Le mondial vu de prison
Ils n’ont pas fait la fête sur les Champs. Et pour cause, ils étaient derrière les barreaux…
Bobo a longtemps écoulé 20 kilos de haschich par semaine. C’était avant que la patrouille le rattrape et le condamne, en mai 1998, à une amende de trois millions de francs ainsi qu’à une peine de deux ans d’emprisonnement. Direction le centre pénitentiaire de Fresnes. “Mais ça ne m’a pas empêché de vivre la coupe du monde, comme tout le monde. À l’intérieur, il y avait une vraie effervescence”, sourit-il aujourd’hui. Dans la coursive du trafiquant, beaucoup utilisent alors l’argent que leur envoient leurs proches pour louer une petite télévision auprès des services de la prison. Les plus assidus n’hésitent pas non plus à “cantiner” L’Équipe ou Le Parisien pour suivre au plus près l’actualité de la compétition. Et puis on parie, aussi. Celui qui a bon remporte les viennoiseries des autres, celles que l’on distribue par boîte de quatre le samedi matin. À Fresnes, à part ce Croate louche qui avertit que la bande à Suker ira loin, on aime d’abord le Brésil, comme ce manager d’un groupe de rap connu, enfermé pour tentative d’homicide avec le survêt de la Seleção. “Le Brésil, c’était le football champagne, note Bobo. Et puis, pour les détenus, soutenir Ronaldo, c’était une manière d’être contre le système, contre l’État français.” Ça n’empêche pas non plus les détenus de s’enthousiasmer pour les Bleus à mesure que la compétition avance. “À partir des quarts de finale, dès que la France marquait, on faisait un boucan pas possible. Tout le monde frappait sur la porte de sa cellule. Pendant un mois, on n’avait pas vraiment l’impression d’être en prison…”