UNE MYSTIQUE INEXPLORÉE
ous sommes le 23 avril 2016. Beyoncé balance Lemonade, un album visuel que le monde entier se met aussitôt à éplucher dans les moindres détails. Dans son mood board : des peintures faciales, une danse autour d’un cercle de feu et une pièce remplie d’eau où la chanteuse nage en robe immaculée. Une imagerie qui fait directement référence à des croyances méconnues : les cultes d’origine yoruba. Stefania Capone*, directrice de recherche au CNRS et responsable du cours Anthropologie des religions afro-américaines à L’EHESS, explique : « Les Yorubas sont un groupe ethnique d’afrique de l’ouest, dont le territoire s’étend de la partie sud-occidentale du Nigeria à la partie orientale du Bénin. D’autres groupes d’ascendance yoruba sont connus au Ghana et au Togo. Avec la traite négrière, leurs croyances se sont disséminées dans les colonies américaines. » Résultat : des pratiques religieuses mélangeant tradition yoruba, catholicisme et rites indigènes sont présentes aujourd’hui au Brésil (le candomblé), à Cuba (la santería), et la plus connue en Haïti (le vaudou)… Un folklore qui n’inspire pas que Queen Bey. Cette année, on aura ainsi vu la firme Marvel intégrer le personnage
Nde Brother Voodoo dans son jeu Lego Marvel Super Heroes, Azealia Banks raconter sur le Web son introduction à la santería, le duo Ibeyi chanter en langue yoruba lors du défilé Chanel à La Havane et l’acteur Michael K. Williams (The Wire) incarner un tueur adepte du vaudou dans l’adaptation ciné d’assassin’s Creed, prévue pour décembre. Stylist décrypte les raisons de cette nouvelle dévotion. Si elle se la joue souvent blockbusters bourrins et rythmiques appuyées, la pop culture aime aussi abattre des cartes plus sibyllines. Dans son tarot de Marseille, on a récemment vu des symboles ésotériques (sorcellerie et triangles inversés dans le clip de Dark Horse de Katy Perry, codes prophético-apocalyptiques sur le Blackstar de Bowie) et des intrigues surnaturelles à tendance satanique (les séries Stranger Things et Outcast cet été, L’exorciste fin septembre). Adrien Lherm, qui enseigne l’histoire contemporaine à la Sorbonne et auteur de La Culture américaine (Le Cavalier bleu), explique : « La pop culture, dans sa quête permanente de sources de renouvellement, est toujours allée chercher du côté de formes marginales de croyances.» Son dernier filon ? Les cultes d’origine yoruba, parfaits