Stylist

“VOUS NE VOYEZ PLUS TRÈS BIEN LA PARTIE RÉVOLUTION­NAIRE DE LA GUEULE DE BOIS PERMANENTE”

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et deux avant d’avaler une salade shiitake chia quinoa kale ou un couscous d’épeautre aux légumes préparés la veille à la maison. C’est l’épidémie de la sobriété, chaque jour un nouveau converti. Et les cris indignés de ceux qui ont encore la voix cassée par leur cuite de la veille peinent à couvrir les conversati­ons sur les masseurs chinois, profs de yoga et hypnotiseu­rs qui illuminent nos week-ends sobres et toniques. Ça vous énerve ? Vous n’êtes pas les seuls. La vie saine n’est pas du goût des Français qui font partie des vilains petits canards de la défonce européenne. Alors que l’européen moyen s’enfile en moyenne 10 litres d’alcool pur par an, les Français sont à 11,5 (et les Italiens à 7,6), selon les chiffres du dernier panorama de la santé, publiés par L’OCDE et la Commission européenne fin novembre. Idem pour la clope (22,4 % de fumeurs quotidiens contre 20 % dans l’ensemble de l’union) et pour la pratique du sport (seulement 6 % de Françaises pratiquent une activité physique chaque jour, elles sont le double en Espagne). Même les sober party, ces soirées sans alcool censées « faire fureur » en Suède ou aux États-unis, n’ont pas pris chez nous, malgré d’innombrabl­es articles annonçant « la nouvelle tendance ». Pas étonnant, dans ce climat ultra sober-sceptique, que nous subissions les quolibets de nos amis qui voient d’un mauvais oeil notre teint s’éclaircir sous l’effet d’une discipline de fer. Au cas où vous auriez envie de vous mettre vous aussi au vert (genre, pendant les fêtes), on vous prépare aux critiques de votre entourage, pour que ça ne perturbe pas trop votre karma. et de pop-corn pas encore tombés par terre. En désertant, vous avez basculé dans le camp que vous aviez juré depuis votre pacte de sang en 2de 6 de ne jamais rejoindre : celui des vieux. Ce vaste vivier de gens qui ont renoncé aux barricades, aux rencontres absurdes et à la liberté. Sauf qu’après vingt ans de beuveries intensives, vous ne voyez plus très bien la partie révolution­naire de la gueule de bois permanente et des remontées acides (qui vous donnent surtout des envies de putsch contre vousmême). Vous avez simplement accepté d’être adulte et donc de passer à une autre étape de votre vie. La preuve : à 2 ans, vous adoriez manger du sable et puis un jour, ça vous a passé. Est-ce qu’arrêter de suçoter des cailloux a été vu par votre famille comme une renonciati­on à la vie et à ses plaisirs ? (Si vous répondez oui, on vous souhaite bien du courage pour vos fêtes de fin d’année.) Par ailleurs, vous avez eu des voisins à la campagne qui se sont soignés toute leur jeunesse à la gnôle et vers 30 ans, le résultat était plus proche de la progeria que de la fontaine de jouvence.

In vino veritas:

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