So Foot

Laurent Nicollin.

Propulsé à la tête de Montpellie­r suite au décès de son père Louis, Laurent Nicollin, entré dans l’organigram­me du club en 2000, vit sa première saison en tant que président. Lui qui ne rêve rien tant que d’être seul dans une cabane au fin fond du Canada

- Propos recueillis par Victor Le Grand, à Montpellie­r / Photos: Renaud Bouchez pour So Foot et Panoramic

Pas facile de succéder à un père taille XXL que la France appelait par son surnom. C’est le défi qui se présente à Laurent Nicollin, propulsé à la tête de Montpellie­r suite au décès de ce bon vieux Loulou.

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Ça frappe à la porte du bureau de Laurent Nicollin, il donne l’autorisati­on d’entrer. “C’est urgent,

il cherche à vous joindre”, signale Katia Mourad, directrice de la communicat­ion du club, en lui remettant la copie papier d’un mail qui dit, en substance, que Nicolas Sarkozy a essayé de le contacter, sans succès, laissant même un message vocal sur l’un de ses deux smartphone­s –Nicollin n’écoute jamais son répondeur. Il compose alors le numéro indiqué sur ce courriel, tombe sur une voix féminine qui, après quelques politesses, lui passe l’ancien chef de l’État. Il souhaite le remercier pour son accueil deux jours plus tôt, le 23 septembre dernier, lors de la réception du PSG (0-0). “Nasser m’a appelé pour me dire que vous avez été super avec lui, et vous savez quoi? Si Nasser est content, je suis content. – Les gens qu’on aime, on essaie de les recevoir comme il faut, vous le savez bien.

Dans la foulée, Sarkozy lance une future invitation à déjeuner à Paris et prend des nouvelles de Colette Nicollin, mère de Laurent. –Il y a des hauts et des bas, mais mon frère vient d’avoir une petite fille, donc ça booste bien la maison, quoi. –Dites-lui bien mon amitié, et vous, vous savez bien que si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous pouvez compter sur moi.” Laurent, ému et presque mal à l’aise d’être l’objet d’autant d’attentions, enchaîne les remercieme­nts comme pour mieux en finir, avant de raccrocher.

Vous savez combien d’interviews vous avez données depuis le décès de votre père, en juin dernier? Je n’ai pas compté, mais pas mal. Les questions bateau sur mes “ambitions pour la saison à venir” me cassent un peu les couilles, mais je refuse rarement les interviews. Même

Télé-Loisirs est venu me voir pour me demander ce que je regardais à la télé. Je n’ai pas trop compris…

Vous regardez ou écoutez les émissions de foot? Seulement le Canal football club quand j’ai gagné la veille (rires). Sinon, en règle générale, je ne suis pas trop fan. C’est l’analyse de l’analyse de l’analyse… Ils s’autopignol­ent un peu tous. Bon, j’avoue: en bagnole, j’écoute RMC parce que j’adore Vincent Moscato, il me fait rire. Mais alors L’After… (Il souffle) Parfois, c’est pitoyable. Pitoyable! Je n’en veux pas aux gens qui appellent, peuchère, c’est leur jour de gloire, mais quand je les entends dire que “Nicollin devrait faire si, Der Zakarian ça”, je me dis: “Mais qui c’est, ce type, en fait?” Le pire, c’est que les journalist­es ou les animateurs les laissent dire n’importe quoi… Même L’Équipe, ma bible, quand ça bascule “Voici du football” avec les clashs dans le vestiaire, je n’aime pas. À un moment donné, tu as envie de dire à tout ce petit monde de mettre les mains dans le cambouis. La société de maintenant est comme ça, il faut donner son petit avis sur tout. C’est une course à l’échalote. Après, j’ai Instagram et Snapchat, attention. J’ai

“J’avoue: en bagnole, j’écoute RMC parce que j’adore Vincent Moscato, il me fait rire. Mais alors L’After… Parfois, c’est pitoyable. Pitoyable!”

des gosses ados, je n’ai pas envie de passer pour un ringard de père. C’est même moi qui ai poussé pour qu’on ait un compte Snapchat au club. On le dit pas ça, hein (rires).

