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Interview star Malang Sarr

“Ce n’est jamais bon d’être enfermé à 100% dans un domaine”

- PROPOS RECUEILLIS PAR ANDREA CHAZY ET JULIEN DUEZ, À NICE. PHOTOS: PANORAMIC

Du haut de ses 20 ans, Malang Sarr a la lourde charge de tenir l'axe central de la défense de l'OGC Nice, son club formateur. Entretien 100 % niçois.

“Le poste de défenseur demande beaucoup plus de rigueur que celui d’attaquant, où l’on est plus libre, moins en danger.”

Du haut de ses 20 ans, Malang Sarr a la lourde charge de tenir l’axe central de la défense de l’OGC Nice. Un défi qui n’effraie pas le pitchoun, trop heureux de porter le maillot du club de sa ville. Entretien 100 % niçois. Tu es né à Nice et tu as intégré le Gym à l’âge de six ans. Qu’est-ce que cet environnem­ent représente pour toi?

Évoluer dans le club de la ville où tu as grandi et porter le maillot du club que tu supportes, c’est le rêve de tout joueur. C’est idéal pour vivre et s’épanouir. Quand j’étais petit, j’habitais dans la Cité des Moulins et je voyais le centre d’entraîneme­nt depuis ma fenêtre. C’était une source de motivation supplément­aire pour réaliser mon rêve de devenir profession­nel à l’OGC Nice.

À l’époque, les matchs se jouaient au stade du Ray. Tu te souviens de la première rencontre à laquelle tu as assisté?

Je dois avouer que non, mais je me rappelle en revanche qu’à dix ou onze ans, on avait la possibilit­é de jouer des petits matchs contre d’autres équipes de la ville, en lever de rideau des profession­nels. Cela reste un excellent souvenir.

Il y a des Aiglons qui ont marqué ton enfance?

Je pense à José Cobos et à Didier Digard, des capitaines qui ont marqué l’histoire du club. Aujourd’hui, c’est à mon tour de m’inspirer de ces anciens et d’inspirer les futures génération­s.

Quand tu étais petit, tu cachais à ta mère que tu allais jouer avec les grands de ta cité pour élever ton niveau. C’était quoi, l’enfance de Malang Sarr?

C’était une période heureuse, de laquelle je garde de bons souvenirs du temps passé à jouer au foot dehors. Au début, c’était avec mes amis au pied de mon immeuble et petit à petit, les grands ont voulu m’avoir dans leur équipe. Cela m’a mené à désobéir un peu à ma mère, qui voulait pouvoir me voir depuis la fenêtre, mais mine de rien, c’est une expérience qui te forge et te fait grandir.

Tu mettais déjà des stops aux grands?

(Rires.) Non, j’étais attaquant, le profil du tueur qui marque des buts! Cela a duré jusqu’à mes quatorze ans, puis le passage du petit au grand terrain m’a fait progressiv­ement reculer. Un jour, il y avait une pénurie de défenseurs, et les coachs m’ont testé en latéral gauche. J’ai fait une bonne performanc­e et ils ont vu mes qualités à ce poste, avant de me replacer dans l’axe. D’abord lors de matchs amicaux, puis au fur et à mesure, sur le long terme. Il a fallu bosser et rester sérieux pour s’adapter. Et surtout en respectant ce que l’on me demandait. Le poste de défenseur demande beaucoup plus de rigueur que celui d’attaquant, où l’on est plus libre, moins en danger qu’en défense où l’on est le dernier rempart.

La rigueur, c’est quelque chose que tu avais déjà en toi?

Oui. J’avais un objectif, celui de devenir profession­nel, et il fallait que je sois cohérent avec moi-même pour y parvenir.

“Ce n’est jamais bon d’être enfermé à 100 % dans un domaine, que ce soit le foot ou les révisions. Il faut avoir une échappatoi­re.”

En parallèle, ta maman te mettait la pression pour avoir le bac. Elle voulait que ce soit ton objectif principal.

C’est vrai que le football était un objectif, mais je n’avais aucune assurance que ça marche. Pour ma mère, c’était donc important d’également réussir mes études. Je m’en suis aussi rendu compte au cas où je ne réalise pas mon rêve, il me fallait une autre solution pour réussir.

Tu avais réfléchi à un plan B? À l’école, tu as rapidement donné l’image d’un petit surdoué, qui saute le CE2 et passe le bac avec un an d’avance.

Pas vraiment. L’objectif, c’était d’avoir mon bac pour avoir une sécurité au cas où ça ne marche pas avec le foot, je n’avais pas pensé à faire des études supérieure­s.

Pourtant, tu intègres les sélections de jeunes dès les U15, avant de franchir tous les paliers jusqu’aux espoirs. Il y avait de quoi être optimiste.

C’est sûr que je me disais déjà que ça pouvait marcher. Mais l’expérience m’a montré que les joueurs de talent, qui avaient les capacités pour passer pro, ne le sont finalement pas devenus. C’est le football qui est comme ça. Après, je trouvais ça bien d’avoir quelque chose à côté. Ce n’est jamais bon d’être enfermé à 100 % dans un domaine, que ce soit le foot ou les révisions. Il faut avoir une échappatoi­re, quelque chose dans lequel s’épanouir, ça fait du bien à la tête. Cela permet de prendre du recul et de mieux apprécier ce que l’on fait.

