So Foot

Mais qu’est-ce qu’ils footent?

- RAPHAëL GAFTARNIK / PHOTO: I CONSPORT

éric Dewilder, de la porte des Bleus au standard d’un hôtel 3 étoiles.

Au commenceme­nt, il n’y avait rien. Ou pas grand-chose: deux palmiers défraîchis, une piscine vide à l’abandon et une bâtisse de quinze chambres à la décoration déprimée. Neuf ans après avoir repris La Fiancée du Pirate, un hôtel situé à Villefranc­he-sur-Mer, sur la Côte d’Azur, Éric Dewilder, l’ancien milieu de terrain, mesure le chemin parcouru. “On l’a racheté avec ma femme, en 2006, à une vieille dame qui ne s’en occupait plus. Il était pourri, il y avait tout à refaire. En plus, il n’avait pas d’étoile car elle ne voulait pas mettre de téléphone dans les chambres.” Quelques coups de pinceaux plus tard, l’établissem­ent affiche fièrement trois étoiles sur sa devanture. Ainsi qu’un flatteur “8,7 sur Booking, l’un des mieux notés du coin, et une deuxième place de la région sur TripAdviso­r”. Signe que la clientèle, à 70 % étrangère, est conquise. Un succès critique et commercial qui lui fait oublier cette armoire à trophée désespérém­ent vide, et le change de son statut de chat noir du foot français. Bloqué aux portes de l’équipe de France –“J’ai été olympique, et deux fois réserviste. À l’époque, ils présélecti­onnaient 23 joueurs et ils n’en gardaient que 16”–, Dewilder se retrouve souvent dans le bon club… au mauvais moment. En 1984-85, il pige pour l’OM, l’année où le club remonte en D1 et finit 17e. Il quitte le Sud pendant l’été pour Lens et ne connaît pas les débuts de l’ère Tapie, qui reprend les Phocéens au milieu de la saison suivante. Une malchance qui le poursuit lorsqu’il quitte Lens juste avant l’arrivée de Gervais Martel pour rejoindre Tigana et Cantona à Bordeaux, en 1988-89: “Tous les clubs français me voulaient. J’ai choisi Bordeaux car ça faisait huit ans de suite qu’ils étaient européens. Et l’année où moi j’y suis, on finit onzième. C’est quand même pas de ma faute!” Pas plus que l’éliminatio­n, la même année, en huitièmes de coupe de l’UEFA, face au Napoli de Maradona: “Thouvenel s’était choppé à l’aller avec Crippa qui était un sanguin. Donc dans le couloir, en Italie, ils s’en mettent une. Et puis sur le premier tacle, Thouvenel met coup de coude. Rouge, j’ai dû jouer milieu défensif et arrière droit en même temps pendant quatre-vingt-cinq minutes.” Passé derrière le standard de son hôtel après avoir raccroché en 1997, obtenu un diplôme de journalist­e, été consultant pour Canal+, tenté l’expérience d’entraîneur (Rouen, Poissy) et bossé dans la communicat­ion, celui qui est passé par neuf clubs français a gardé son tempéramen­t de joueur: “J’étais relayeur, un mix entre Sauzée et Toulalan. Un peu de Luis Fernandez aussi, pour les coups. J’ai marqué 30 buts, quand même, et je ne me laissais pas marcher sur les pieds. C’est pareil avec les clients. L’autre jour, un mec me dit ‘je suis déçu, la mer est loin’. Je lui réponds: ‘Si vous aviez bien lu notre site, vous auriez vu qu’on n’a pas les pieds dans l’eau, on est sur la moyenne corniche!’ Si c’est blanc c’est blanc, si c’est noir c’est noir.” Aujourd’hui, Éric et sa femme sont prêts à laisser la main: “Ça fait dix ans. On a triplé le chiffre d’affaires, on va faire une belle plus-value puis acheter une affaire un peu plus classe.” Vu ce qu’il se passe chaque fois que Dewilder met les voiles, c’est sans doute une très bonne nouvelle pour le futur repreneur.

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