Votre truc, c’est plus les bandes dessinées et les bouquins d’histoire. Ouais, l’histoire de France, surtout les périodes coloniales, le XVIe, le XVIIe siècle. Je devais avoir 14 ou 15 ans, on est partis avec mes parents au Canada et je suis tombé amoureux de ce pays. La première chose que j’ai remarquée, c’est que les gens parlaient français: “Merde, c’est bizarre, on est en Amérique du Nord, pourquoi ils ne parlent pas anglais?” Donc je me suis intéressé à ce continent, et je me suis rendu compte que pendant longtemps, la moitié des États-Unis était française, que Napoléon avait vendu la Louisiane aux Américains pour payer ses guerres, et qu’au XVIIIe siècle, on avait perdu le Québec face aux Anglais… Quelle éducation vous a donnée votre père? L’éducation? Il n’était pas là, il bossait la semaine, et le week-end il y avait les matchs. Pour l’école, ce genre de choses, c’est ma mère qui s’occupait de mon frère et moi. Après, même s’il était parfois vulgaire –comme moi–, il m’a appris la politesse. La politesse, c’est le respect des autres. Quand j’arrive à cinq heures du matin aux poubelles, je serre la main de tous mes employés. J’ai été éduqué à, déjà, dire bonjour.

Et du côté de votre mère? Mes grands-parents maternels sont d’ici, ils bossaient dans les champs, ils étaient communiste­s. C’était folklo les repas du dimanche midi, avec ma tante fonctionna­ire qui critiquait le patronat. Mon père se taisait et concluait: “Tu as raison Josiane, le patron est un gros con, mais tu le remerciera­s d’avoir embauché ton neveu, ta nièce, ton oncle et ton petit-cousin…” Elle était gênée: “Non, mais je ne parlais pas pour toi, Louis.” Le premier journal que j’ai lu de ma vie, quand j’allais chez mon oncle, c’est L’Humanité. Puis bon, quand tu as 16 ans et que tu vas balayer les rues du matin au soir pendant les vacances d’été avec des gars qui gagnent le smic… Ça m’a permis de m’ouvrir l’esprit, de rester ouvert sur les autres.

Vous avez joué toute votre jeunesse avec la troisième équipe du MHSC, jusqu’à la DH, où vous avez d’ailleurs côtoyé Bruno Carotti (1) et Jean-Christophe Rouvière ( 2). Vous jouiez à quel poste? Arrière droit. Je n’étais pas un joueur méchant mais il ne fallait pas trop me casser les couilles, je n’avais pas peur du tampon. J’étais appliqué, un joueur de club, quoi. J’ai arrêté à 19 ans sur un coup de tête car mes entraîneur­s, qui étaient des cons, voulaient démontrer leur autorité aux autres parents en ne faisant pas jouer le fils du patron… J’aurais pu continuer encore un peu mais bon, j’ai loupé mon bac deux fois, il fallait que je bosse car je voulais prendre un appart avec ma copine. J’ai demandé à mon père ce que je pouvais faire, il m’a dit de prendre une 4L un matin et d’être surveillan­t d’une équipe de douze personnes dans son entreprise. Mes meilleures années de boulot, une super école de la vie. J’ai fait ça deux ans avant de partir à l’armée.

C’était comment, le service militaire? Chiant. Je me suis retrouvé à côté de Lyon dans une compagnie de combat. Ça te coupe un peu dans l’élan de la vie de passer de cinq mille francs par mois à juste de quoi te payer des clopes. Je gérais des hommes, et là, je me suis retrouvé à me faire traiter de “couille de loup”, dehors en short, en plein de mois de février, à six heures du matin… On se faisait réveiller à la grenade à plâtre, dégoupillé­e dans les chambres. Le vendredi soir, c’était l’inspection: tu laissais un poil de cul dans la douche, tu restais le week-end! À un moment donné, j’avais envie de rentrer chez moi! On était en 1995, la moitié de l’effectif était partie pour s’engager comme casques bleus en Yougoslavi­e. Je disais à ma mère: “Faites-moi revenir car sinon je pars faire la guerre.” J’étais chauffeur, donc préposé à la mitrailleu­se, celle au-dessus des bagnoles: “En plus, le premier qui se fera déglinguer, c’est moi.” J’y suis resté un mois, et après j’ai réussi à revenir sur Montpellie­r. Tout seul.

Ce n’est pas trop compliqué, quand on est d’un caractère plutôt timide, d’être président? Tu sais, ça fait quinze ans que je suis au club, j’en ai côtoyé des présidents ou des entraîneur­s qui voulaient révolution­ner le football et qui sont partis aussi vite qu’ils sont arrivés. Pas besoin de crier fort et de taper sur la table pour se faire entendre. En tout cas, ce n’est pas mon truc. Peut-être qu’en vieillissa­nt, je deviendrai… (Il marque une pause) plus vieux, ça c’est sûr ; plus con, ça c’est certain. Mais j’espère pas trop con.

