvau pour le ministère de l’Intérieur, Bercy pour celui des Finances… Mais pour les Affaires étrangères, l’hôtel situé au 37 quai d’Orsay présente une particular­ité : ce fut le premi

- Par Dominique Le Brun

Sous la monarchie de Juillet en 1844, le ministre des Affaires étrangères de Louis-Philippe 1er, « roi des Français », s’appelle François Guizot. À cet homme austère, la France doit la loi de 1833, mise en place lors de son passage à l’Instructio­n publique, et qui instaure l’école primaire. Quant à l’Europe, elle lui doit tout simplement la paix. En effet, dès sa nomination aux Affaires étrangères en 1840, Guizot devient l’artisan d’une politique subtile qui parvient à empêcher un conflit avec le RoyaumeUni : ce qu’on appellera « l’Entente cordiale ». Ce sont peut-être les réceptions superbes dont on lui a fait honneur à Londres qui l’amènent à son- ger qu’un édifice public destiné à abriter l’activité diplomatiq­ue servirait efficaceme­nt la politique étrangère de la France. D’où la nécessité d’édifier ce lieu au coeur de la vie publique. Retards de chantier Depuis 1827, l’État est propriétai­re du palais Bourbon où siège la Chambre. Et en 1843, il a acquis l’hôtel de Lassay voisin, pour en faire la résidence du président de la Chambre. C’est dans l’espace disponible entre cet hôtel et l’esplanade des Invalides que sera édifié le nouveau ministère des Affaires étrangères. Lancé en 1844, le chantier s’interrompt lorsque la révolution de 1848 chasse Louis-Philippe et avec lui le ministre. Les travaux reprennent sous Napoléon III, pour durer jusqu’en 1856. À l’époque, face au ministère, sur la rive droite de la Seine, s’étendent les jardins qui constituen­t le bas des Champs-Élysées : le Carré Marigny. À droite se succèdent la place de la Concorde et le jardin des Tuileries que le palais des Tuileries sépare du Louvre. Dans le même temps, un grand projet est décidé : la tenue à Paris, en 1855, de la première Exposition universell­e française. Aussi, une fois inauguré, le ministère des Affaires étrangères a pour vis-à-vis le palais de l’Industrie. Ce dernier se trouve sur l’actuel

emplacemen­t du Grand et du Petit Palais, tandis que le pont Alexandre III n’existe pas encore : cet ensemble sera construit pour l’Exposition universell­e de 1900. En tant que lieu destiné à afficher la grandeur de la France dans le cadre de la diplomatie internatio­nale, l’hôtel du ministre des Affaires étrangères bénéficie d’une décoration et d’aménagemen­ts imposants. On y retrouve l’influence de Napoléon III, et l’éclectisme du style Second Empire et dont l’Opéra Garnier représente le plus typique des avatars. On ne s’étonnera donc pas d’y voir réunis des éléments architectu­raux disparates dont l’inspiratio­n fait appel à l’Antiquité, la Renaissanc­e et l’époque classique !

Premiers moments historique­s

Les aménagemen­ts de la partie résidentie­lle du Quai d’Orsay connaissen­t des adaptation­s. En 1938, George VI et Elizabeth, les souverains britanniqu­es, bénéficien­t de salles de bains Art déco. À peine inauguré, le ministère des Affaires étrangères connaît ses premiers moments historique­s puisqu’au printemps 1856 y est négocié le Traité de Paris qui, met fin à la guerre de Crimée, mais décrète le principe de la liberté de navigation dans les détroits maritimes, et l’interdicti­on de la guerre de course. C’est en ces lieux que s’élabore le Traité de Versailles de 1919. Et le salon de l’Horloge entretient le souvenir de Robert Schuman qui, le 9 mai 1950, prononce la déclaratio­n considérée comme l’acte fondateur de l’Union européenne.

Un édifice public destiné à abriter l’activité diplomatiq­ue servirait efficaceme­nt la politique étrangère de la France.

 ??  ?? La première pierre du Quai d’Orsay a été posée en 1844 à l’initiative de François Guizot, ministre des Affaires étrangères de l’époque.
La première pierre du Quai d’Orsay a été posée en 1844 à l’initiative de François Guizot, ministre des Affaires étrangères de l’époque.
 ??  ?? Au rez-dechaussée, le bureau du ministre des Affaires étrangères. L’architecte Jacques Lacornée (1779-1856) a prévu d’entourer ce bureau de salles d’attente, de pièces de réception et d’une salle à manger.
Au rez-dechaussée, le bureau du ministre des Affaires étrangères. L’architecte Jacques Lacornée (1779-1856) a prévu d’entourer ce bureau de salles d’attente, de pièces de réception et d’une salle à manger.

Newspapers in French

Newspapers from France