Secrets d'Histoire

Élisabeth, la terrible rivale

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La plus éprouvante de toutes les batailles livrées, au cours de sa vie, par Marie Stuart est celle qui l’a opposée à sa parente Élisabeth Ire. Indomptabl­e, la reine d'Écosse a refusé de plier devant la reine d'Angleterre qui voulait la soumettre. Elle l'a payé au prix fort.

Par sa grand-mère Marguerite Tudor, soeur d’Henry VIII, Marie Stuart est cousine au second degré avec la reine Élisabeth Tudor. Par sa mère Marie de Lorraine, elle est également issue de la famille française des Guise, porte-drapeau des catholique­s. De plus, par son mariage avec François II, elle a été, le temps d’une année, reine de France. Ce double attachemen­t au catholicis­me (alors qu’Élisabeth est anglicane), et à la France (ennemie jurée de l’Angleterre) ne peut que dresser l’une contre l’autre les deux femmes. L‘ambition de Marie fait le reste.

Droit divin contre droit du sang

Marie Stuart est une reine de l’Ancien Régime: elle est pénétrée de l’idée de l'essence divine de sa couronne écossaise. Tout comme elle est certaine d'être légitime en revendiqua­nt des droits sur la couronne d’Angleterre. À la mort de la reine Marie Tudor, elle réclame, maladroite­ment, cet héritage. Pour les catholique­s en effet, Élisabeth Ire qui a succédé à sa demisoeur est une bâtarde, qui usurpe le trône d’Angleterre : le pape n’a pas autorisé l’union

de ses parents, Henry VIII et Anne Boleyn. Dès lors, Élisabeth d'Angleterre et Marie d'Écosse ne cessent de s'affronter. La première entend qu'on lui fasse allégeance ; la seconde exige la reconnaiss­ance de ses droits sur le trône anglais. Leur correspond­ance, sous couvert d’amabilités, témoigne de relations qui ne cessent de se dégrader. D’ailleurs, elles ne se sont jamais rencontrée­s !

Trahie par son demi-frère

Pour les rallier à sa cause, Élisabeth Ire achète à prix d’or le soutien des grands lords d’Écosse. À commencer par le plus proche conseiller de Marie Stuart, son demi-frère illégitime, lord James Stuart, comte de Murray. Il va jouer un rôle capital dans la chute de la reine d’Écosse. C’est lui qui la retient prisonnièr­e au château de Loch Leven, dans les environs de Perth. Lui aussi qui prend la régence pour le compte du jeune roi Jacques VI. Sauf qu’on ne retient pas longtemps derrière des grilles une telle femme : elle fait la conquête du fils de sa geôlière et, grâce à son aide, elle s'évade et parvient à rassembler 6 000 partisans pour former une armée. Le 13 mai 1568 à Langside, près de Glasgow, lord James Stuart leur livre bataille et en sort vainqueur. Contrainte à l’exil, Marie Stuart choisit, curieuseme­nt, l’Angleterre comme terre d’accueil.

Conspirati­on élisabétha­ine

Pourquoi ? Parce qu’Élisabeth Ire a promis qu’elle l’aiderait. Pourtant, dès son arrivée sur le sol anglais, le 16 mai 1568, Marie Stuart est assignée à résidence. Une commission d’enquête la reconnaît coupable du meurtre de son second mari : sa détention va durer plus de dix-huit années. Une éternité. Certes, à Bolton, Chatsworth, Sheffield, ou Tutbury, comme partout où elle est incarcérée, la cage est dorée. Elle vit entourée de serviteurs, reçoit ses visiteurs sous un dais royal, organise des réceptions. Rien qui ne la console de la perte de son trône. Alors, elle complote, chaque heure de chaque jour. Avec l’Espagne. Avec la France. Avec des Écossais ou des Anglais qu’elle gagne à sa cause, usant de séduction. Les échecs se répètent, sans la décourager. Finalement, des lettres adressées à ses partisans sont intercepté­es. Elles sont codées mais on y déchiffre un plan d’invasion de l’Angleterre par l’Espagne, qui prévoit aussi l’assassinat d’Élisabeth Ire et le sacre de Marie Stuart. En réalité, c’est un piège tendu par les espions élisabetha­ins pour la mettre hors jeu. Reconnue coupable de conspirati­on contre la reine, Marie Stuart est décapitée, le 8 février 1587, devant 300 personnes : elle a demandé une exécution publique. Une croix d’ivoire à la main, elle a montré un courage et une dignité qui ont contribué à écrire sa légende.

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Le château de Bolton, où fut détenue Marie Stuart après sa défaite à Langside, en 1568.
 ??  ?? 7 février 1587 – Marie Stuart recevant sa sentence de mort que vient de ratifier le Parlement (1808), de Jean-Baptiste Vermay ; musée des Châteaux de Malmaison et de Bois-Préau (Hauts-de-Seine).
7 février 1587 – Marie Stuart recevant sa sentence de mort que vient de ratifier le Parlement (1808), de Jean-Baptiste Vermay ; musée des Châteaux de Malmaison et de Bois-Préau (Hauts-de-Seine).
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 ??  ?? 8 février 1587 – Marie Stuart au moment où l'on vient la chercher pour aller à la mort (xixe siècle), de Philippe Jacques van Bree ; musée des Beaux-Arts, à Tourcoing.
8 février 1587 – Marie Stuart au moment où l'on vient la chercher pour aller à la mort (xixe siècle), de Philippe Jacques van Bree ; musée des Beaux-Arts, à Tourcoing.
 ??  ?? 15 janvier 1559 – Élisabeth Ire lors de son couronneme­nt (1600), anonyme; National Portrait Gallery, à Londres.
15 janvier 1559 – Élisabeth Ire lors de son couronneme­nt (1600), anonyme; National Portrait Gallery, à Londres.

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