Big Party dans le jardin de l’Élysée
Malheureusement pour les militaires, personne ne se souvient du défilé du 14 juillet 1998 sur les Champs. En revanche, difficile d’oublier Jacques Chirac qui fait le show quelques heures plus tard dans les jardins de l’Élysée avec les Bleus…
De mémoire de Marie-George Buffet, ministre des Sports de l’époque, “c’est la garden party la plus folle que l’Élysée ait jamais connue!”
Ce 14 juillet, sur le perron de l’Élysée, Jacques Chirac remplit à merveille son rôle de maître de cérémonie. Face à lui, les quelque milliers de personnes conviées à la petite sauterie que les journalistes adorent appeler “la
traditionnelle garden party” de l’Élysée. Micro à la main, le 22e président de la république harangue la foule, remue, se dandine sur un
pied, sur l’autre, serre le poing, et présente au peuple la drôle de bande qui a pris place à ses côtés: “L’équipe de France!” Puis une courte pause, et la boulette: “L’équipe de France et la coupe de France... La coupe du monde!
Pardon!” Un lapsus qui fait aujourd’hui partie de l’histoire. Aimé Jacquet, lui, tend le trophée à bout de bras face à une foule dans un état second. Jamais depuis que la république fête la prise de la Bastille dans les jardins présidentiels une garden party n’avait été le théâtre de telles scènes. L’Élysée a même invité quatre mille jeunes de France et de Navarre à venir célébrer les héros du jour. La garde républicaine s’adapte à l’air du temps et interprète We Are
the Champions ou I Will Survive. Des militaires bardés de décorations s’écartent pour laisser passer les champions du monde, et des gros bras de la politique font la queue pour gratter un autographe. Face aux caméras du JT de France 2, Philippe Séguin égrène les différentes signatures qu’il a obtenues avant de chausser de grosses lunettes noires et de s’envoyer un cigare de 25 centimètres. Après avoir agité la coupe, Aimé Jacquet –le seul à avoir enfilé une cravate– montre qu’il n’a rien à envier aux discours politiques: “Cette coupe, on vous la donne. Elle vous appartient.” Visiblement pas prévenu qu’il interviendrait, Zidane balbutie quelques remerciements avec une voix éraillée sous les “Zidane président!”. La rumeur veut que les finalistes du championnat de France de rugby, mais aussi le RC Lens et le PSG –vainqueurs du championnat et de la coupe de France– sont là, mais tout le monde semble s’en foutre. Quant aux politiques, ils se contentent de déblatérer des banalités sur la France black-blanc-beur quand une caméra passe à proximité. Tout ce beau monde est éclipsé par un Jacques Chirac rayonnant, en plein dans son élément avec son pin’s à l’effigie de Footix au col de sa veste. Le contraste avec son premier ministre socialiste Lionel Jospin, dans un style bien moins décontracté, est frappant. Ça l’est encore plus quand, vers 14 h 15, alors qu’il est l’heure de se diriger vers le buffet, le président se décide à faire ce qu’il fait de mieux: de la politique. Au grand dam de son service de sécurité, Jacques Chirac dévale les marches du perron et se jette dans la cohue, suivi par Aimé Jacquet. Bingo, le soir-même, les journaux ne retiennent qu’une image: celle du chef de l’État et du sélectionneur qui serrent des paluches et signent des ballons au milieu des Français. Et un, et deux, et trois zéros pour Chichi.