Society (France)

Zeppelin de bière

- –MARC HERVEZ, À LONDRES PHOTO: CHRISTOPHE­R NUNN POUR

“Je suis loin d’être un hipster, je suis juste un ennuyeux père de famille de 37 ans passionné par la production de bière”, s’auto-caricature Logan Plant, devenu le pape de la bière artisanale avec sa marque, Beavertown Brewery, ses canettes multicolor­es et ses 50 salariés qui produisent 45 000 hectolitre­s de houblon par an. Le garçon n’est pas n’importe qui: Logan est le fils de Robert Plant, l’ancien chanteur de Led Zeppelin, 300 millions d’albums vendus et des dizaines de chambres d’hôtel ravagées. “Il a dû m’emmener au pub pour la première fois lorsque j’avais quoi… 6 mois, s’amuse Plant fils. Dans les West Midlands où j’ai grandi, le pub est une extension de la maison. Mon père mettait un chapeau, et toute la famille filait au pub, où on était juste des gens parmi d’autres. C’est là que je suis devenu un ayatollah de la bière. À tel point que si dans un bar, il n’y a que de la lager industriel­le, je prends une limonade.” Malgré sa rock star de père, Logan dit avoir vécu “une enfance normale: à l’école, en face de la case ‘profession du père’, je mettais un truc vague genre ‘musicien’. Les gens devaient croire qu’il était dans un tribute band.” Puis, ce sont des études en médecine du sport, un diplôme supérieur en massages et Logan se lance enfin dans… le rock’n’roll. Et se plante. Deux groupes foireux, Black Country Bandits puis Sons of Albion, et pas mal d’amertume déjà. “Je n’étais pas très heureux. Je chantais des trucs grunge qui ne me ressemblai­ent pas et je galérais financière­ment. Et le pire: je ne pouvais pas boire de bière, car je devais faire attention à ma voix.” Un soir de novembre 2010, Logan a la révélation: ce qu’il veut faire, c’est de la bière. Il plaque tout et commence à brasser, seul dans sa cuisine. “Je mettais un bordel monstre dans la maison –sans parler de l’odeur–, tout ça pour remplir péniblemen­t 20 bouteilles par brassin.” Mais Logan a vu juste, Beavertown explose. Le site Ratebeer l’élit “meilleure nouvelle brasserie indé du pays”. Que s’est-il passé? “À une époque d’instabilit­é économique pour la génération des 25-35 ans, c’est la manière de consommer qui fait office d’appartenan­ce sociale”, commence le sociologue Thomas Thurnell-read. “Les bobos adorent la bière craft, c’est populaire donc cool, et en même temps, cela permet de se distinguer”, complète Quentin Blum, importateu­r de la marque en France. Même si Plant a d’autres ambitions. Son objectif: “Convertir le docker qui tourne à la lager depuis 30 ans.” Les fans de son père, en somme.

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