“peu importe le fond, l’important, c’est que la forme puisse passer pour du lao tseu”
Cette instagrammisation de la pensée, sur fond de mises en scène kitsch (grosse tendance coucher de soleil et dauphin), c’est les nouvelles nouilles sous vide de la philo. À l’ère de la prise de parole obligatoire sur les réseaux, ces citations viennent sauver la peau des galériens du propos coup de poing. Des sites consacrés aux proverbes inspirationnels se multiplient. On pense à Santé+ Mag qui, entre deux articles sur « les secrets des femmes indiennes pour soigner l’alopécie » et « les techniques pour blanchir vos aisselles », produit chaque jour des dizaines d’aphorismes. Exemple : « C’est n’est pas la quantité d’amis qui compte, c’est leur qualité » (maxime qui ne vaut manifestement pas pour leurs 5 millions d’amis Facebook).
Bien sûr, c’est irritant. Les citations inspirationnelles n’ont pas tardé à voir apparaître leur version memifiée. Motif du détournement ? Ces phrases ne sont que très rarement sourcées. Résultat, en 2013, Emily Pattinson s’est amusée à attribuer des citations d’hitler à Taylor Swift. Et récemment, les adversaires de Trump ont vendu des « motivational posters » à ses partisans, dont les passages étaient en fait extraits de phrases de Voldemort dans Harry Potter (les bénéfices ont été reversés à une association LGBTQ latino). Mais quelque part, on reste intrigué par cet appétit pour le prêt-à-penser. Dans un Occident de plus en plus sécularisé, ces citations sont le symptôme d’une nouvelle forme de spiritualité, entre le New Age et le paganisme mystique. « Après la contre-culture américaine des années 50, l’occident retrouve les vieilles traditions animistes, païennes, chamaniques… », explique le philosophe Marc Halévy. Mais américanisées, passées à la moulinette du développement personnel et son explosion aux US dans les 80’s, « pour en faire une spiritualité efficace et compréhensible