TROPIC APÉRO - OLIVES VERTES CASSÉES À LA GRANSOISE
Fermeté: ★✩✩✩✩ Méridionalisme: ★✩✩✩✩ Solution d’ouverture: ★★✩✩✩
C’est Alex Todorov, professeur de psychologie à l’université américaine de Princeton, qui l’affirme dans la revue Psychological Science: il est très difficile de se départir d’une première impression. Mais bon, chez Tropic Apéro, les études de profs de psycho donneurs de leçons, on les prend, on en fait des rouleaux et on les met sur les dérouleurs des toilettes du siège social. Avec son nom de boîte de nuit de camping héraultais, son packaging 100% plastoc et son design en hommage aux fins de mois étudiantes, la première impression laissée par l’encas français égale celle du(de la) candidat(e) qui arriverait en retard et bourré(e) au pastis à un entretien d’embauche chez Dior. Il faut être honnête, cependant: Tropic Apéro ne tente en aucun cas de tromper son monde car la deuxième impression, gustative celle-ci, est en tout point identique. +1 pour la cohérence.
C’est vrai: on a une petite défiance a priori vis-à-vis de Reflets de France, son esthétique sépia en carton façon Louis la brocante et son snobisme de caviste à l’oeuvre au moment de titrer “Picholines” sur le bocal, au détriment d’un “olives vertes” de triste profane. Quant à cette condescendance consistant à évoquer de vagues “quantités négligeables de glucides et de sucre”, elle a bien failli nous faire renverser une quantité non négligeable de leur délicieux jus sur notre pantalon de pauvres gens qui n’y connaissent rien en quantités de glucides. Car oui, ce jus est délicieux. Est-ce qu’il est aussi délicieux que ces délicieuses petites olives fermes comme un “non” à Maastricht? Absolument pas. Est-ce qu’on s’est pété une dent sur ce noyau beaucoup trop gros pour une chair beaucoup trop délicieuse? Absolument.
Ainsi, Carrefour* nous promet des olives “prêtes à l’emploi”. C’est-àdire, techniquement, des olives au chômage. Et force est de reconnaître qu’au xxie siècle, cette caractérisation choque par les clichés qu’elle véhicule: nous voici ici en présence d’olives résignées, accablées, des olives qui se flétrissent doucement à passer des journées en jogging, des olives fatiguées de regarder tout Netflix, des olives toutes ternes à force d’être filmées par les frères Dardenne. Non, ce n’est pas une belle image du chômage que celle véhiculée par l’enseigne hexagonale, surtout lorsqu’on sait le travail formidable qu’accomplissent, chaque jour, les femmes et les hommes de Pôle emploi pour faire de l’inactivité professionnelle un véritable petit cocon dont on ne veut plus partir.
*Au fait, vous étiez au courant pour le logo Carrefour?
Si le chuintement subtil produit par l’ouverture du couvercle évoque le son, mat et rassurant, d’une porte de luxueuse berline, ce n’est pas par hasard: ce que la maison Tramier nous propose ici, c’est tout simplement la Rolls des olives. L’olive premium, intérieur cuir, avec minibar réfrigéré et accoudoir moelleux. L’olive avec capteur de pluie, autoradio et chargeur CD. L’olive spacieuse, qui gagne à glisser langoureusement sur l’enrobé brûlant d’une route varoise comme à laisser craquer ses pneus sur le gravier d’une allée bourgeoise. L’olive qui mériterait une bonne fois pour toutes que l’on change de point de vue. Car non, la verte de Tramier n’est pas la Rolls des olives. C’est Rolls-royce qui est la Tramier des voitures. Une Rolls au calibre parfait, à l’assaisonnement exceptionnel, moelleuse et ferme à la fois. Une Rolls qu’on s’enfile compulsivement, par dizaines et pure gourmandise.
Quel Olivier pour cette olive? Jeanpaul Ollivier.
Note: