So Foot

JAIME ROSALES

CINÉASTE BARCELONAI­S VIVANT À MADRID

- LR

“J’étais au Bernabéu le jour du 3-0, dans une tribune latérale. Je me souviens très bien que sur le premier de ses deux buts, au moment où il reçoit la balle, avance et arrive face à Ramos, le supporter à côté de moi crie: ‘Non, non, n’y va pas,

il va te manger!’ Bon, la vérité, c’est qu’il aurait passé n’importe qui sur cette action. Moi, ce que j’aime dans l’art, que ce soit le ciné, la musique ou la littératur­e, c’est le style. Quand je lis un livre, si cinquante pages me suffisent à comprendre le style, j’arrête là. Parce que c’est dans le style que je trouve la valeur, plus que dans le résultat final. Dans le foot, c’est la même chose. Ronaldinho avait un style, il ne jouait pas comme les autres. Il était effréné, à la manière d’un cheval surexcité, mais en gardant le contrôle de son corps et du ballon. C’est la différence avec un joueur comme Gareth Bale par exemple, qui déboule à toute vitesse, mais sans vraiment maîtriser le finish. C’est pareil au niveau collectif: le Real Madrid de Zidane emporte tout sur son passage, mais je ne lui trouve pas vraiment de style propre. Alors que le Barça de Guardiola était parfaiteme­nt reconnaiss­able. Pour revenir aux joueurs, Cristiano Ronaldo a le palmarès, les buts, mais il est plus difficile à définir. Ronaldinho avait quelque chose de Cruyff, de Ronaldo et de Maradona, mais je ne crois pas qu’il soit à leur niveau, du fait de sa trajectoir­e. On dit souvent que les cinéastes vivent dans le même immeuble, à la différence des écrivains. Il y aurait par exemple Cervantès et Shakespear­e dans une maison, Victor Hugo et James Joyce dans une autre. Si on fait une analogie, Ronaldinho n’habite pas dans la même maison que Maradona, Pelé, Cruyff, Zidane ou Messi. Mais c’est un voisin à eux.”–

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