Internet fera-t-il l’élection?
Aux États-unis, les chiffres sont colossaux: 85 millions d’abonnés pour le compte Twitter de Barack Obama, 25 millions pour celui de Donald Trump. En France, Jean-luc Mélenchon cumule, lui, à peine à plusieurs centaines de milliers de vues sur Youtube. Po
Quel rôle joue Internet dans la vie politique française aujourd’hui? Arnaud Mercier: La première à avoir investi Internet a été Ségolène Royal, avec son site Désirs d’avenir, en 2007. Depuis, il y a une sorte de montée en régime. Pour les candidats, c’est un moyen d’essayer d’avoir de l’audience supplémentaire, en plus des médias. C’est d’autant plus nécessaire que l’espace médiatique est saturé. Pendant la primaire de la droite, les candidats de gauche n’y ont pas beaucoup d’accès, et inversement. Et puis, l’avantage de ces réseaux est de permettre une communication directe avec les sympathisants, sans passer par les journalistes et leurs questions. Valérie Jeanne-perrier: Chez les politiques, les réseaux sociaux sont aussi utilisés dans une logique de réservoir à contenus. Il faut toujours avoir quelque chose à dire pour assurer une continuité en dehors des rendez-vous médiatiques conventionnels. Usul: Le problème, c’est que l’on est face à une production extrêmement standardisée. On sent que la plupart des candidats ont confié leur chaîne Youtube à une boîte de communication, qui leur fait des petits contenus, pour meubler. Ça n’intéresse personne. Le public est connaisseur des réseaux. Si on fait une opération de com’ sur Twitter, il la voit venir à des kilomètres. François Fillon a lancé une campagne de tweets avec des comptes un peu fantômes relayant des messages sous forme de spams. Cela a été très mal reçu. De leur côté, Jean-luc Mélenchon ou Florian Philippot vont avoir une utilisation plus proche des habitudes des utilisateurs d’internet, un peu moins ‘foutage de gueule’ aussi.
Concrètement, à qui parle-t-on lorsqu’on communique via les réseaux sociaux? Thierry Vedel: Comme l’a montré la politologue américaine Pippa Norris, sur Internet, on prêche avant tout les convertis. Mais la communication politique doit aussi s’adresser aux gens que l’on a du mal à toucher ou qui ne sont pas politisés. Et n’oublions pas que 15% des Français n’utilisent pas Internet. Valérie Jeanne-perrier: En communication politique, ‘la théorie de la communication à double étage’ consiste à dire qu’un message passe par deux étapes. Pour toucher l’opinion, on va passer par des relais qui vont sélectionner les messages, leur donner une force et les interpréter. C’est cette logique qui est recherchée sur Twitter: on ne cherche pas directement le citoyen lambda, mais la caisse de résonance, c’est-à-dire le média, le spécialiste, l’expert, qui va prendre cette matière première pour la rediffuser et la commenter ensuite. Christian Delporte: Internet est un média alternatif, mais qui a besoin des médias traditionnels. La chaîne Youtube de Jean-luc Mélenchon fonctionne parce que les médias vont en parler. Et comme ils en parlent, ça fait un effet boule de neige. Idem avec Trump: il est contre les médias, mais quand il utilise