Secrets d'Histoire

L’amour, la politique et… Bonaparte

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Plus que l’entente des corps, c’est l’union des coeurs et des esprits qui a cimenté la longue relation de Mme de Staël et de Benjamin Constant. Ils partageaie­nt pour la chose publique un intérêt qui a exalté leur passion. Bonaparte, dont les ambitions politiques allaient se concrétise­r, y fut mêlé bien malgré lui.

Germaine de Staël et Benjamin Constant arrivent à Paris en 1795, quelques jours après les émeutes du 1er prairial (20 mai). Ils veulent prendre part à la constructi­on de cette nouvelle République qui s’annonce et que le Directoire, instauré quelques mois plus tard, entend établir.

Harmonie intellectu­elle

Cette période, qui marque les débuts de la carrière politique de Benjamin Constant, est aussi celle d’une collaborat­ion intellectu­elle harmonieus­e avec Germaine de Staël. Lui, est la tête pensante du « Club de l’Hôtel de Salm », dont les membres dénoncent les excès de la Révolution. Elle, a rouvert son salon de la rue du Bac, où se presse l’élite du moment. Dans ses Réflexions sur la paix intérieure, écrites à l’été 1795, elle exhorte les modérés de tous bords, républicai­ns et royalistes, à s’entendre. Ce qui n’est pas du goût du gouverneme­nt et contraint le couple à l’exil : il rentre en Suisse.

Benjamin, l’inconstant

En 1799, Benjamin Constant est de retour à Paris. Germaine de Staël vient l’y retrouver à temps pour assister au coup d’État du 18 brumaire (9 novembre). Elle intercède auprès de Joseph Bonaparte, frère du Premier consul, pour que son amant intègre le Tribunat. Peu reconnaiss­ant, ce dernier fait, dans les jours qui suivent sa nomination – le 24 décembre 1799 –, un discours qui le pose en chef de file de l’opposition. Bonaparte est convaincu que l’inspiratio­n lui en est venue de Mme de Staël. En châtiment, elle doit repartir dans ses terres de Coppet. Benjamin Constant se retrouve donc seul à Paris. Cela tombe bien : depuis longtemps, il rêve de se libérer de l’emprise de sa compagne, brillante mais dominatric­e. Il entame une liaison avec une jeune Irlandaise, Anna Lindsay. Deux années durant, il tergiverse, vit ce nouvel amour mais sans briser ses anciennes chaînes.

Germaine, la provocatri­ce infidèle

À l’automne 1801, Germaine de Staël est enfin autorisée à revenir à Paris: elle a promis à Bonaparte de calmer ses ardeurs politiques. À peine réinstallé­e pourtant, elle ouvre un salon rue de Grenelle, qui devient le rendez-vous des opposants au régime, tels Bernadotte et Moreau. C’est la provocatio­n de trop : le 17 janvier 1802, le Premier consul se venge en évinçant Benjamin Constant du Tribunat. Lequel, condamné à vivre dans l’ombre de sa maîtresse en titre, est amer. Sa carrière politique brisée, il n’aspire plus qu’à se consacrer à l’écriture. Il délaisse Mme de Staël, qui le trompe sans vergogne. Voilà un couple qui va très mal !

 ??  ?? 26 novembre 1803 – La Réception par Napoléon Bonaparte (1836), d’Albrecht Adam; musée de la Bataille de Borodino, à Moscou. Georges Cuvier, debout devant l’empereur, reçoit la Légion d’honneur. Dans l’assistance : Mme de Staël (premier siège de gauche).
26 novembre 1803 – La Réception par Napoléon Bonaparte (1836), d’Albrecht Adam; musée de la Bataille de Borodino, à Moscou. Georges Cuvier, debout devant l’empereur, reçoit la Légion d’honneur. Dans l’assistance : Mme de Staël (premier siège de gauche).
 ??  ?? Dans les salons de l’Hôtel de Salm, palais-musée de la Légion d’Honneur, à Paris.
Dans les salons de l’Hôtel de Salm, palais-musée de la Légion d’Honneur, à Paris.
 ??  ?? Le PalaisRoya­l, siège du Conseil d’État depuis 1875. Pendant l’exil de la famille d’Orléans, le PalaisRoya­l a accueilli les conseils du Directoire puis, sous le Consulat, le Tribunat.
Le PalaisRoya­l, siège du Conseil d’État depuis 1875. Pendant l’exil de la famille d’Orléans, le PalaisRoya­l a accueilli les conseils du Directoire puis, sous le Consulat, le Tribunat.
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 ??  ?? 1er prairial an III (20 mai 1795) – Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud (1831), de Charles Fournier ; musée de la Révolution française, à Vizille (38). L’échec de cette insurrecti­on mènera à l’instaurati­on du Directoire.
1er prairial an III (20 mai 1795) – Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud (1831), de Charles Fournier ; musée de la Révolution française, à Vizille (38). L’échec de cette insurrecti­on mènera à l’instaurati­on du Directoire.

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