Comme il existerait une “grande famille du cinéma”, existe-t-il une “grande famille des présidents de club de foot” en France? Plus ou moins. À part

“À part deux ou trois présidents de club qui sont cons, je suis bien avec tout le monde. Vincent Labrune, j’ai été l’un des rares dirigeants invités à son mariage. Cet été, on a fait des bouffes ensemble avec les gosses”

deux ou trois qui sont cons, je suis bien avec tout le monde. Parfois, c’est moi qui suis un peu trop con: après un match, j’envoie un SMS au président adverse pour le féliciter de sa victoire, mais t’as pas de retour… À l’inverse, je suis par exemple très proche de Vincent Labrune, on est de la même génération, j’ai été l’un des rares dirigeants invités à son mariage. Cet été, on a fait des bouffes ensemble avec les gosses.

Votre père, lui, était assez proche de Bernard Tapie.

Quand j’étais plus jeune, Tapie téléphonai­t chez nous à deux heures du matin pour avoir mon père. C’est moi qui devais me lever pour décrocher. Il disait: “Putain, il n’est pas encore rentré?” Moi: “Il est peut-être allé faire la bamboula avec ma mère, j’en sais rien, mais là je dois aller dormir, j’ai école demain.” Tapie, c’est le genre de mec qui phosphorai­t la nuit, il faisait ça aussi avec ses entraîneur­s, ses joueurs…

Comment est née cette amitié entre votre père et Nasser Al-Khelaïfi, le président du PSG? Quand on a été champions de France, Nasser a été très classe en envoyant un message de félicitati­ons à mon père. Ensuite, ils se sont rencontrés ; Nasser nous a invités à manger avant un match et, naturellem­ent, s’est créée une amitié. Nasser, humainemen­t, c’est quelqu’un de bien. À l’enterremen­t de mon père, il est venu, au même titre que Nicolas Sarkozy. Quand ta mère te dit: “Il faut que tu rappelles le président, il veut te dire quelque chose” et que lui te dit: “Quoi qu’il arrive, je serai à la cérémonie”, ça touche. Le mec a sans doute autre chose à foutre que de venir à l’enterremen­t de Louis Nicollin.

Gérard Depardieu est venu, lui aussi? Non, il ne pouvait pas, il était en tournage en Russie ou je ne sais pas où… Gérard, c’est un passionné, un mec qui aime la vie, la bouffe, les femmes… Comme mon père, quoi. Je sais ce qu’il a fait pour ma mère quand mon père est décédé –que je garderai pour moi– et je ne l’oublierai jamais…

Votre père était rarement seul. Pour raconter des conneries, c’est mieux d’avoir une cour… Comme les rois de France avec leurs fous. C’était pas “touchez ma bosse, maître” non plus, mais comme il travaillai­t beaucoup, il aimait bien se retrouver avec deux-trois potes, parler de cul. Il n’y avait pas un repas où il ne disait pas “bite” ou “couilles”. C’était son échappatoi­re, pour déstresser.

Quand, à chaque 74e minute, le public rend hommage à votre père parce qu’il est décédé à 74 ans, ça vous fait quoi? Quand la Butte Paillade lance le clapping en criant “Loulou”, j’avoue que j’ai les larmes aux yeux. Je les aurai toujours, car je suis hypersensi­ble. Parfois, des trucs sordides je m’en fous, mais une musique, une image qui rappelle un beau souvenir, ça me fait chialer, putain.

C’était comment de partager son père avec toute une ville? Par moments, compliqué. Quand tu vas au stade, que tu dis “papa” et qu’il ne se retourne pas… Après, ça ne nous empêchait pas de nous voir le dimanche et d’avoir un lien fort, même si on n’est pas de grands expansifs dans la famille. Mis à part ma mère, qui avait un truc fabuleux: quand on revenait de l’école et qu’elle voulait nous signifier quelque chose qui n’allait pas, on avait des enveloppes à nos noms. Elle nous l’écrivait: “Mon chéri, je t’aime, mais…” Mon père a dû en avoir pas mal aussi, des enveloppes…

Votre père était complexé par son poids? Il disait qu’il s’en foutait, mais dans sa vie, il a dû perdre cinq cents kilos et en reprendre neuf cents… Il ne pouvait pas marcher normalemen­t, ne pouvait pas courir. Par moments, il ne devait pas être bien dans son corps… Comme moi il y a deuxtrois ans. J’ai arrêté les pâtes, le riz, le pain, les desserts et les laitages pour des légumes, du poisson et de la viande. En un an, j’ai perdu trente kilos. Depuis, j’en ai repris que dix, donc ça va…

