So Foot

L’autre bataille du “milieu”

-

Alors que la France entière vibre au rythme du mondial, Gérard Finale est condamné, comme commandita­ire, avec cinq autres personnes, pour l’assassinat de la députée Yann Piat. Retour sur le coup de sifflet final le plus sordide de l’été.

C’est cuisines le genre de pays d’ingrédient­s comme le Mexique que l’on trouve ou la Colombie. aujourd’hui Des en contrées plongeant où dans criminels les et pourtant politiques dans éliminent le Var que, ceux le 16 qui juin, tentent six personnes de dévoiler sont leurs reconnues méthodes. coupables C’est de l’assassinat de la députée Yann Piat au terme de cinq semaines d’un procès surréalist­e sur lequel planera l’ombre de liaisons dangereuse­s entre le crime plus ou moins organisé et les élus. “Le palais de justice de Draguignan était en état de siège et les hélicoptèr­es tournaient au-dessus du bâtiment, explique

Claude Ardid, auteur de deux livres sur l’assassinat de Yann Piat. C’est l’affaire des vingt dernières années. Toute la France a défilé, dont François Léotard, exministre de la Défense, et Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille. Il y avait aussi les avocats stars, Gilbert Collard, pas encore au FN, et Jacques Vergès. À chaque audience, on se disait que la vérité pouvait exploser.” Au final, le patron d’un bar de Hyères, le Macama, un dénommé Gérard Finale, est condamné à perpétuité. À lui le mauvais rôle du commandita­ire. À ses côtés, des clients de son bar, les exécutants: six gars de la région au maigre CV de délinquant­s. Officielle­ment, Finale aurait ordonné à ses porte-flingues d’éliminer l’élue, en pleine croisade contre l’affairisme du milieu politico-mafieux, pour mieux s’asseoir dans le fauteuil laissé vide par la disparitio­n de l’ex-parrain du Var, Jean-Louis Fargette, dit “Savonnette”. Claude Ardid, lui, a surtout le sentiment que la lumière n’a pas été faite et que seuls les lampistes ont payé. “C’est comme l’affaire du petit Grégory: l’opinion publique et la presse étaient divisées entre ceux qui croyaient à un crime crapuleux et ceux qui penchaient pour un crime politique.” Le procès ne lèvera pas le voile sur la deuxième hypothèse. “Il existait une telle duplicité entre politiques de tous bords et mafieux qu’il était impossible de sauver Yann Piat, explique un magistrat au chevet de l’affaire à

l’époque. Finale est un sous-produit de la pègre, il n’est rien du tout. C’est une insulte à l’intelligen­ce d’en faire le commandita­ire.”

Abattue par des tueurs à moto quatre ans plus tôt, Piat est la première députée française assassinée et la principale menace sur les arrangemen­ts supposés entre le monde politique local et le milieu du grand banditisme. À l’époque, la Côte d’Azur est divisée en deux zones géographiq­ues. “Le chef du milieu marseillai­s, Francis le Belge tenait la côte jusqu’à Bandol. Le Toulonnais Fargette s’occupait du reste, éclaire le magistrat. Chacun avait ses entrées avec les deux partis, le RPR et le PR. Quand Piat a affirmé sa volonté de devenir maire de Hyères, où la vente de terrains militaires promet une manne financière colossale, le système ne pouvait plus fonctionne­r. Personne n’avait intérêt à la laisser faire.” Le destin de la députée est d’autant plus scellé que cette dernière vient de claquer la porte du FN, un parti qui rafle la mairie de Toulon en 95. Entre Jean-Marie Le Pen et celle qui a rejoint l’UDF, née de père inconnu à Saigon, les relations sont complexes. Un temps compagnon de sa mère pendant ses années indochinoi­ses, Le Pen la chaperonne pendant ses débuts en politique. Pas longtemps. “J’ai adoré Jean-Marie et j’ai détesté Le Pen”, résumera-t-elle un jour, pour marquer la distance entre l’homme et ses idées politiques. Piat est désormais seule dans un nid de guêpes.

Le football, hautement politique, n’échappe pas à la corruption. Le Sporting Club de Toulon fait office de machine à laver dans le système de détourneme­nt de fonds publics. À l’époque, c’est même Maurice Arreckx, le président du conseil général du Var, qui donne la combine à Alain Asse, le président du club et à son entraîneur, Rolland Courbis. Le coach passe à table: “Arreckx

nous a dit: ‘Je vais me démerder pour vous filer trois millions de francs. Pour qu’il n’y ait pas de jaloux, on dira que c’est pour le centre de formation, mais on s’en fout, vous les filez aux pros si vous voulez!’” À l’issue de leurs procès, en 1990, Asse et Courbis sont condamnés et incarcérés. Le début des emmerdes pour Toulon, qui, de déboires financiers en contre-performanc­es sportives, va progressiv­ement tomber jusqu’en division d’honneur en 1998. Il n’empêche que les Toulonnais, cette année, feront quand même la fête. “J’ai vu trois fois

Toulon en feu, explique Claude Ardid. En mai 1968, en 1993 quand le RCT gagne le titre de champion de France de rugby. Et en 1998, après la finale de la coupe du monde.” jPAR JOACHIM BARBIER

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France