Society (France)

TEST COMPARATIF : LE sel

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LA BALEINE SEL FIN IODÉ, ÉDITION LIMITÉE Note: 11/20

Graphisme: ★★★★✩ Plaisir de versage: ★★★✩✩ Goût: ★★✩✩✩ D’emblée, on aime le design twisté pop seventies, blanc immaculé et logo iconique à la clé. En main, le velouté des parois et la forme ellipsoïda­le de la verseuse assurent à l’ensemble une tenue lestée et agréable, quasi-“télécomman­de”. Le dispositif d’ouverture –astucieux– engage quant à lui un dialogue avec le pouce sur le choix du calibrage (petit ou grand trou?), qui se solde systématiq­uement par un “clic” enthousias­te et un versé tout en fluidité. Avec cette édition limitée, le sel est une fête… à laquelle les papilles ne semblent hélas pas avoir été invitées. Non, ce sel n’est pas un poète. Et la finesse de ses grains, qui faisait encore le plaisir des yeux quelques secondes auparavant, se transforme vite en arme de dessècheme­nt massif une fois en bouche. Ça tape dur, ça tape mat et sans préavis en fond de langue, malgré les efforts désespérés d’une salivation déclenchée en urgence. Les amateurs de Michael Haneke seront ravis. Ceux qui ont encore un peu de tendresse passeront leur chemin.

Que saler avec?

Un criminel qui refuse d’avouer.

CÉRÉBOS SEL FIN IODÉ Note: 10/20

Graphisme: ★★★★✩ Plaisir de versage: ★★✩✩✩ Goût: ★★✩✩✩ D’aucuns le qualifient paresseuse­ment de “sel à frites” ou de “sel de table”, et force est de constater que l’on n’est pas ici dans la grande subtilité. En rester là serait réducteur. Par un design simple, Cérébos promet peu, mais promet juste. Avec –et le mérite en revient grandement au subtil anti-aggloméran­t E535– un versé toujours fluide, une prise en main solide et un choix de jauge triple, ce sel fin iodé valide chaque basique. On regrettera cependant une ouverture d’opercule perfectibl­e, qui prend le parti de laisser choir le plastique protecteur dans le contenant, le mélangeant ainsi au produit, qui perdra sa virginité. Et qu’importe si le goût éclate bien trop puissammen­t au palet, Cérébos, qui précise sur son packaging être dans le métier depuis 1902, a pensé à l’utilisateu­r. Avec ce petit conte à l’arrière du contenant qui saura faire voyager petits et grands: “Il était une fois un petit garçon malade, qui refusait de prendre son remède…”

Que saler avec?

Vos frites, votre table, mais pas que!

REFLETS DE FRANCE SEL DE GUÉRANDE IGP Note: 13/20

Graphisme: ★★★✩✩ Plaisir de versage: ★★✩✩✩ (attention à l’humidité!) Goût: ★★★★★ Passons vite sur le problème de la languette d’inviolabil­ité semi- détachable qui blesse systématiq­uement le dessous des ongles. Ce serait faire un mauvais procès à un sel solide et attachant, auquel on ne demande pas d’être génial et qui pourtant s’acquitte de sa tâche avec un supplément d’âme émouvant. La récolte manuelle a bien sûr sa part de mérite: le grain est dodu, craquant, gris sans être triste, sentimenta­l mais jamais mièvre. La dégustatio­n est légèrement piquante et fait son chemin, patiemment, calmement, du bout jusqu’au fond de la langue. Une vraie réussite pour Reflets de France, si ce n’était ces sinistres illustrati­ons d’assiettes creuses et ce cafard sépia en guise de graphisme pour l’emballage. Qu’on se le dise, la France n’est pas un papier peint de crêperie bretonne! Même l’habillage de Des racines et des ailes a fait l’effort de la modernité. Pourquoi pas vous?

Que saler avec?

Un pavé de saumon de l’espace Schengen.

HILDEGARDE DE BINGEN SEL ARO- MATIQUE BIO Note: 7/20

Graphisme: ★✩✩✩✩ Plaisir de versage: ★✩✩✩✩ Goût: ★★★✩✩ Autant l’avouer, c’est la colère qui risque d’assaisonne­r cette critique. Car dès l’achat, cet étendard du vivre bio agace. Annoncé à plus de quatre euros les 100 grammes –ce qui, rapporté au prix par gramme, le place au niveau d’un Porsche Cayenne S– ce sel se veut “quali”, peut-être même exclusif. C’est raté. C’est d’abord le design qui pèche. Une jeune danoise humant une feuille de laurier, des polices sans caractère, des logos en cascade, des aplats verts à ne plus savoir qu’en faire… N’ayons pas peur des mots, c’est très moche. Mais le pire est à venir. Car le versage –relativeme­nt souple– nous réserve une nouvelle mauvaise surprise. Ce n’est pas du sel, non. C’est un amas kaki d’herbes broyées piqué de quelques cristaux iodés, c’est une récolte de balais brosse sur un sol poussiéreu­x. Si le goût sauve un peu l’ensemble, pour peu qu’on aime manger de la poussière aux herbes, il est trop tard pour nous, Hildegarde nous a perdus.

Que saler avec?

Vos additions.

DUCROS MOULIN SEL DE GUÉRANDE Note: 13,5/20

Graphisme: ★★✩✩✩ Plaisir de versage: ★★★★★ Goût: ★★★✩✩ On pourrait tenir le moulin sel de Guérande pendant des heures sans jamais s’ennuyer. Malheureus­ement, la vie et ses impératifs nous rattrapent par la manche et il faut se résoudre à lâcher ce petit flacon de verre élégamment ergonomiqu­e (un port accueillan­t pour votre paume de main) et sa base rondelette lestée façon culbuto. Qu’on se le dise: ces adieux n’effaceront jamais le frisson sonore ressenti à la mouture: ce crissement caractéris­tique qui plonge dans les bas médiums à mesure que l’on ralentit le tempo, succulent sosie auditif du pneu de berline sur petits graviers. Certes, la gustation est un peu timorée (subtile, diront les aficionado­s de la firme avignonnai­se) et le sel de table peine ici à transcende­r son simple statut de condiment. Qu’importe, on retournera moudre encore quelques minutes, juste pour le thrill of it, au-dessus d’un évier ou d’un lavabo, sans crainte du qu’en-dira-t-on. La sensualité l’emportera.

Que saler avec?

N’importe quoi tant qu’on entend un album d’al Green.

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