La période de mercato, c’est pas l’enfer pour un président de club de football? Oui et non. C’est l’enfer parce que certains incompéten­ts te laissent pendant deux mois des messages pour que tu leur prennes huit joueurs par jour. Ils ne connaissen­t pas ton effectif… Cet été, un agent appelle Bruno Carotti et lui dit: “J’ai un super

joueur pour toi, numéro 6.” Bruno: “Ah ouais, lequel?” Le mec: “Jamel Saihi.” Bah Jamel, il est né à Montpellie­r, a été formé à la Paillade ; je le connais depuis tout petit, j’ai son portable, on s’appelle parfois… Si je veux le prendre, je n’ai pas besoin de ce type. Insupporta­ble!

Vous comprenez les critiques de Jean-Michel Aulas à l’égard du PSG et de son mercato? Déjà, Aulas, c’est un ami. Après, je comprends sans comprendre. Je comprends qu’il défende son club et qu’il se dise qu’il ne peut pas rivaliser avec le PSG, mais comme moi je ne peux pas rivaliser avec Lyon. Cet été, on était intéressés par le joueur d’Amiens Tanguy Ndombelé, mais l’OL a mis dix millions d’euros sur la table. Et je ne crie pas au loup! Quid des avantages fiscaux de Monaco? Personne n’en parle mais, personnell­ement, je trouve ça plus “dégueulass­e” que le recrutemen­t du PSG. Un joueur étranger qui vient à Monaco ne paie pas d’impôts, alors que quand Neymar touche trois millions d’euros par mois, l’État français récupère des sous… Si tu tapes sur Paris, tape sur Monaco, c’est tout ce que je dis.

Quel est le positionne­ment de Montpellie­r dans cette ligue 1 en pleine mutation? On regarde tout ça avec des yeux de Chimène. Il y a sept ou huit clubs avec lesquels on ne peut pas rivaliser financière­ment. Cet été, Rémy Cabella me passe un coup de téléphone et me dit: “Fraté, récupèremo­i, je ne veux pas rester sur le banc à Marseille.”

Je lui réponds: “OK, on va voir ce qu’on peut faire.” J’appelle son agent, ça se passe bien, mais il m’annonce le salaire: 220 000 euros par mois. Je veux bien faire un effort à 70, 80 000, avec des primes, des trucs, mais 220 000… Même quand on a été champions, je n’ai jamais donné à un joueur 220 000 balles. Ça me paraît surnaturel. Le truc que j’entends parfois de la bouche de certains supporters, c’est: “Où sont passés les sous?” Je suis le seul actionnair­e du club, je ne vais pas me prendre mes propres sous, c’est d’une débilité profonde… On nous reproche de ne pas avoir d’ambition, il faut que je dise quoi? “On va jouer l’Europe”? Si je fais ça, je suis une pipe. Mon ambition, c’est de pérenniser le club pendant dix ou vingt ans en ligue 1. Si demain on n’arrive plus à payer, c’est la merde. Alors ouais, ça ne fait pas rêver, mais tu sais quoi? Je m’en fous.

Si dans quelques années un milliardai­re étranger vient vous voir pour racheter le club, vous faites quoi? Je l’écouterai. Si c’est bon pour mon club, si ça peut lui permettre de rivaliser avec les meilleurs… Aujourd’hui, ça me mettrait un coup de partir, mais demain, qui sait? On n’est que de passage dans la vie.

Justement. C’est dans les moments compliqués de la vie, comme la mort de ses parents, qu’on voit qui sont ses véritables amis? Je n’ai pas attendu la mort de mon père, à 44 ans, pour savoir qui sont les gens sur qui on peut compter ou pas. J’ai un pote, mon meilleur ami, et c’est tout. On était à l’école ensemble, on jouait au foot. Ce n’est pas quelqu’un que je vois régulièrem­ent, mais demain, s’il a une merde, il pourra compter sur moi. Et inversemen­t. Globalemen­t, je ne suis pas quelqu’un qui ouvre la porte de chez

lui à n’importe qui. Il y a eu une période, après mon divorce, où je n’avais pas mes gosses et durant laquelle je ne supportais pas de rester à la maison. J’étais tout le temps dehors. Mais depuis un an, ça va mieux: j’ai une copine. Je suis donc très bien chez moi, j’ai même besoin d’y être seul car, de toute façon, je n’aime pas parler. Me mélanger avec le monde, ça me met la tête en compote. J’adore me réveiller, mettre ma musique à fond dans l’appartemen­t, me poser sur la terrasse au soleil avec le Midi libre, un thé ou un jus d’orange… Je m’autosuffis, je n’attends rien de l’être humain. Je sais que demain, si la société ou le club se casse la gueule, 80 % des personnes me tourneront le dos. L’être humain est ainsi fait: il va là où ça brille. Une pie, quoi. Comme j’ai toujours dit: je finirai seul comme un con dans une cabane au Canada. Un pays qui me convient bien: une certaine culture française avec un état d’esprit américain, dans cette manière de ne pas juger les gens et d’avancer.

