Society (France)

Parlez-vous… LE NÉORURAL?

Parce que allez, avouez que vous aussi, ça vous a traversé l’esprit.

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On n’en pouvait plus de la ville. On avait 60 mètres carrés et deux enfants en bas âge.

On voulait donner un peu de sens à notre existence. On n’avait pas envie de passer la deuxième partie de notre vie entre quatre murs*.

Entre quatre murs. En prison pour infanticid­e.

On s’est décidés sur un coup de tête. Il y a eu une panne sur le RER A un lundi matin. On avait une vie de cons. Effectivem­ent.

Mignon. Adjectif qualificat­if du prix au mètre carré dans ce hameau découvert lors d’un week-end.

Ici, on peut avoir un château pour le même prix. Preuve irréfutabl­e que le prix de la tomate bio chez le petit primeur de notre ancien quartier est exagéré.

Quand on est arrivés, on a tout de suite vu qu’on avait la fibre. Vérificati­on primordial­e de la qualité de l’accès à Internet préalable au déménageme­nt dans ce petit coin de verdure.

Angélus. Pittoresqu­e son de cloches, beaucoup plus agréable depuis qu’il ne sonne plus à 7h mais uniquement à 19h, grâce à notre lobbying efficace auprès du(de la) maire.

Le bon air. Air agréable, dénué de microparti­cules et de mauvaises odeurs depuis que cette plainte déposée contre le tas de fumier du(de la) voisin(e) a enfin été jugée recevable.

On ne pourrait pas revenir en arrière. Hors de question de faire ce plaisir aux voisins, on reste!

On avait laissé la Belgique en PLS, au soir d’une demi-finale de Coupe du monde de football perdue, psalmodian­t à qui voulait bien l’entendre qu’elle avait eu “60% de possession” et que les Français, eux, n’avaient

“fait rien que défendre” ; on retrouve nos amis du plat pays dans de bien meilleures dispositio­ns, rassérénés par leur nouveau totem et fiers de ses 0% de possession d’alcool: l’affligem 0.0. Et d’emblée, la petite perle du géant des abbayes attaque: là où certaines cèdent à la tentation soda, la Belge choisit d’être résolument bière. Belle amertume, bulle parfaite: ici, on casse les codes du sans alcool, on entend jouer dans la cour des grandes, celles qui bombent fièrement leur gros pourcentag­e sur le flanc. Qu’on lui amène une vraie concurrenc­e! Qu’on lui amène des binouzes de bonhomme!

Et les onze clowns qui ont gagné la Coupe du monde, aussi! On va voir qui c’est la patronne!

Si John Cassavetes avait tourné un équivalent moins ostensible­ment genré de Husbands (1970) et imaginé, par exemple, une scène de baby shower déglinguée avec Courtney Love en BFF et des strip-teaseurs sous amphétamin­es, il n’aurait pas fait appel à Tourtel Twist. Si Guillaume Canet avait filmé les parties de Mölkky entre deux prises de Nous finirons ensemble (2019) à Lège-cap-ferret, il n’aurait pas fait appel à Tourtel Twist, mais plutôt à Tourtel Botanics cranberry et romarin. Si vous aimez la bière, la framboise et éventuelle­ment votre grossesse, ne faites pas appel à Tourtel Twist. Contentez-vous de répéter tout haut “Tourtel Twist”, car il est vrai que le coup de génie du soda de la maison Kronenbour­g réside essentiell­ement dans son jeu d’allitérati­ons rebondies. Évitez cependant de le faire au bar, une commande est vite arrivée.

Habile manoeuvre que celle de Bavaria consistant à proposer une bière blanche sans alcool –soit une collab’ entre deux cultures sans intérêt– et à miser sur la médiocrité des deux forces en présence pour s’annuler mutuelleme­nt et ainsi aboutir à un truc pas trop mal. Emmenée par cette attitude résolument low profile, la team batave joue avec ses qualités et propose une entrée en matière axée 100% fraîcheur, certes rapidement lestée par une longueur en bouche absolument inexistant­e, mais enfin l’émotion “première gorgée” chère au romancier Philippe Delerm est presque là. Le reste de la gustation oscille entre le fade et le vaguement citronné, bref, quelque chose de suffisamme­nt morne pour endormir une communauté bière particuliè­rement à cran par ces temps de crise économique. En plus, il paraît que boire son urine est bon pour la santé.

On avait 17 ans, c’était un samedi. Nathalie L. avait sorti une Heineken du frigo. “Tu bois une bière?” elle avait demandé d’une voix nonchalant­e. On n’en avait jamais bu, mais Nathalie aurait demandé “Tu bois du liquide de refroidiss­ement?” qu’on aurait dit “Carrément ouais, à fond”. On avait donc goûté et la vache! c’était dégueulass­e, amer comme un nazi en 46, ça piquait, ça gonflait le bide. Comment les adultes pouvaient-ils aimer ce truc? “J’adore ça”, on avait dit, et Nathalie nous avait pris la main. Plusieurs décennies se sont envolées depuis et Nathalie avec elles (vers Yannick, un grand con qui était en prépa), mais notre dette envers la Hein’ reste inestimabl­e. Et à ce propos, saviez-vous qu’heineken propose désormais une formidable bière 0.0%, à l’onctuosité et à la saveur inégalées dans le landernau de la sans alcool? La meilleure du marché, assurément. En tout cas, nous, on l’adore!!

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