Society (France)

“La droite est en panne idéologiqu­e”

Gaël Brustier, politologu­e

- -BB

C’est la première fois que la droite républicai­ne est absente d’un second tour présidenti­el: que cela signifie-t-il? Il y a une implosion du système partisan en France avec probableme­nt la substituti­on d’un personnel politique à un autre, comme on a pu le voir dans d’autres crises de régime, par exemple en 1958. La droite fait d’autant plus les frais de ce changement de système qu’elle est en pleine crise existentie­lle. La campagne l’a montré, elle est en panne d’un point de vue idéologiqu­e et n’a pas su inventer une offre autonome qui ne soit ni sous la pression du Front National, ni en phase avec l’exercice économique du pouvoir par François Hollande et Emmanuel Macron.

D’où vient cette “crise idéologiqu­e”? C’est une crise ancienne, qui date d’il y a au moins 15 ans. La droite a cru qu’elle allait pouvoir tirer profit de La Manif pour tous pour développer ses thématique­s identitair­es, mais elle n’a avancé aucune propositio­n dans cette campagne. C’est assez nouveau pour la droite: dans cette campagne, ses thématique­s identitair­es et conservatr­ices n’ont pas réussi à acquérir de centralité. Le débat s’est fait sur des thèmes économique­s et sociaux, sur la question démocratiq­ue et la contestati­on des élites –ce qu’on appelle l’anti-système. Il y a un moment populiste qui dessert les grands partis de gouverneme­nt qui ont gouverné la Vème République depuis ses origines: on ne peut pas expliquer le score de la droite si on ne comprend pas cela.

Paradoxale­ment, n’est-ce pas justement la droite qui est plutôt en état de gagner les législativ­es –si l’on ajoute au score de Fillon celui de Dupont-aignan? C’est toujours hasardeux d’additionne­r. Mais il y a effectivem­ent 4 à 5% des Français qui sont séduits par les idées de Dupont-aignan, qui constituen­t un coeur d’électorat assez traditionn­ellement gaulliste. Ils n’ont pas la même vision du rôle de la France en Europe, du rapport à l’allemagne, des questions économique­s et sociales ou de la souveraine­té que François Fillon, donc on ne peut pas aussi simplement parler d’une proximité idéologiqu­e. Mais le bloc droitier reste puissant dans ce pays, bien entendu. De là à anticiper pour les élections législativ­es… D’autant plus qu’il y aura un président de la République qui n’aura pas de parti en arrivant à l’elysée. Que fera la droite avec Emmanuel Macron? Est-ce qu’ils vont se rallier et conclure une alliance? C’est très difficile à dire.

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