LES SUPER-HÉROS SONT FATIGUÉS

“Je n’ai jamais vraiment été très fan des superhéros, c’est peut-être pour cela que j’ai pu les tuer.” Avec sa série Not About Death, la photographe argentine Romina Ressia a mis en scène la périssabilité de ces figures héroïques et sans âge dont le caractère immortel serait devenu un spectacle décidément trop indécent pour nous, entités vulnérables et pathétiques condamnées à la poussière. “Comme beaucoup d’autres enfants, j’ai grandi avec cet idéal d’omnipotence, de beauté et de pouvoirs surnaturels, l’idée que le Mal ne gagne jamais, et que quelqu’un viendrait à mon secours si je me trouvais en danger”, explique l’artiste. Les pendules cosmiques sont donc ici remises à l’heure, la fin désormais revêtue de lumière crue: Superman est devenu un vieillard hippie arborant le visage de la mort avec dignité, on imagine Alice terminant schizophrène à force de mauvais trips et Blanche-neige morte d’épuisement après que sa beauté fanée ne lui laissa pas d’autre option que celle de s’occuper de sept hommes à la maison. Qui n’a jamais fantasmé la possibilité excitante car inédite d’un unhappy ending au royaume des vainqueurs dorés? “Beaucoup de gens sont en fait vraiment en colère, ils disent que c’est très irrespectueux de tuer ces personnages. Je pense pour ma part que ce fantasme occidental d’immortalité est responsable de beaucoup de frustration et de crises de milieu de vie. En ce sens, les autres cultures n’ont pas ce problème, elles voient le passage du temps et la mort comme des portes vers quelque chose de plus grand, un voyage vers la sagesse.” Go ask Alice?