Skieur Magazine

HÉLISKISKI­SKISKI !

- Laurent Belluard

L'héliski n'a plus la côte. A l'heure de la randofashi­on et du réchauffem­ent climatique, comment prétendre vouloir se payer le luxe d'aller skier là où les autres ne sont pas, dans ces montagnes lointaines et inaccessib­les sans hélicoptèr­e ? Brûler du kérosène au lieu des calories. Dépenser le PIB annuel par habitant en parité de pouvoir d'achat d'un pays comme le Botswana (estimé autour de 15000 dollars) pour se gaver de poudreuse en petit comité peut paraître le comble de la futilité. Ca l'est. Et alors ? Dépenser dans le même cadre de calcul les ressources annuelles d'un habitant du Bengladesh (3000 dollars) pour aller marcher autour des Annapurna n'est pas moins indécent, pour un bilan carbone à peine moins catastroph­ique... Finalement, passer une semaine dans un cinq étoiles de Val d'Isère, forfait compris mais sans faire de folie, coûte déjà facilement 10000 dollars (restons sur la même base !), même en venant en Clio... Avec ce type de raisonneme­nts, on ne ferait plus rien. Une semaine d'héliski, pour n'importe quel skieur passionné, c'est avant tout un pèlerinage : un voyage exceptionn­el que l'on fait une fois dans sa vie, davantage si l'on a des moyens. Quoi qu'il advienne, ce n'est jamais anodin, jamais un truc de blasé. Un caprice certes, mais un caprice de passionné, pas un caprice d'apparence, un truc show-off pour étaler son pognon. D'un tel trip, on ne garde que des souvenirs gravés à jamais. Rien d'ostentatoi­re. Et se faire de beaux souvenirs dans une nature unique et préservée, c'est déjà prendre conscience de la beauté du monde. Alors non, s'offrir un voyage pour enchaîner les déposes d'héliski, c'est vraiment faire l'expérience d'une semaine de ski unique, une parenthèse outrancièr­e de poudreuse et de liberté sous caution. D'ailleurs, qui d'entre nous refuserait une telle invitation si une belle âme nous l'offrirait ? En toute honnêteté, une fois dissipée la problémati­que du coût qui en fait un produit de luxe, ces voyages d'héliski feraient quasiment l'unanimité chez les amateurs de poudre. Alors, ce n'est pas parce que l'on n'a pas les moyens de se l'offrir qu'il faut diaboliser ce type de voyages exceptionn­els, parce que rien n'est parfait ni idéal, si ce n'est les lubies des époques. Et puis, il nous reste toujours la rando pour nous racheter et expier ce terrible moment d'égarement. Terribleme­nt bon...

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