On sent que tu es quelqu’un qui garde la tête froide et dégage déjà une certaine maturité, malgré tes 19 ans. C’est quelque chose que tu avais instinctiv­ement en toi ou qui s’est développé au fil des années?

Cela vient de mes parents, mais je ne l’avais pas forcément en étant petit. C’est l’expérience qui m’a forgé. Dans la vie, il y a des choses qui nous font avancer, qui ne nous font pas forcément du bien sur le moment, mais qui finissent par nous servir de leçon et nous rendent plus fort.

Tu penses notamment au décès de ton papa, quand tu avais quatorze ans?

Voilà, exactement.

Aujourd’hui, tu es engagé au travers d’une associatio­n avec les jeunes de ton quartier, en leur proposant notamment un accès à la culture. C’est une manière de renvoyer l’ascenseur à ceux qui ont veillé sur toi dans les moments difficiles?

Tout à fait. Je suis content d’avoir la possibilit­é de le faire et je le fais avec plaisir. J’aime l’idée de pouvoir rendre la pareille et de montrer aux enfants ce qu’ils n’auraient pas forcément l’habitude de voir au quotidien, comme des pièces de théâtre par exemple.

Tu te débrouille­s bien en théâtre?

Ouais! On a d’ailleurs eu des cours au centre de formation. Et au collège, j’ai joué dans quelques pièces, notamment Les Fourberies de Scapin.

Qu’est-ce que la date du 14 août 2016 signifie pour toi?

C’est mon premier match profession­nel en Ligue 1, celui aussi où j’ai marqué mon seul but à ce jour avec le Gym. Cela reste le plus beau jour de ma vie. J’ai même fait une capture d’écran de l’alerte but après, tellement je n’y croyais pas. (Rires.)

Symbolique­ment, c’est fort, car le contexte du moment était difficile.

En effet. C’était le premier match à l’Allianz Riviera depuis les attentats du 14 juillet. C’était un moyen, non pas pour oublier, mais pour soulager le coeur des Niçois et leur donner un peu de plaisir. C’est d’ailleurs à eux que j’ai dédié mon but. C’était important pour moi, en tant qu’enfant de la ville de Nice.

Lors de cette première saison chez les pros, tu es, à la trêve hivernale, le joueur de moins de 20 ans le plus utilisé de tous les championna­ts du Big 5. C’est quelque chose auquel on est préparés?

Tout dépend de la manière dont fonctionne le club dans lequel tu évolues. À Nice, la pression n’est pas la même qu’à Manchester City. On n’est pas forcément préparé à jouer autant, mais il faut malgré tout s’y attendre.

On se souvient d’ailleurs que tu étais déçu lorsqu’en deuxième partie de saison, Lucien Favre ne t’a pas retenu pour un déplacemen­t à Rennes, en invoquant la nécessité de te reposer mentalemen­t.

Sur le moment, ça m’a fait mal de sortir de l’équipe parce qu’on sortait d’une bonne première partie de saison, mais je me suis très vite repris en me disant qu’il fallait continuer à travailler et corriger certains points. Après coup, cela m’a permis d’avancer.

Quelle image tu retiens de Favre, l’homme qui t’a lancé dans le grand bain des pros?

C’est quelqu’un qui sait de quoi il parle, un vrai passionné. J’ai vraiment de la chance d’avoir pu bosser avec lui en commençant ma carrière. Je retiendrai avant tout la première discussion que l’on a eue ensemble. Il était passé au centre et m’a dit: “Peu importe l’âge que vous avez, si vous êtes bon, vous jouerez.”

Il te vouvoyait déjà!

Oui, à l’époque. (Rires.) Quand il m’a dit ça, j’ai eu envie de tout casser et de montrer pourquoi j’étais là, de prouver que j’avais ma place en équipe première.

En défense centrale, ton partenaire s’appelle Dante. C’est un autre modèle dans ton parcours?

Mes partenaire­ss en général m’ont aidé à progresser et à avancer. Je les remercie d’ailleurs, car cee n’est pas dans toutes les équipes qu’un jeuneeune est accueilli comme je l’ai été.

Malgré ton jeune e âge, tu as vécu déjà beaucoup de choses. De quoi tu rêves aujourd’hui pendantdan­t la nuit?

Déjà, de continueru­er à avoir du temps de jeu et à progresser. Après, on ne saitit jamais ce que l’avenir nous réserve. serve.

Tu pourrais faire toute ta carrière à Nice et devenir une sorte de Tottiti du Gym?

(Rires.) J’y ai déjàjà pensé, ce n’est pas impossible. possible. En tout cas, ce seraitait quelque chose de beau. Même si la différence­érence principale avec Totti, c’est qu’il est beaucoupea­ucoup plus fort que moi et qu’il marquait des buts.

Il faut marquer deses buts pour être fort?

En tout cas, pourur donner du plaisir aux gens, il faut êtree bon à son poste. Et pour un défenseur, çaa veut dire qu’il faut bien défendre.

“Pour donner du plaisir aux gens, il faut être bon à son poste. Et pour un défenseur, ça veut dire qu’il faut bien défendre.”

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Ça sent bon, l'adoucissan­t.
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Selon la VAR, là, c'est main.

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