So Foot

“Un seul chasseur tue l’éléphant, mais c’est tout le village qui mange”

- Marc-André Zoro, internatio­nal ivoirien NJ

En Italie, j’avais ressenti de la colère en voyant un incident raciste à l’égard d’un autre joueur noir, et je m’étais juré que si cela devait m’arriver avec Messine, je devrais marquer le coup. Un match de football n’est pas au-dessus de tout, il n’y a pas que ça dans la vie. Lorsque cela m’est arrivé, j’ai été animé par une intense colère. J’ai eu envie de tout casser pour que les gens comprennen­t que nous ne sommes pas inférieurs à eux. En prenant le ballon contre l’Inter Milan, je voulais pousser la Fifa, l’opinion publique et le monde entier à prendre des résolution­s pour lutter réellement contre le racisme. Adriano m’a dit: “Zoro, si tu pars, si on arrête de jouer, c’est eux qui ont gagné. Mais on t’a entendu, on te soutient, si tu reviens maintenant, on montre que l’on est plus forts qu’eux.” Ses mots m’ont donné de l’adrénaline, de la force, c’est pour ça que j’ai pu reprendre le jeu. J’ai reçu beaucoup de soutiens après le match. Ronaldinho, Eto’o, Henry, mais quand Nelson Mandela vous appelle et vous dit: “Je suis avec toi, sois fort, ton acte restera à jamais dans la mémoire des gens”, vous comprenez ce que cela signifie. Aujourd’hui, je ne souffre pas, je suis content, car les racistes savent ce que nous, victimes, pensons d’eux, cela me réjouit. Toi le raciste, si tu penses réellement que quelqu’un t’es inférieur, pourquoi as-tu besoin d’en parler pour te sentir plus fort? Le tigre ne prône jamais sa tigritude. Les inférieurs, ce ne sont pas les victimes, ce sont les racistes. Je n’ai pas de message à faire passer à ceux qui font des cris de singe, parce qu’en avoir un, ce serait comme les implorer de nous aimer. Et aimer, cela ne s’exige pas. Après, c’est vrai que je m’inquiète pour mes enfants. Quand j’ai subi ces cris de singe, quel âge avait Kean? Quatre ans. Pourtant, il a vécu la même chose que moi. Cela signifie que, mathématiq­uement, mes enfants n’en seront pas à l’abri à l’âge adulte, le problème ne sera probableme­nt pas résolu. Rien n’a été mis en place pour préserver les génération­s futures… Tous les joueurs n’ont pas le caractère et la force d’affronter le racisme, mais il ne faut pas le leur reprocher. Il ne peut pas y avoir deux Mandela, deux Malcolm X, mais il y aura toujours quelqu’un qui se battra pour les autres, j’en suis sûr. Dans mon village, on dit: “Un seul chasseur tue l’éléphant, mais c’est tout le village qui mange.” Il faut s’appuyer sur ceux qui sont nés pour ça.

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