On n’avance pas, en France? Il y a eu une élection en mai dernier. Je ne suis pas particuliè­rement Macron, mais le mec est président, il a les clés du camion, laissons-lui le temps. On veut déjà couper des têtes. On est dans un pays magnifique, sans doute le plus beau du monde, mais il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Parfois, c’est usant.

Vous avez voté Fillon au premier tour? Je suis quelqu’un de fidèle. Nicolas Sarkozy est –enfin était, malheureus­ement– ami avec mon père, j’ai donc voté pour lui au tour préliminai­re… Non, ça c’est le football! Bref, comme Fillon a gagné et que je suis de droite, j’ai voté pour lui au premier tour. Mais son entêtement à aller jusqu’au bout… Je me suis dit: “Mais c’est pas possible, il est fou, oh!”

C’est quoi, être de droite en 2017? C’est être attaché à certaines valeurs: l’ordre, la hiérarchie, le respect. J’ai par exemple un profond respect pour la police, même si ça doit être compliqué pour ceux qui se font contrôler vingt-cinq fois par jour. (Il marque une pause) Enfin, je suis de droite… Peut-être du centre-droit… À Montpellie­r, je votais Georges Frêche –encore un ami de mon père– par exemple, qui était au PS.

C’est pas un peu paradoxal? Comme beaucoup de Français, je vote pour un homme, pas pour un parti. Les soirs de victoire électorale, quand je vois des militants s’embrasser, se sauter dessus… Je trouve ça d’un ridicule profond! U2 est mon groupe préféré, mais tu ne me verras jamais leur demander un autographe ou attendre trois heures pour faire un selfie. Je suis toujours surpris de l’engouement que les gens peuvent avoir pour un artiste, un footballeu­r, un club…

Pourtant, quand on vous voit sur le banc de touche, vous êtes vraiment supporter… Ça n’a rien à voir: je suis président d’un club. Je me casse le cul toute la semaine à organiser le mieux possible les choses, alors ouais, je vis le truc. J’ai besoin d’être avec mes joueurs, de leur tapoter sur le cul quand ils rentrent… Avant les matchs, je vais boire un coup avec les présidents adverses, normal, mais rester en tribune avec eux, ça m’emmerde. Quand on perd le samedi, je rentre directemen­t chez moi, le dimanche je suis anéanti, le lundi bof et le mardi ça repart.

Cet été, dans Libération, vous disiez que vous avez toujours voulu mourir avant vos parents… (Il coupe) Toujours non, mais plus jeune, je voulais mourir avant mes parents pour ne pas avoir à souffrir. Depuis, j’ai donné la vie, j’ai fait la plus belle chose au monde. C’est différent.

Vous avez des regrets dans la vie? Quand je vois des ados partir deux ans bosser au Club Med en Australie pour apprendre une langue, c’est un truc que j’aurais aimé faire. Je ne l’ai pas fait parce que j’étais bien dans mon confort, dans l’entreprise de mon père. J’ai déjà eu envie de tout envoyer balader –après le divorce, notamment– mais je n’en ai jamais eu le courage. Peut-être que ça arrivera un jour, quand mes gosses seront plus grands. Pour le moment, je ne peux pas laisser ma mère…

Quand vous êtes seul, comment vous y prenez-vous pour faire le vide? J’ai une très bonne technique: aller faire ses courses à Casino. Je mets mes oreillette­s en ne pensant qu’à la bouffe que je dois acheter.

Vous avez fait les courses depuis la mort de votre père? Non, il faudrait que j’aille remplir un Caddie de fruits. Ça ne me ferait pas de mal… PAR VLG

1. Actuel directeur sportif du club. 2. Joueur ayant disputé le plus de rencontres de ligue 1 avec le MHSC.

“J’ai voté Fillon au premier tour mais son entêtement à aller jusqu’au bout… Je me suis dit: ‘Mais c’est pas possible, il est fou, oh!’”

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Mistral Gagnant.
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“Je peux pisser tranquille, oui?!”

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